Pierre-André Milhit, L’inventaire des lunes
Notre ami Pascal Rebetez, orpailleur poétique, est tombé sur une pépite. Un recueil arrivé aux Editions d’Autre part, qu’il dirige.
Editer est une longue patience, on le sait. Il faut avoir le goût de la prospection. Mais la récompense existe: « Parmi cent et un manuscrits, écrit Rebetez, tout à coup il y en a un qui nous frappe par sa justesse, sa musicalité, son âpreté aussi. » C’est celui de Pierre-André Milhit, 56 ans, né à Saxon.
Ce qu’on sait de lui: il a fait toutes sortes de métiers. Chauffeur-livreur, employé de pompres funèbres, garçon de café, père au foyer. Désormais assistant social. Et héritier de Maurice Chappaz, dont on retrouve parfois quelques accents dans L’inventaire des lunes, même si Milhit a sa propre langue, une démarche personnelle et une forme originale.
C’est le premier recueil à compte d’éditeur de Milhit, mais pas sa première expérience d’écriture. On ne nait pas ainsi tout fait à 56 ans. Il a été chroniqueur et billettiste dans des médias valaisans: Rhône FM, le Peuple Valaisan, le Nouvelliste. On peut trouver ses textes poétiques sur son blog ou dans deux volumes à compte d'auteur (Fringale en 1984 et Rien qu'un peu de morve en 1995).
C’était avant L’inventaire des lunes, un recueil parfaitement structuré, d’une grande cohérence, fort, contrasté, et captivant.
Le livre est partagé en 13 parties, autant que de lunes en 2009. Cette année-là a en effet comme caractéristique d’avoir deux pleines lunes dans le mois de décembre, le 2 et le 31. (Les autres, qui donnent leur datation à chacun des textes de Milhit ont eu lieu le 11 janvier, le 9 février, le 11 mars, le 9 avril, le 9 mai, le 7 juin, le 7 juillet, le 6 août , le 4 septembre, le 4 octobre, le 2 novembre.)
Chacune des parties définies par Milhit convoque un environnement saisonnier ou culturel autour d’une de ces dates. Cette composition permet au recueil d’éviter le statisme, d’avancer vers sa conclusion en suivant des fils rouges, dans une suite de chapitres qui se répondent et se poussent.
Rythmés par des anaphores, les poèmes évoquent la nature, les confins des villes, la montagne, la plaine. On y retrouve un narrateur dans la nuit, qui consigne visions, scènes et images, des personnages de passage, un fou, un sage, quelques renardes et renards, d’autres animaux...
Le résultat est varié, évocateur, placé entre la verticalité du souvenir et l’horizontalité du contemporain. Plein de surprises, d’éclats de vie, d’images fortes et de jeux d’échos. Un beau recueil, tendre et vigoureux.
Pierre-André Milhit, L’inventaire des lunes, poèmes, Editions d’Autre Part
Publié aussi dans Le blog d'Alain Bagnoud