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  • Fête des pères

    Par Pierre Béguin

    «Inquiéter, tel est mon rôle», professait André Gide.

    Inquiéter, et non pas rassurer. Inquiéter, c’est-à-dire aller à rebrousse-poil de ce qui est donné comme des évidences, à contre-sens de la pensée dominante, à contre-pied des croyances officielles. Insister sur ce qui pourrait opposer l’auteur à ses lecteurs. Quitte à prendre des risques.

    Dans un contexte hyper formaté où écrire un livre mettant en scène un personnage féminin violé et violenté, de préférence par la figure paternelle, semble vous assurer la frénésie médiatique et le succès populaire – preuve en est: Netflix s’est résolument inscrit dans cette voie –, inverser les rôles de l’agresseur et de l’agressé relève de la croisade inconsidérée. Plus la pensée est manichéenne, plus elle est confortable. Et personne n’aime à être bouter hors de son confort, à plus forte raison celui que procurent paresseusement opinions ou croyances figées.

    C’est pourtant le risque que prend Jean-Michel Olivier dans son dernier roman. Le titre tout d’abord: Fête des pères ne s’entend pas comme la commémoration annuelle des géniteurs mais, dans son sens contraire, comme l’expression des mauvais traitements qui leur sont réservés et que l’air du temps, qui ne souffle résolument que dans un sens, s’évertue à chasser de notre entendement. Une grande majorité d’hommes ayant subi les affres du divorce pourraient en témoigner, si tant est qu’on leur donne la parole. Sauf qu’on la leur donne rarement.

    C’est précisément l’objectif que s’est fixé Jean-Michel Olivier dans son dernier roman qui vient de paraître aux éditions de l’Aire et Serge Safran: mettre en scène ces pères à temps partiel, ces pères du dimanche qu’on reconnaît au premier coup d’œil autour des bacs à sable «pas rasés, vêtus sans élégance, mal dans leur peau», «condamner à aller de l’avant sans jamais regarder en arrière, comme Orphée remontant des enfers», et s’en faire l’avocat puisque personne, ou presque, ne s’en préoccupe.

    Plaidoirie contre plaidoirie? Peut-être. Mais l’auteur a la sagacité de souligner des évidences qu’on a longtemps voulu ignorer. Et d’abord que la balance du divorce, depuis des décennies, penche manifestement en faveur des femmes auxquelles fut attribué le rôle avantageux d’éternelles victimes, avec la panoplie de dédommagements consubstantiels à ce statut, aux dépens des hommes, éternels coupables devant le juge. «Ou plutôt la juge, puisque dans ces affaires de séparation, 90 % des juges sont des femmes. Autant dire que l’affaire est réglée avant même d’avoir été traitée...».

    Et si d’aventure le pauvre type «ne sait pas résister à une paire de nichons», les coups de foudre deviennent très vite des coups de fusil qui le laissent exsangue à la fin du mois avec son plat de pâtes pour unique compagnie, «condamné, après deux divorces et trois pensions alimentaires, à travailler comme une mule pour faire tourner le manège» et, parfois, à ne voir sa progéniture qu’un week-end sur deux «quand Madame est d’accord».

    Quant aux femmes de cette fête des pères, à commencer par l’héroïne – Leslie, une journaliste américaine démocrate et féministe –, elles ressemblent davantage à des Gorgones qu’à des victimes. Telle cette Mathilde, flexitarienne avant de se convertir au véganisme, que le héros a croisé à la piscine et qui nous vaut un savoureux portrait: «Mathilde écrit des livres pour enfants et des romans pour adultes. Ce sont souvent les mêmes. Des livres bourrés de bons sentiments, toujours en phase avec l’actualité. Des livres dopés à la moraline. C’est une femme de son temps. Son rêve serait de réécrire ces affreux contes de fée – sexistes, machistes – de notre enfance afin qu’ils ne choquent plus les oreilles innocentes. Elle aurait pu avoir une vie heureuse et insouciante, mais elle a choisi d’être une victime (…) Les victimes ont besoin d’un bourreau. Elle se vengera de moi dans un roman où je serai un fils de pute, un prédateur affreux, un acteur sur le retour à la queue flasque».

