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Blogres - Page 102

  • Psychose épatante à la Jonction

     

     

    par Pascal Rebetez

     

    bacon_03.jpgOn y va sur la pointe des talons : les spectacles présentés dans les Maisons de quartier sont souvent teintés d’amateurisme, tout au mieux éclairé, croit-on. Mais on sait aussi que c’est dans ces lieux improbables que naissent parfois de belles carrières.

    On traînait aussi les pieds par rapport à ce que laisse supposer le titre de la pièce « 4 :48 Psychose » de Sarah Kane. Cette jeune Anglaise s’est suicidée à 28 ans juste avant de passer le millénaire. Elle a laissé 5 textes violents, apocalyptiques, et violemment empreints de sa propre dépression.

    Et le miracle se produit, le spectacle mis en scène par Nalini Menamkat n’évacue pas du tout la noirceur du texte, mais le fait sous une forme ramassée, dense, d’une poétique brute et économe de théâtralisation spécieuse.

    Dans la mosaïque des propos parfois hallucinés que tient le personnage joué magnifiquement par Jean-François Michelet, il y a des lumières noires et sombres qui éclairent et touchent au plus près le spectateur, aidé par un très beau travail d’accompagnement tant à la bande son qu’au pupitre d’éclairage. Donc Michelet, grand flandrin un peu désarticulé, remarquable de puissance évocatrice, excellent comédien comme son compère freudien, l’habile Julien Schmutz, tous les deux en nuances, sans fausses notes, offrant ce qu’il y a de mieux au partage public : l’intelligence du jeu.

    Seule ombre au tableau à la Première : pas même un pot offert par les responsables de la Maison du Quartier ! Je sais, c’est mesquin, mais quoi : pour une fois qu’il y avait un peu de monde chez eux, ils auraient pu lancer la fête…

    …qui se poursuit dans leur salle jusqu’au 16 octobre. Infos sur www.cie-instant.ch.

  • LA HONTE EST LEVÉE

     

     

    par antonin moeri

     

     

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    Le docteur Krafft-Ebing évoque, dans «Psychopathia sexualis» (fin du XIX e), le cas d’une femme qui, ne pouvant trouver une pleine satisfaction dans les rapports sexuels avec son mari, exigeait que celui-ci fît l’amour devant elle à une servante. «Dès qu’elle voyait une fille qui l’excitait sexuellement, elle était irrémédiablement prise de l’idée qu’elle aimerait à voir cette fille dans le coït avec son mari». Pour réaliser son fantasme, il fallait que tous les trois fussent dans le même lit. Le cas de Mme X... est représentatif de ce qu’il est convenu d’appeler le voyeurisme et que Krafft-Ebing nommait mixoscopie. Classé par cet éminent professeur de psychiatrie dans la catégorie des perversions, le voyeurisme offre cependant une gamme de comportement qui ne relèvent pas forcément de la pathologie.

    Dans la nouvelle «De l’autre côté du palier», Carver met en scène deux personnages dont les agissements pourraient trahir un certain voyeurisme, même s’ils ne cherchent pas la satisfaction sexuelle en voyant d’autres se caresser. «Bill et Arlène Miller formaient un couple heureux, nous dit narquoisement le narrateur, mais ils avaient parfois l’impression d’être passés à côté de quelque chose». Le comptable et la secrétaire comparent leur vie «à celle de leurs voisins Harris et Jim Stone», qui dînent en ville, invitent des gens chez eux, entreprennent des voyages. Les Stone vont s’absenter pour dix jours. Ils demandent aux Miller de nourrir la minette et d’arroser les plantes pendant leur absence.

    Le premier soir, Bill se rend dans l’appartement voisin, donne la pâtée au chat. Dans la salle de bain, il inspecte le contenu de l’armoire à pharmacie. Dans la cuisine, il boit deux rasades de Chivas. De retour chez lui, il fait fougueusement l’amour à sa femme. Le lendemain soir, il va arroser les plantes du voisin. Après avoir examiné le contenu du frigo, il explore les armoires de la chambre à coucher. De retour chez lui, il fait énergiquement l’amour à sa femme. Le lendemain, il ne va pas au boulot. Il retourne chez les voisins, où il étudie avec soin tout ce qui lui tombe sous les yeux. Il va s’étendre sur le lit conjugal et glisse une main sous sa ceinture...

    Après quoi, il met une chemise hawaïenne et un short, boit un whisky. Puis, il enfile une petite culotte de dame, un soutien-gorge, un chemisier et une jupe. Le quatrième soir, c’est Arlène qui décide de nourrir le chat du voisin. Très vite, Bill se lève pour aller vers elle. «C’est moi, tu es encore là?» Elle sort et referme la porte. Il l’embrasse dans le cou. Elle a oublié de nourrir la minette. Elle lui confie qu’elle a trouvé dans un tiroir des photos d’un genre... Zut! elle a laissé la clé des voisins à l’intérieur. Ils se prennent dans les bras, restent cramponnés l’un à l’autre.

