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Lettre ouverte au MCG

Par Alain Jacquemoud

Le MCG a naguère lancé l’idée de la préférence cantonale. Il a eu raison. Que vaudrait la politique d’engagement des entreprises, de l’administration, etc. si elles donnaient systématiquement la préférence à des collaborateurs en provenance de l’extérieur du canton, du pays ? Il a posé la question du développement de Genève, qui doit selon lui être étroitement pensé en fonction de l’exiguïté du territoire cantonal. Il a eu raison. A quoi conduirait un développement voulu pour lui-même, et qui n’intégrerait pas comme une absolue priorité la question de l’équilibre entre les zones construites et les zones réservées à l’agriculture, au vignoble, aux prairies extensives, aux rares marais encore présents, aux forêts, …

Mais avoir de (deux) bonnes idées ne signifie pas que l’on ne peut pas en avoir de mauvaises. Je prends comme indice fort d’un dérapage le titre d’un article paru dans le dernier numéro du journal de ce parti, courant novembre. Grosses lettres noires pour accuser les frontaliers de tous les maux. 

Rien de bien neuf sous le soleil, direz-vous. C’est vrai : chaque fois qu’il est question des frontaliers, le MCG y va de ce genre de refrain, qui claque bien davantage comme un coup de gueule idéologique que comme le fruit d’une réflexion raisonnée sur le monde du travail et de l’emploi à Genève. Mais voilà, c’est son mantra, sa chanson amère, son épine dans le pied, son joujou en forme de rouleau compresseur. A intervalles réguliers, un organisme officiel produit des chiffres relatifs au nombre de frontaliers dans le canton. Comme il est bien connu que les chiffres parlent d’eux-mêmes une langue immédiatement compréhensible par tous et qu’ils ne sauraient mentir, dans l’heure, le MCG dégoupille sa grenade rhétorique. Et boum ! L’affaire est réglée, ou plutôt devrait l’être rapidement si le monde obéissait aux critères mis en avant par ce parti.

Cela dit, chacun admet sans peine que l’arrivée quotidienne à Genève, le plus souvent en voiture privée, de dizaines de milliers de travailleurs en provenance de l’extérieur ne va pas sans poser de vrais problèmes de trafic. Ces problèmes, il conviendrait donc de leur trouver à court terme des solutions meilleures que celles qui existent. 
Reste le noyau dur de la question. Le nombre de personnes extérieures ne cesse d’augmenter depuis vingt ans. Pourquoi ? La vérité, c’est que dans des pans entiers de l’activité économique au sens large – PME qui travaillent dans la construction, l’hôtellerie /restauration, la santé – Genève dépend de la main d’œuvre extérieure. Une info récente et un chiffre : « Genève est dépendante de la France pour son système de santé. 57% de son personnel soignant possède un diplôme français. » (Journal de Léman bleu, jeudi 1er décembre 2022). Renvoyez ces travailleurs chez eux et ces secteurs seront proprement sinistrés. Bref, le MCG sert la vérité comme l’étoile polaire sert de guide aux aveugles. 

Il ressort de ce qui précède que le MCG a deux fois tort. Si l’on appliquait les mesures qu’il préconise, ce parti, qui se profile comme le seul véritablement au service des Genevois, les conduirait à une sorte d’enterrement de première classe. Et on s’étonne pour finir que des représentants haut placés et fort sensés de ce parti – on pense entre autres à un certain conseiller d’Etat –  n’interviennent pas pour que les rédacteurs du journal mettent un bémol gros comme le Salève à des propos aussi obstinément faux et trompeurs.

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