    Des Gorgones qui entendent aussi modeler l’homme nouveau (qui doit rester un homme, certes, mais pas trop: «ni macho, ni trop blanc, ni trop mâle, ni trop libre»), à l’image de Russ, le nouvel amant de Leslie, véritable fée du logis: «Il cuisine, il fait briller les casseroles, il met la table, il passe l’aspirateur, il ravaude, il répare, il tricote, il raccommode, il sait tout faire. Elle a trouvé la perle rare, enfin».

    Des Gorgones dont l’objectif ultime, inavoué ou inavouable, est de supprimer ce scandale, cette aberration qu’est le père: «Depuis toujours, peut-être inconsciemment, Leslie rêvait d’un monde sans père. Il est en train d’advenir. Ce sera un monde pacifié, sans guerre ni violence d’aucune sorte. Un monde enfin purgé de ses excès. Sans prédateurs. Sans agresseurs. Sans tueurs. Sans violeurs. Un monde entièrement dévolu au culte du Bien. Tout ce qui, autrefois, était obscène ou inapproprié aura disparu. Et nous vivrons dans l’hallucination – la perte du réel».

    Mais avant d’être un manifeste, Fête des pères est d’abord un roman qui raconte l’histoire de Damien Maistre, acteur sur le déclin, qui essaie de surnager face à ses déboires sentimentaux et professionnels, et surtout face à son ex femme Leslie, qui menace de retourner vivre aux États-Unis avec son nouvel amant Russ, en emmenant leur enfant, qu’elle considère comme le sien. L’habilité de Jean-Michel Olivier est de se placer aux antipodes du modèle manichéen qu’il dénonce: si Leslie est loin de l’archétype victimaire, Damien concentre la plupart des défauts communément attribués aux hommes. Car le monde où se déroule cette fête des pères possède des accents – l’emphase romantique en moins – de celui qu’en dresse Musset dans On ne badine pas avec l'amour: «Le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus infâmes rampent et se tordent sur des montagnes de fange». Mais s’il reste une chose sublime (pour plagier notre grand romantique), c’est l’amour de ces êtres pour leurs enfants. Et Damien n’en manque pas pour le sien: «L’enfant appelle au milieu de la nuit. Et l’on se précipite dans sa chambre. En général, c’est moi – depuis sa naissance, je ne dors que d’un œil. Je le prends dans mes bras, je fredonne une chanson, je passe ma main dans ses cheveux si doux. Je pose un baiser sur ses joues baignées de larmes».

    Comme tous ces pères du dimanche qui tentent de survivre dans le marasme du divorce et des pensions alimentaires, Damien Maistre aime son enfant, profondément, sincèrement, et sûrement de manière moins possessive et égoïste que sa femme Leslie. C’est là sa rédemption et sa raison d’être. Alors, quand Leslie menace de l’en priver en emmenant l’enfant dans ses bagages à Chicago comme s’il était sa propriété, Damien pète un plomb.

    La suite se transforme en une sorte de road movie à la Thelma et Louise, version moderne de la chasse à courre. Sauf que là – O tempora o mores! – les gibiers ne sont pas deux femmes victimes d’avoir logiquement répondu à l'horrible agression machiste, mais un homme et son enfant victimes des prérogatives féminines, dont la violence, plus psychologique que physique, n'a rien à envier en répugnance à celle qu'elles entendent dénoncer. Et l’issue de cette randonnée mortelle n’a pas comme décor la majesté du Grand Canyon d’Arizona, mais la modestie d’une ferme perdue sur la côte irlandaise.

    Jusqu’au bout, Jean-Michel Olivier aura retourné la doxa comme un gant. Avec habilité et un sens certain de la caricature.

     

    Fête des pères, Jean-Michel Olivier, éditions de l’Aire – Serge Safran, 2022.