    Bill et Arlène jouissent HONTEUSEMENT de leur penchant («ils échangent des regards timides et des demi-sourires», «elle fuyait son regard»). Carver imagine ici un trouble du comportement observable autour de nous à des degrés divers. Mais ce trouble ne saurait constituer un délit. Il pourrait tout au plus signaler un malaise. Ou ce mal-être que pointe Melman dans «L’Homme sans gravité, Jouir à tout prix». Sauf que, dans la nouvelle économie psychique analysée par le psychiatre français, la honte est levée. La situation qu’il décrit n’est plus celle des années soixante-dix. Un progrès sensible a été fait dans ce domaine.

     

     

    R.Carver: Parlez-moi d’amour. Stock, 2003

    Charles Melman: L’Homme sans gravité, Folio, essais, 2005

     

  • Des nouvelles

    Par Alain Bagnoud

    51BVS8GBSQL._SL500_AA300_.jpgIl y a quelque chose dans le genre de la nouvelle qui me semble, je dois l’avouer, un peu suspect. Vieillot en tout cas. Lié au XIXème siècle, où cette forme a triomphé grâce aux journaux.

    Son format court permettait en effet aux écrivains de placer ainsi dans la presse, qui les payait grassement pour ça, des textes finis. C’est alors que se sont formés les deux sous-genres, fantastique et naturaliste, à quoi devait se rajouter quelques années plus tard la nouvelle policière.

    Les novélistes de notre époque - pas tous, évidemment - ont en général gardé du modèle canonique cette manière de viser à l’effet: un seul événement important advient, tout est concentré sur lui, ou, pire, sur une chute finale. Le texte est tourné vers cette unique démonstration, le reste devant y concourir.

    Du coup, je lis assez peu de nouvelles. Mes goûts ne m’y portent pas. Mais enfin, j’en ai reçu deux recueils, et la moindre des choses était d’y jeter un coup d’oeil.

    images?q=tbn:ANd9GcSjP2EOfxepW9ctBJr6OZgRVq8BDBO7VIh-X7HAb8GFRR3ZYNw&t=1&h=187&w=149&usg=__yO93GCoromKo5lPMYBPJuYmJOcI=Dans sa dédicace, Vincent Philippe annonce « des aquarelles sombres ou claires ». Le livre s’appelle Ne dure qu’un instant. Presque tous les textes y parlent du désir et de la difficulté de l’assouvir quand on vieillit.

    Dans l’un, c’est l’âge qui empêche le narrateur de séduire la jeune étudiante en médecine blonde, et ce qu’il fantasme ne se produit pas. Dans un autre, une femme couple ses chiens à ses amants, jusqu’à ce que, le temps ayant passé, elle se retrouve seule avec un carlin. Là un homme mûr rencontre vingt ans plus tard la jeune étudiante dont il était fou jadis. Ici, un grand-père radote sur le moment où il a joué un client de prostituée dans un film, lorsqu’il était figurant. Ailleurs, un homme mûrissant suit un beau voyou dans une exposition de Daumier... Un répertoire ordonné de frustrations, de regrets et de nostalgie, écrits avec une plume fine.

    Sylvie Blondel est plus sobre dans sa dédicace. Sur l’ensemble de la page blanche, il n’y a que son nom et l’initiale de son prénom. « S. Blondel ». Ni date, ni « cordialement », ni ces « à », ou ces « pour » que suit le nom du dédicataire, aucune de ces petites formules bien senties que les auteurs se piquent d’adresser aux critiques. On ne fait pas plus sobre. Dans la dédicace seulement: le reste est plus foisonnant.

    Le Fil de soie, parle de rencontres. Une Argentine fille de général a été torturée par les militaires, s’exile, tente de se suicider des années après, retourne au pays, et revit Blondel_Sylvie2.jpgquand sa mère lui avoue que son vrai père est en fait un autre homme. Ailleurs, un ancien petit ami est devenu un pantin militariste à cause de l’armée et finit par se jeter au bas des rochers. Une autre nouvelle est thématiquement construite autour du thème de la boucherie. Il y aussi une narratrice qui rencontre en Grèce un dernier de famille, immigré revenu au pays, puis une Allemande qui se plaint de tout et a peut-être tué son mari. La narratrice se demande si le Grec l’aime et s’interroge sur le destin. C’est de circonstance, puisqu’on est en Grèce...

    Sylvie Blondel est tentée par le roman, on le sent. Elle raconte des destinées plutôt que des épisodes, et s’intéresse aux moments charnières de l’existence. Il y a des promesses dans ses textes, et la possibilité d’affermir une technique littéraire qui, à mon avis, se cherche parfois un peu.