     

  • La correspondance Georges Poulet - Jean-Pierre Richard

    Par Frédéric Wandelère

     

    De Montesquieu à Balzac les romans par lettres ne manquent pas : Les Liaisons dangereuses en sont un redoutable exemple. Ce qui en fait le fond et le cadre change avec l’époque, la société et le milieu concernés. Jusqu’à présent, la violence symbolique qui caractérise le milieu universitaire, n’a pas encore fait l’objet de ce genre de roman. Toutefois, imaginant le personnage de Brichot, Marcel Proust approchait ce monde avec l’humour insinuant qui le caractérisait. De son côté Philip Roth, dans La Tache (parue en 2000), nous avait introduit dans l’univers sanglant des universités américaines au commencement des ravages de l’idéologie woke et de la cancel culture, la culture de l’annulation, ravages qui touchent désormais la France et l’Europe. Reste qu’aucun romancier, à ma connaissance, aucun historien de la littérature et de la critique universitaire, ne nous a encore plongés dans la réalité des luttes d’influence, des affrontements idéologiques, méthodologiques et intellectuels dont les universités européennes et américaines ont été le théâtre dans la seconde moitié du XXe siècle, avant même le vandalisme woke. C’est dans ce monde que nous pénétrons avec la publication de la correspondance personnelle de deux critiques parmi les plus éminents de l’époque, Georges Poulet et Jean-Pierre Richard, proches intellectuellement et amicalement de Marcel Raymond, de Jean Rousset et de Jean Starobinski – que l’on réunit à bon droit sous la bannière de l’École de Genève.

    Outre l’intérêt qu’offrent ces échanges indispensables à la connaissance de ce qui est au fondement de la critique littéraire, le lecteur entrera véritablement dans un roman aux multiples personnages, critiques, poètes et professeurs, tous bien connus par leurs œuvres publiées, mais inconnus ou peu connus comme personnes – influentes et agissantes ! Et voici leurs deux faces réunies, croquées par deux auteurs mordants, inventifs et inspirés. Tous les personnages circulant dans ce roman de la critique, aujourd’hui, sont morts mais ils restent étrangement vivants par les portraits qu’en font tant Jean-Pierre Richard que Georges Poulet. On croisera de vieux pontifes, esquissés d’un crayon sûr : Georges Blin « féroce les jours de soutenance », Pierre-Henri Simon « un peu borné, mais bien intentionné », Albert Béguin, « espèce de sacristain onctueux », « Eugène Vinaver, si instable, si peu équilibré », Jean Grenier « gentil mou, sans grande ressource intérieure », Raymond Lebègue propageant « à l’entour de lui un incroyable climat de bassesse », Hugo Friedrich « archi sympathique. Pathétique aussi, sorte de Siegfried amputé, se trainant ignoblement sur ses pattes ». On verra passer en silhouettes quelques illustres gloires, Leo Spitzer, Arthur Lovejoy (que Jean Starobinski citait si fréquemment en cours et dans ses séminaires), Gaston Bachelard qui paraît à Georges Poulet « le plus grand bonhomme de notre temps ». Il est plaisant de voir apparaître dans leur costume de jeunes prometteurs, en 1954, Roland Barthes, « garçon délicieux » ; et vers 1963 Gérard Genette, dont Jean-Pierre Richard distingue « l’intelligence et l’envergure » en même temps que « son horreur du ‘vécu’, sa passion des structures immobiles, et pour tout dire, le caractère encore assez néophyte et fanatique de son structuralisme ». C’était bien vu ! – Figures I, ne paraîtra qu’en 1966.

    Il arrive fréquemment que par touches successives le croquis se développe efficacement en portrait, que les personnages entrent en mouvement, agissent, les uns positivement ( Marcel Raymond, Jean Starobinski ), certains de façon plus ambigüe (Gaëtan Picon, Marie-Jeanne Durry, Jean Pommier ) et d’autres en toute malfaisance.

    La pièce centrale, le morceau d’anthologie c’est la préparation et la marche vers la thèse consacrée à Mallarmé de Jean-Pierre Richard, puis le récit de la soutenance en Sorbonne en mai 1962. En 1954 Richard avait déjà publié Littérature et sensation, suivi, en 1955, de Poésie et profondeur, qu’on peut considérer aujourd’hui comme deux classiques de la critique littéraire ; mais ce n’étaient pas des thèses ! et donc l’enseignement universitaire lui était encore fermé. L’idée, voire la nécessité d’une thèse sur Mallarmé germe en 1955. En 1958 elle est quasiment rédigée. Il faudra encore quatre années de manœuvres, d’intrigues et de péripéties dignes de Balzac pour atteindre à la soutenance, dont Richard fait une description hilarante en mai 1962 (pages 198 à 202). Selon Poulet « faire acte de présence à une soutenance c’est » assister en une même séance « à un dîner de première communion » et à une opération « des amygdales », j’ajouterais : sans anesthésie ! (Le pavé de 650 pages, L’Univers imaginaire de Mallarmé, paraitra, comme c’était alors la coutume, en 1961, avant la soutenance.)

    Dans tout roman de quelque ampleur deux univers au moins sont en contact. Après ou parallèlement à l’aquarium universitaire où nos deux auteurs nous plongent en compagnie des gros et petits poissons de la critique professorale, parmi les courants, les chaud-froid et les remous qui mènent à la soutenance, nous passons dans l’univers également contrasté des poètes, dont Jean-Pierre Richard est, comme on le sait, l’un des plus illustres et plus fins commentateurs. Les portraits et croquis, de Mallarmé à Bonnefoy, synthétisent habilement les œuvres et le caractère de certains poètes. Ici également Richard décoche quelques plaisantes flèches, toutes acérées en pointe du mot « sorte » : « Du Bouchet, sorte de Reverdy aveuglé, asphyxié et éclaté » ; « Jacques Dupin « sorte de cousin spirituel de Du Bouchet », Ponge « sorte de tissus éponge post mallarméen et paulhanisé ». Georges Poulet n’est pas en reste : Guillevic lui a « toujours fait songer à ce fromage trop sec qui vous reste dans la gorge ». Tout n’est pas que flèche, d’ailleurs ; par exemple Richard, voit en Bonnefoy ( « bête noire » de Char ) une « personnalité séduisante, d’un attrait quasi-magique et très poétique » ; il juge qu’il « sort tout armé de Jouve mais transpose dans le sensible la poursuite que celui-ci menait dans le théologique ou le charnel ». J’approuve !

    Si la soutenance était le grand moment universitaire de cette correspondance, l’affaire Char, lui fait un pendant anecdotique du côté de la poésie. Après la publication de Poésie et profondeur, en 1955, Richard, assez moqueur, note la réaction d’un Char « laconique, prophétique et sacramentel ». Un peu plus tard, suite à la publication d’un article sur le poète de l’Isle-sur-la-Sorgue, Richard constate qu’il est « très difficile, susceptible, soucieux au maximum de lui-même et de sa gloire », propos qu’il amplifie plus tard : il est « fou, simplement, littéralement fou : un sens maladif de lui-même, de son œuvre, un besoin d’adoration, une méfiance même de toute interprétation critique qui ne soit pas de l’ordre de l’extase… ».

    La confirmation de la justesse de ces observations arrive en avril 1963. L’affaire commence page 214 et s’apaise page 234. Georges Poulet à qui l’on avait demandé une étude sur Char l’envoie à la revue commanditaire, laquelle la fait lire au poète qui entre en fureur pour un mot qui lui déplait. On alerte la république, on exige des corrections, les courtisans ( Dupin, Pingaud, Balard, Lescure ) s’entremettent, proposent, menacent ; les directeurs de revues tremblent devant le « physique d’armoire à glace [du poète, son] grand corps épaissi et une tête en forme de marteau pilon [qui lui donnent] une présence, ou une façade assez extraordinaire ». L’intimidation sera couronnée de succès. On cèdera à la « paranoïa » et au « pathétique insupportable » du poète puisque le mot « étriqué » qui avait suscité sa fureur sera remplacé par le mot « crispé appartenant au langage du maître ». Ce qui ne manquera pas de faire sourire les lecteurs d’À une sérénité crispée !