    Vincent Philippe, Ne dure qu’un instant, L’Aire

    Sylvie Blondel, Le Fil de soie, L’Aire

    Paru aussi dans Le blog d'Alain Bagnoud

  • Naissance d'un écrivain

     

    par antonin moeri

     

     

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    Les nouvelles écrites dans les années vingt ont imposé le journaliste Ernest Hemingway à l’attention des milieux littéraires. Je relis volontiers ces séquences courtes où la cadence des phrases, la valeur de l’implicite, le souci de la composition, l’efficacité et la concision des dialogues en imposent. C’est un jeune Américain désemparé que Hemingway met en scène dans «Un soldat chez lui». Un Américain épris d’authenticité, qui a vu la mort de près, que l’expérience de la première guerre mondiale a stupéfié, traumatisé. Un Américain qui rejette désormais les codes sociaux, les encombrements créés par celles et ceux qui prétendent vous envelopper d’amour.

    Harold Krebs a donc participé à des combats en France et en Allemagne. Il rentre chez lui, en Oklahoma en 1919. Comme les gens ne l’écoutent pas quand il veut parler de ce qu’il a vécu, il se met à mentir. Cette expérience du mensonge l’écoeure. Il se lève tard, lit des livres, joue au billard, étudie la clarinette. «Avant son départ pour la guerre, Krebs n’avait jamais été autorisé à conduire la voiture de la famille». Son père le lui interdisait. Harold aime regarder passer les jolies filles sur le trottoir d’en face. Il aimerait avoir une amie mais ne veut pas s’empêtrer dans les intrigues. Avec les Allemandes, on n’avait pas besoin de parler. «Tout était simple et on s’entendait bien».

    Un matin, sa mère entre dans sa chambre et s’assied sur son lit: «Tu pourrais prendre la voiture pour sortir le soir». Dans la salle à manger, Harold papote avec sa soeur qui le demande s’il ne pourrait pas être son flirt. Sa mère lui apporte des oeufs au bacon. «As-tu décidé ce que tu allais faire? - Non». Elle lui rappelle qu’il faut se rendre utile à la société. «Tous les métiers sont honorables. Tu n’aimes pas ta mère? - Non». Elle pleure. Il la prend dans ses bras. «Je ne voulais pas dire ça». Il lui embrasse les cheveux. «Veux-tu t’agenouiller et prier avec moi?» Il accepte de s’agenouiller, car il a pitié de sa mère. Comme il veut une vie sans histoire, il ira chercher du travail à Kansas City.

    Harold n’a que faire des consolations que la religion peut offrir. Il n’a que faire de l’amour maternel et des moiteurs familiales. Il n’a pas la force d’aller draguer comme font les gens de son âge. Et pourtant, il n’accepte pas la défaite, ne veut pas être vaincu. Il ira à Kansas City et y trouvera du travail pour faire plaisir à sa mère. A-t-on affaire à un être passif qui ne trouve plus aucun sens à sa vie et au monde qui l’entoure? Le lecteur peut se demander si Harold va retrouver l’énergie, le courage et la détermination des pionniers américains ou s’il va se laisser couler dans les eaux noires de la mélancolie et du ressentiment. Rien, dans le texte, n’indique la voie qu’il choisira: celle d’un humilié ou celle d’un winner? C’est par souci de justesse que l’auteur maintient une sorte de flou. Souci de justesse qui contribue à la réussite littéraire de cette nouvelle écrite en 1924.

     

     

    Ernest Hemingway: Nouvelles complètes. Quarto, 1999

  • Combat fratricide pour l'humanitaire

    PAR SERGE BIMPAGE

     

    De son vivant Moynier connut la gloire, avant d’être oublié par l’histoire. Dunant fut exilé et oublié toute sa vie, avant de recevoir le Nobel. Retour, côté jardin, sur l’épopée de la Croix-Rouge.

     

     

    Afin de commémorer le centenaire de la mort de Henry Dunant et de Gustave Moynier, deux petits livres viennent de paraître. Tous deux frappés du même enthousiasme et… du même embarras envers les fondateurs du CICR. Chacun de ces hommes est marqué d’un destin hors du commun. Même si l’histoire ne les a pas équitablement retenus (Dunant fut mondialement connu après avoir reçu le Nobel tandis que Moynier tombait dans l’oubli), leur trajectoire est aussi emblématique qu’exemplaire.

    De prime abord, rien ne les prédisposait à embrasser une carrière au service des autres. Encore moins à devenir les fondateurs de la plus importante institution humanitaire du monde. Soucieux de réussir là où son ascendance paternelle avait échoué, Dunant n’avait d’abord songé qu’aux affaires. Empruntant de l’argent à quelques nantis genevois, il avait monté une entreprise en Algérie. Or, comme il ne parvenait pas à obtenir les autorisations d’exploitation de la part des hauts fonctionnaires de la colonie française, il se décida d’aller les demander directement à Napoléon III… sur le champ de bataille contre les Autrichiens. La suite, on la connaît. Il ne rencontrera pas l’Empereur. Mais le spectacle des 40'000 agonisants précipita sa conversion. Son best-seller Solférino le transporta sur des ailes humanitaires.

    Moynier ? Lui aussi était fils de commerçant, sauf que son père, lui, avait réussi. Pas politiquement mais au moins financièrement. De sorte qu’après ses études de droit, le jeune Gustave n’avait aucunement besoin de gagner sa vie. C’est pourtant vers la philanthropie qu’il se tourna, devenant membre de la Société d’utilité publique pour en devenir président, rejoignant Dunant pour fonder la Croix-Rouge puis, initiant la fondation de l’Institut de droit international de Gand.

    Dans les deux cas, les trajectoires sont passionnantes. En particulier, elles montrent tout l’impact du milieu protestant, de son éthique, sur les deux personnages qui renoncent aux affaires au profit de l’altruisme. En conséquence, qu’est-ce qui, diable, peut entraîner autant d’embarras chez les biographes ? C’est pour commencer le mystère entourant les deux hommes quant à leur vie affective et privée. Cela ne tient pas seulement à la rareté des sources, mais bien à leurs personnalités. Tout se passe comme si elles s’étaient employées à ne rien laisser percer d’eux-mêmes, au point qu’il se trouve des historiens pour émettre l’hypothèse de l’homosexualité de Henry Dunant. Ensuite, la rivalité entre les deux hommes de caractère si opposé – et qui faillit faire capoter le projet Croix-Rouge – suscite le malaise aujourd’hui encore au sein de l’institution. Dunant, qui s’exila de Genève après avoir fondé la Croix-Rouge et essuyé une faillite retentissante, a-t-il été victime de son idéalisme et de son inconsistance, ou au contraire de la jalousie de Moynier qui mit tout en œuvre pour l’expulser ? L’ambition, enfin, mêlée d’ambivalence et de contradictions profondes chez les deux personnalités en regard de leurs prétentions humanitaires, laisse songeur. En se mettant au service de Léopold II, Moynier, sous couleur de « mission civilisatrice », cautionna et se fit même le propagandiste d’une entreprise coloniale d’une exploitation et d’une brutalité rares. Quant à Dunant, son désir de puissance, son besoin de reconnaissance qui le firent changer le modeste « i » de son prénom en « y » plus chic, cultiver les armoiries maternelles Colladon ou rédiger un livre à la gloire de Napoléon pour parvenir à ses fins, le conduisirent à une relation maladivement narcissique à l’œuvre humanitaire.

    Autant d’éléments qui contribuent à détruire les icônes et c’est tant mieux. Les plus grands hommes ne seront faits jamais que de chair et d’os. Une belle leçon pédagogique, qui laisse ouverte une possibilité d’identification à la jeunesse ! Dunant, certes, a souffert toute sa vie (jusqu’à ce qu’un jeune journaliste le retrouve à l’hôpital de Heiden) de ce que le monde l’avait oublié. Moynier, de son côté, ne s’est jamais remis de ce que son rival reçût le prix Nobel tandis qu’il présida tant d’années aux destinées du CICR. Reste que l’Oeuvre est là. Image concrète, intangible, inamovible de ce qu’avec l’aide de Dieu, l’homme, au-delà de ses contradictions, est capable. C’est tout le mérite, dans ces deux petits livres, de nous montrer comment deux frères ennemis ont fait faire un grand pas à l’humanité. Rédigés par deux autorités en la matière : Roger Durand n’est autre que le fondateur et président de la Société Henry Dunant et François Bugnion fut directeur du Droit international et de la coopération au CICR.

     

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    Une exposition à ne pas manquer

    « Henry Dunant + Gustave Moynier : un combat ». Au Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Jusqu’au 23 janvier 2011.

     

    Deux ouvrages de référence d’auteurs genevois parus depuis 2000

    Henry Dunant, La croix d’un homme. Par Corinne Chaponnière, éditions Perrin.

    Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde. Par Serge Bimpage. Editions Albin Michel. Prix 2003 de la Société littéraire de Genève.

  • Pierre-André Milhit, L’inventaire des lunes


    Par Alain Bagnoud

     

    inventaire_des_lunes_120x170.gifNotre ami Pascal Rebetez, orpailleur poétique, est tombé sur une pépite. Un recueil arrivé aux Editions d’Autre part, qu’il dirige.

    Editer est une longue patience, on le sait. Il faut avoir le goût de la prospection. Mais la récompense existe: « Parmi cent et un manuscrits, écrit Rebetez, tout à coup il y en a un qui nous frappe par sa justesse, sa musicalité, son âpreté aussi. » C’est celui de Pierre-André Milhit, 56 ans, né à Saxon.