    L’affaire avait déjà fait l’objet d’une étude très documentée par Marta Sábado Novau dans l’ouvrage qu’elle a consacré à l’École de Genève ( Hermann, 2021 ) et d’un article de Stéphanie Cudré-Mauroux, « Le Corpus et les acteurs de l’affaire Char » paru chez Wallstein en 2022. Mais ici, nous lisons les documents de première main, dans leur jus d’époque, vivants, tout frémissants d’émotion et d’indignation !

    Toute anecdotique qu’elle soit, l’affaire troublera beaucoup Georges Poulet dont la critique d’adhésion et d’identification, si profondément sympathique aux œuvres, se trouvera en l’occurrence mise à mal. Occasion aussi d’une remise en question, d’une auto-interrogation scrupuleuse et douloureuse : à quoi l’on reconnaît un trait profond de l’École de Genève, et sans doute aussi de l’éthique qu’elle a faite sienne !

    Notons pour terminer que l’édition de cette correspondance est un modèle de respect du texte, d’annotation sobre et non pédante.

     

    Georges Poulet et Jean Pierre Richard. Correspondance 1949-1984. Editée par Stéphanie Cudré-Mauroux et Marta Sábado Novau. Slatkine Erudition, 428 pages. 2022.

    Les éditions de La Baconnière font paraître en même temps, à l’occasion du centième anniversaire de la naissance de Jean-Pierre Richard, Sur la critique et autres essais, recueillis par Jonathan Wenger.

    J’aurais pu ou dû mentionner Les Modernes de Jean-Paul Aron, paru en 1984 ; Le Démon de la théorie, et Les Antimodernes d’Antoine Compagnon, parus en 1998 et en 2005. 

  • Lettre ouverte au MCG

    Par Alain Jacquemoud

    Le MCG a naguère lancé l’idée de la préférence cantonale. Il a eu raison. Que vaudrait la politique d’engagement des entreprises, de l’administration, etc. si elles donnaient systématiquement la préférence à des collaborateurs en provenance de l’extérieur du canton, du pays ? Il a posé la question du développement de Genève, qui doit selon lui être étroitement pensé en fonction de l’exiguïté du territoire cantonal. Il a eu raison. A quoi conduirait un développement voulu pour lui-même, et qui n’intégrerait pas comme une absolue priorité la question de l’équilibre entre les zones construites et les zones réservées à l’agriculture, au vignoble, aux prairies extensives, aux rares marais encore présents, aux forêts, …

    Mais avoir de (deux) bonnes idées ne signifie pas que l’on ne peut pas en avoir de mauvaises. Je prends comme indice fort d’un dérapage le titre d’un article paru dans le dernier numéro du journal de ce parti, courant novembre. Grosses lettres noires pour accuser les frontaliers de tous les maux. 

    Rien de bien neuf sous le soleil, direz-vous. C’est vrai : chaque fois qu’il est question des frontaliers, le MCG y va de ce genre de refrain, qui claque bien davantage comme un coup de gueule idéologique que comme le fruit d’une réflexion raisonnée sur le monde du travail et de l’emploi à Genève. Mais voilà, c’est son mantra, sa chanson amère, son épine dans le pied, son joujou en forme de rouleau compresseur. A intervalles réguliers, un organisme officiel produit des chiffres relatifs au nombre de frontaliers dans le canton. Comme il est bien connu que les chiffres parlent d’eux-mêmes une langue immédiatement compréhensible par tous et qu’ils ne sauraient mentir, dans l’heure, le MCG dégoupille sa grenade rhétorique. Et boum ! L’affaire est réglée, ou plutôt devrait l’être rapidement si le monde obéissait aux critères mis en avant par ce parti.