    Ce qu’on sait de lui: il a fait toutes sortes de métiers. Chauffeur-livreur, employé de pompres funèbres, garçon de café, père au foyer. Désormais assistant social. Et héritier de Maurice Chappaz, dont on retrouve parfois quelques accents dans L’inventaire des lunes, même si Milhit a sa propre langue, une démarche personnelle et une forme originale.

    C’est le premier recueil à compte d’éditeur de Milhit, mais pas sa première expérience d’écriture. On ne nait pas ainsi tout fait à 56 ans. Il a été chroniqueur et billettiste dans des médias valaisans: Rhône FM, le Peuple Valaisan, le Nouvelliste. On peut trouver ses textes poétiques sur son blog ou dans deux volumes à compte d'auteur (Fringale en 1984 et Rien qu'un peu de morve en 1995).

    C’était avant L’inventaire des lunes, un recueil parfaitement structuré, d’une grande cohérence, fort, contrasté, et captivant.

    Le livre est partagé en 13 parties, autant que de lunes en 2009. Cette année-là a en effet comme caractéristique d’avoir deux pleines lunes dans le mois de décembre, le 2 et le 31. (Les autres, qui donnent leur datation à chacun des textes de Milhit ont eu lieu le 11 janvier, le 9 février, le 11 mars, le 9 avril, le 9 mai, le 7 juin, le 7 juillet, le 6 août , le 4 septembre, le 4 octobre, le  2 novembre.)


    !cid_F15068B5B76B4600AC39E02AFFADF1AB%40pcpierre.jpgChacune des parties définies par Milhi
    t convoque un environnement saisonnier ou culturel autour d’une de ces dates. Cette composition permet au recueil d’éviter le statisme, d’avancer vers sa conclusion en suivant des fils rouges, dans une suite de chapitres qui se répondent et se poussent.

    Rythmés par des anaphores, les poèmes évoquent la nature, les confins des villes, la montagne, la plaine. On y retrouve un narrateur dans la nuit, qui consigne visions, scènes et images, des personnages de passage, un fou, un sage, quelques renardes et renards, d’autres animaux...

    Le résultat est varié, évocateur, placé entre la verticalité du souvenir et l’horizontalité du contemporain. Plein de surprises, d’éclats de vie, d’images fortes et de jeux d’échos. Un beau recueil, tendre et vigoureux.

     

    Pierre-André Milhit, L’inventaire des lunes, poèmes, Editions d’Autre Part

    Publié aussi dans Le blog d'Alain Bagnoud

  • La musique secrète de Catherine Fuchs

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    par Jean.Michel Olivier

    Hautboïste virtuose, férue d'histoire genevoise et enseignante de français et de musique au Collège de Saussure, Catherine Fuchs (née à Genève en 1957) parvient à marier ses passions avec succès. Après deux romans et trois recueils de poésie (parus chez Éliane Vernay et Empreintes), elle nous donne aujourd’hui La Beauté du geste*, une vaste fresque polyphonique, subtilement orchestrée, qui fait entendre cinq voix de femmes, au seuil de la quarantaine, dont les destins se croisent, à l’occasion d’un concert où toutes les passions s’exacerbent. Elle s’en explique ici. Entretien.

     

    Vous avez publié deux romans et trois livres de poésie. Quelle différence faites-vous entre écriture narrative et écriture poétique ?

    — Pour moi, il n'y a pas vraiment de différence entre écriture narrative et écriture poétique. Il s'agit avant tout d'une question de forme, de cadre. Le poème est plus ramassé, plus concentré, certes, mais la démarche est la même : trouver les mots qui résonnent, qui correspondent au mieux avec l'envie de dire... En plus, mon dernier roman est construit par petites séquences et j'ai conçu plusieurs d'entre elles comme des textes poétiques. Seuls les dialogues supposent un type d'écriture bien spécifique.

     

    Plusieurs de vos livres ressuscitent des époques passées. La Beauté du geste se passe de nos jours. Pourquoi ce saut ?

    — Je suis a priori toujours passionnée par l'histoire, et je n'exclus pas d'y retourner, mais j'avais envie, cette fois.ci, de parler au présent et de mettre moins de distance entre mes personnages et moi-même.

     

    Votre roman est polyphonique. Cinq voix de femmes s'entremêlent et se répondent. D'où vous est venue cette idée ?

    Je ne me souviens plus exactement ! Il faut dire que j'ai commencé ce livre en 1998... Donc entre les ré-écritures, les corrections, les doutes divers et variés, du temps a passé ! Mais je sais que j'avais envie de parler des femmes d'aujourd'hui (de mon milieu, évidemment, je n'ai pas essayé de me glisser dans la peau d'une ouvrière ou d'une immigrée clandestine) et ces différents personnages se sont sans doute assez vite imposés à moi. C'était aussi une manière de me diviser en cinq, de ne pas concentrer tout ce qui m'appartient dans une seule femme.

     

    La musique est le vrai centre du livre. Quelle place occupe-t-elle dans votre vie ? Est-ce la première fois que vous en parlez dans vos livres ?

    — Non, j'ai déjà évoqué la musique ou certains compositeurs dans plusieurs poèmes et dans mon roman précédent, En mal d'innocence**, le personnage principal est pianiste et compositeur. Toutefois, c'est effectivement la première fois que je donne à la musique cette place centrale. Il faut dire que je suis musicienne moi-même (j'ai fait des études de hautbois et j'ai joué comme professionnelle pendant de nombreuses années, et continue à la faire occasionnellement) et je m'étais toujours dit que je tenterais un jour de parler de la musique, de dire tout ce qu'elle m'a apporté. « Sans la musique, la vie serait une erreur » a écrit Baudelaire. Je partage cette opinion, je crois que de tous les arts, c'est celui qui me nourrit le plus immédiatement, physiquement. Bien sûr, il y a la peinture, la littérature, le cinéma, etc. mais la musique a quelque chose d'unique, lié aux sons et à leurs propriétés. Pour moi, elle nous met en rapport avec l'indicible. Précisément ce que les mots ont parfois peine à... dire ! Et ce n'est sans doute pas un hasard si la musique est si souvent utilisée par toutes les religions ou spiritualités. Si j'ai choisi la Messe en si, c'est aussi pour rendre hommage à Bach et à sa formidable capacité d'illustrer  musicalement sa foi en Dieu ; sa musique témoigne, elle chante mieux qu'aucune autre un espoir fou, celui que notre vie a un sens qui nous dépasse.

     

    Tous les personnages du livre ont quarante ans et sont en quête de sens ? Est-ce  la fameuse crise de la quarantaine ?!

    — Oui, on peut dire cela comme ça (d'ailleurs Isabelle évoque cette crise, même si elle en sourit), même si je pense que les crises n'attendent pas les chiffres ronds pour s'annoncer. Mais si tout va bien., ça ne fait pas un roman, n'est-ce pas ? Il est tjs plus intéressant de montrer des personnages en train de se remettre en question, de douter, de chercher.

     

    Les hommes, dans votre livre, sont souvent des ombres qui passent. Comme ce chef d'orchestre qui fascine par ses gestes et son mystère ?

    — Effectivement, les hommes ne sont vus qu'à travers les personnages féminins dans ce roman. C'est un choix, car un des sujets du livre, ce sont précisément les rapports hommes-femmes et je trouvais plus juste, plus honnête, d'en parler du côté que je connais, que je maîtrise, à savoir celui des femmes ! Voilà pourquoi on ne suit aucun homme en focalisation interne. Cela dit, les personnages masculins jouent un rôle immense dans cette histoire. Ils sont sans cesse présents dans les pensées des héroïnes. Le chef, Gianni Orsini, symbolise le séducteur, celui qui s'impose dans une vie, qui la bouleverse de fond en comble.

     

    — Les musiciennes sont-elles toujours fascinées par le chef d’orchestre ?!

    — Il est clair qu'un chef d'orchestre, de par sa position de pouvoir, exerce un attrait sur ceux — et surtout celles — qui dépendent de son autorité (on connaît bien le principe !), et ce d'autant plus s'il est compétent et qu'à ses qualités propres s'ajoute le charme de la musique. C'est un mélange explosif ! Mais au-delà de ça, je voulais symboliser par ce personnage essentiellement absent l'importance des manques qui nous construisent et nous font avancer. Chacun cherche, plus ou moins assidûment, avec plus ou moins d'intensité suivant les moments de sa vie, mais personne (du moins me semble-t-il) ne peut se prétendre complet, abouti. Les jeux de séduction tournent souvent là autour et si l'on s'y précipite avec tant d'ardeur parfois, c'est souvent parce qu'on espère y trouver une forme de réponse. Mais cette réponse, souvent, fuit encore plus loin. C'est ce que vont vivre plusieurs de mes héroïnes dans le roman. Heureusement, peut-être, car la quête se poursuit....

     


    * Catherine Fuchs, La Beauté du geste, roman, Bernard Campiche, 2010.

    ** Catherine Fuchs, En mal d’innocence, roman, éditions Slatkine, 2002

  • Tam-tam d'Éden

     

     

     

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    Les NOUVELLES d'Antonin Moeri paraissent ces prochains jours aux Editions BERNARD CAMPICHE.