    Cela dit, chacun admet sans peine que l’arrivée quotidienne à Genève, le plus souvent en voiture privée, de dizaines de milliers de travailleurs en provenance de l’extérieur ne va pas sans poser de vrais problèmes de trafic. Ces problèmes, il conviendrait donc de leur trouver à court terme des solutions meilleures que celles qui existent. 
    Reste le noyau dur de la question. Le nombre de personnes extérieures ne cesse d’augmenter depuis vingt ans. Pourquoi ? La vérité, c’est que dans des pans entiers de l’activité économique au sens large – PME qui travaillent dans la construction, l’hôtellerie /restauration, la santé – Genève dépend de la main d’œuvre extérieure. Une info récente et un chiffre : « Genève est dépendante de la France pour son système de santé. 57% de son personnel soignant possède un diplôme français. » (Journal de Léman bleu, jeudi 1er décembre 2022). Renvoyez ces travailleurs chez eux et ces secteurs seront proprement sinistrés. Bref, le MCG sert la vérité comme l’étoile polaire sert de guide aux aveugles. 

    Il ressort de ce qui précède que le MCG a deux fois tort. Si l’on appliquait les mesures qu’il préconise, ce parti, qui se profile comme le seul véritablement au service des Genevois, les conduirait à une sorte d’enterrement de première classe. Et on s’étonne pour finir que des représentants haut placés et fort sensés de ce parti – on pense entre autres à un certain conseiller d’Etat –  n’interviennent pas pour que les rédacteurs du journal mettent un bémol gros comme le Salève à des propos aussi obstinément faux et trompeurs.

  • Oh, les beaux jours!

    Par Pierre Béguin

    Si l'on en croit Netzéro Samizdat, le site de Benny Peiser, Président de la Global Warming Policy Foundation, et Hotair:

    «La Suisse pourrait être le premier pays à imposer des interdictions de circulation aux voitures électriques en cas d’urgence pour assurer la sécurité énergétique. Plusieurs médias le rapportent unanimement et évoquent un  projet de règlement sur les restrictions et interdictions d’utilisation de l’énergie électrique. Plus précisément, le document indique : «L’utilisation privée des voitures électriques n’est autorisée que pour les déplacements absolument nécessaires (par exemple, pratique professionnelle, shopping, visite chez le médecin, participation à des événements religieux, rendez-vous au tribunal).» Une limitation de vitesse plus stricte est également prévue sur les autoroutes.
    La majeure partie de l’électricité en Suisse provient de l’énergie hydraulique. Cependant, le pays importe également de l’électricité d’Allemagne et de France. S’il y a des goulots d’étranglement dans ces deux pays, l’électricité pourrait devenir rare en Suisse. La sécurité énergétique en Europe est considérée comme menacée en raison de la guerre menée par les Russes contre l’Ukraine.»
    "La Suisse a élaboré différents «niveaux d’escalade» pour faire face à la crise énergétique. L’interdiction de recharger les véhicules électriques n’entrerait en vigueur qu’au niveau 3, selon le projet de loi que des journalistes se sont procurés. Avant cela, le gouvernement imposerait des limites sur la température de l’eau dans les machines à laver (oui… sérieusement) et interdirait l’utilisation de souffleuses à feuilles et des sièges chauffants sur les télésièges. Bizarrement, les vidéos des services de streaming seront invitées à ne s’afficher qu’en résolution SD…"

    Qu'on se le dise! Les personnes qui possèdent une bonne vieille voiture avec un moteur à explosion pas du tout "décarbonisé" pourront donc continuer à rouler normalement. Du moins jusqu'en 2035, date à laquelle l'Europe a décidé d'interdire les véhicules à moteurs thermiques, et même hybrides (une décision qui doit encore être approuvée par les Etats membres).

    Quant aux personnes qui viennent d'installer à grands frais une pompe à chaleur à la place de leur chaudière à gaz ou de leur vieille chaudière à mazout hyper polluante, elles ne perdent rien pour attendre avant de se les geler en hiver...

    Vive le tout électrique!