     

    Dessins d'ERIC MOINAT sur la couverture

     

    Le livre peut être commandé directement chez l'éditeur, à l'adresse suivante:

     

    info@campiche.ch

     

  • Le Moyenâgeux

    Par Pierre Béguin

    C’était au tournant des années 70 / 80.

    C’étaient les premières lézardes sérieuses du modèle littéraire dominant dans les années 60, celui du nouveau roman et du structuralisme. Une littérature essentiellement formaliste, autoréférentielle, dont le modèle linguistique postule une césure nette entre le signe et le référent. Une littérature intransitive – selon la formule de Roland Barthes, – qui évacue le sujet, ou qui le désigne en négatif, et qui n’a d’autre objet qu’elle-même. Les écrivains sont alors convaincus que la littérature est impropre à faire advenir le réel, qu’elle ne peut se développer que dans le monde du verbe, qu’elle ne peut parler que d’elle-même, définitivement mallarméenne…

    C’était l’époque où, à la faculté des Lettres, un groupe autoproclamé – apôtres fanatisés des gourous Derrida et Lacan, dont ils ne saisissaient par ailleurs pas toujours clairement la Parole – exerçait un terrorisme intellectuel sur les nouveaux étudiants peu aguerris au modèle autoréférentiel (n’est-ce pas Jean-Michel?). Auto satisfaction élitiste. Monde du happy few. Few certainement, happy pas vraiment. A force d’expérimentation, on atteint vite les limites de l’intelligibilité. Incompréhension. Impasse. Perte de lectorat.

    Guerre froide, fin des trente glorieuses, conséquences de mai 68 – et peut-être aussi le tremblement produit par les livres de Soljenitsyne, plus particulièrement L’Archipel du Goulag –, au début des années 80 la rupture est consommée: c’est le grand retour du sujet, comme il se doit par ceux-là même qui l’avait exclu. Marguerite Duras (L’Amant), Claude Simon (L’Acacia), Alain Robbe-Grillet lui-même (Le Miroir qui revient), Nathalie Sarraute (Enfance) réhabilitent le «je» dans la foulée de Leiris (La Règle du jeu) ou de Perec (W ou le souvenir d’enfance). Retour du sujet et, donc retour du réel, de l’histoire, voire de l’Histoire. Les écrivains se persuadent alors qu’il faudrait (re)commencer à dire quelque chose du monde.

    Mais si la littérature transitive revient au goût du jour, elle n’en reviendra pas pour autant aux anciennes formes critiquées et déconstruites par les formalistes. Le retour du «je» prend vite la forme de l’autofiction sous l’influence de Doubrovsky (Fils) et de Sollers (Femmes). Quant à l’objet, les traumatismes de la fin du XXe siècle (remise en cause de l’humanisme, des Lumières, du progrès; crises économique, politique, morale) le relèguent au lieu de l’interrogation, du désarroi, de l’égarement. On ne croit plus aux grands modèles mais on ne trouve aucun modèle de substitution. La littérature contemporaine ne sait plus où elle va, elle ne dit plus ce qu’elle doit être (contrairement au surréalisme ou au nouveau roman qui affirmaient (trop) péremptoirement ce que la littérature devait être). En ce sens, elle ne produit plus de manifestes, de théories. Et si elle s’interroge, c’est sur un présent qu’elle ne comprend pas.

    Cela s’appelle le post modernisme. Une appellation pas vraiment contrôlée et bien représentative d’une époque sans réelles valeurs ni convictions humaines, qui n’a plus de passé, qui n’est plus tendue vers l’avenir, en manque patent de transmission. Le post modernisme, ça vous a des sonorités de fin de partie. Que pourrait-il bien transmettre? Que pourrait-on trouver après l’après? Le néo passéisme?

    Alors, comme dit le poète, «pardonnez-moi, Princes, si je suis foutrement moyenâgeux!» et si mes références littéraires puisent plus souvent dans le passé que dans le présent. Ce billet d’ailleurs pourrait bien rester une exception…

  • Houellebecq, La carte et le territoire

    Michel HouellebecqPar Alain Bagnoud

     

    Faut-il lire le dernier Houellebecq?

    La question est mal posée. Il faudrait plutôt se demander s’il est possible de ne pas le lire.

    Comment en effet faire bonne figure sinon, puisque dans tous les milieux qui se piquent peu ou prou de littérature, c’est le sujet imposé. De toute façon, en plus des arguments mondains, il faut bien reconnaître que finalement, cet auteur définit de ce qu’est la littérature actuelle en France. Sa position en fait une sorte de borne par rapport à laquelle on se situe. Pour, contre, au-delà, en deçà...

    Bref, il s’agit de son dernier roman, La carte et le territoire, Goncourt annoncé. Les jurés du prix peuvent faire un dernier caprice, c’est peu probable. La possibilité d'une île, le dernier opus de notre auteur, a échoué d’un poil à cause des manoeuvres éditoriales de Flammarion. Mais on a tant reproché leur choix aux jurés que Houellebecq devrait l’avoir, ne serait-ce que comme prix de consolation.

    Prix de consolation, je signe. Parce que, à mon avis, il y avait un temps où les romans de Houellebeq portaient mieux. Nous étions un peu plus surpris, peut-être. Le texte était plus saignant, sans doute. Les féministes et les islamistes en prenaient plein les dents, il y avait des créatures superbes et légères, ça baisait pas mal.

    Carte MichelinDésormais, notre auteur ne s’intéresse plus qu’à une chose: savoir comment mourir. Que ceux qui ont salivé sur les scènes de sexe de Plateforme se le tiennent pour dit: on est plutôt, ici, dans le crématoire que dans la boîte à partouze.

    Résumé: Jed Martin est un artiste contemporain qui devient renommé en presque un clin d’oeil. Une exposition sur un travail photographique à partir des cartes routières Michelin le fait rencontrer un galeriste. Une autre expo sur une série de « métiers », des tableaux qui représentent des travailleurs, le rend mondialement célèbre. Ses tableaux atteignent immédiatement 500’000 euros. Peu plausible, mais enfin, Houellebecq ne fait que parler en filigrane de son succès à lui, et de ce que c’est: pas grand chose, semble-t-il dire. Une montagne d’argent et de la solitude.

    Jed peint donc l’écrivain Michel Houellebecq. Il noue presque une relation d’amitié avec le dépressif qui vit isolé en Irlande. Puis l’auteur Houellebecq revient en France, où il est sauvagement assassiné. C’est dans quelques années d’ici, au milieu des années 2010: le roman joue sur une légère anticipation.

    Une enquête policière commence alors, aux deux-tiers du livre: qui a tué Michel Houellebecq et pourquoi? La réponse est décevante et le côté polar mal ficelé. Peu importe. L’intérêt du livre est ailleurs.

    Jeff Koons, RabbitEvidemment, si elle coule facilement, sa langue ne fera pas précisément frissonner les amateurs de belle littérature. Houellebecq est l’exact contraire de Pierre Michon par exemple, qui vise à assembler dans son texte une suite de beaux morceaux d’écriture. Dans La carte et le territoire, la critique est « unanime dans la louange », le personnage « consacra sa vie à l’art », le galeriste « réagit avec enthousiasme », etc.

    Ceci ne surprendra pas ses anciens lecteurs. Les description de sexe de Plateforme, pour y revenir, rappelaient très fort celles de ces Témoignages vécus et généralement fantasmés qui paraissaient dans les années 80 et 90 en petits fascicules cochons.

    Mais notre auteur dépressif et hilarant parvient assez bien à nous faire oublier ces clichés qui lui servent de fond, comme Stendhal par exemple parvient à nous fait oublier ses répétitions. Ce qui fait fonctionner le texte est tout un dispositif de mise en scène et de distance: humour, auto-dérision, mise en abîme...

    Et puisqu’on tient Stendhal: si le roman est, comme il le disait, un miroir qu’on promène le long d’un chemin, La carte et le territoire réussit son coup. Comme d’habitude, Houellebecq est à l’affût de toute manifestation de modernité. C’est son côté ethnologue. Il recense les transformations actuelles et ne rate pas une marque à la mode. Il insère dans son livre des gens réels, un name dropping qui comprend Jeff Koons, Damien HJean-Pierre Pernautirst, François Pinault pour l’art, Bill Gates et Steve Jobs pour l’informatique, Jean-Pierre Pernaut en gourou de l’authentique, Pierre Bellemare, Patrick Le Lay, Michel Drucker, Julien Lepers, Alain Gilot-Pétré, Claire Chazal pour les médias, son ami Frédéric Beigbeder pour la littérature...

    Bien sûr, il rate son analyse de l’art contemporain, de son rôle et de ses ambitions. Mais son regard aiguisé saisit le retour au terroir, les liens de l’art et du marché, ou s’intéresse à un phénomène tendance: Dignitas et son aide au suicide (que notre auteur accuse en passant d’être une entreprise surtout vénale).

    Jed en effet se retrouve à Zurich dans les locaux de la société, pour y avoir des nouvelles de son père qui a eu recours aux services de l’entreprise. Et cette visite à la Suisse est l’occasion d’un repas: « une raclette à la viande des Grisons et au jambon de montagne, qu’il accompagna d’un excellent vin rouge du Valais. »

    Une raclette? Un excellent vin rouge du Valais? En lisant ces mots, mon chauvinisme n’a fait qu’un tour. L’esprit de clocher m’a envahi. C’était décidé: tout compte fait, on ne compterait pas sur moi pour dire du mal de ce roman!


    Michel Houellebecq, La carte et le territoire, Flammarion

    Publié aussi dans Le blog d'Alain Bagnoud