Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Trois environnementalistes à l'origine de la politique énergétique occidentale

Par Anouchka Meier-Jones

Rémy Prud’homme nous a montré (voir mon précédent billet) que la crise énergétique était causée par l’Energiewende allemande promue, sinon imposée par Bruxelles. Mais un document précis a servi de référence pour ce tournant volontariste au plan mondial : le Rapport SRREN du GIEC. Or, un trio d’environnementalistes a joué un rôle déterminant dans le tour donné à ce Rapport : Achim Steiner (No 1), Ottmar Edenhofer (No 2) et Sven Teske (No 3).

Achim Steiner (No 1) était, depuis 2006, le directeur général du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), lequel a enfanté le GIEC. GIEC qu’il a semble-t-il convaincu de produire un rapport établissant que les énergies renouvelables constitueront une alternative aux énergies fossiles. Toujours est-il qu’en 2009, le GIEC lançait un open call et recevait en retour 164 scénarios d’évolution des émissions de CO2 en fonction des prévisions d’augmentation de la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique. De là le titre du Rapport : Special Report en Renewable Energies and Mitigation of Climate Change (SRREN).

Le Rapport SRREN était dirigé par Ottmar Edenhofer (No 2), l’un des promoteurs du « Pacte vert » de l’UE visant la neutralité carbone en 2050, ex-collaborateur aussi de Nicholas Stern, dont le Rapport qui porte son nom préconisait la création d’une taxe carbone. De 2008 à 2015, Edenhofer a encore co-présidé le Groupe de travail III du GIEC, chargé de dessiner la politique mondiale face au réchauffement climatique.

Le Rapport SRREN comptait 1544 pages réparties en 11 chapitres. Le plus important était le chapitre 10, intitulé Mitigation Potential and Costs. C’est lui qui évoquait les 164 scénarios des émissions futures en fonction de la part des énergies renouvelables dans la consommation mondiale. Quel tableau nous brossait-il ?

Duverney2.jpg

La figure 10.1 (SRREN, chap. 10 : 802), reproduite ici, présentait les courbes correspondant aux 164 scénarios. Leur dispersion était considérable. Surtout, les deux gerbes très divergentes qu’elles formaient étaient peu propices à tirer des leçons décisives pour l’avenir de l’humanité. Gérondeau de noter en passant (2021 : 165) qu’on s’étonnera que les « plus de 120 éminents experts internationaux » qui y ont contribué aient validé les deux « zéros » différents sur l’échelle des ordonnées (l’un noté en abscisse, l’autre à l’origine des courbes), et donc les deux axes des x !

Néanmoins, le 9 mai 2011, à Abu Dhabi, le président du GIEC, Rajendra Pachauri, ne tarissait pas d’éloges à propos du travail effectué : « Le GIEC a fait la synthèse des informations disponibles les plus fiables et les plus pertinentes afin de proposer à la communauté internationale une évaluation scientifique des perspectives offertes par les énergies renouvelables en vue d’atténuer le changement climatique. Le Rapport spécial offre aux décideurs une base solide pour leur permettre d’affronter, en toute connaissance de cause, les défis majeurs du XXIe siècle. » (SRREN, Communiqué de presse : 2)

Comment le Résumé à l’Intention des Décideurs (RID) du Rapport SRREN, le seul document largement lu, a-t-il synthétisé le Rapport complet ? Au paragraphe 6, intitulé Mitigation potentials and costs, on pouvait lire :

« La majorité des 164 scénarios examinés dans ce rapport spécial indiquent une augmentation significative du déploiement des énergies renouvelables d'ici 2030, 2050 et au-delà. (…) La part des énergies renouvelables dans l'approvisionnement mondial en énergie primaire varie considérablement d'un scénario à l'autre. Plus de la moitié des scénarios prévoient une contribution des énergies renouvelables supérieure à 17% de l'approvisionnement en énergie primaire en 2030, pour atteindre plus de 27% en 2050. Les scénarios présentant les parts les plus élevées d'énergies renouvelables atteignent environ 43% en 2030 et 77% en 2050. » [10.2, 10.3] (SRREN, RID : 20 ; je mets en majuscules)

Comment soutenir que la « majorité des 164 scénarios (…) indiquent une augmentation », alors qu’ils dessinaient majoritairement une baisse ? Et surtout, la phrase conclusive (en majuscule) était mensongère : elle utilisait le pluriel – « Les scénarios » –, alors qu’un seul scénario atteignait 77% en 2050, comme le montrait la figure 10.1. Et ce scénario exceptionnel émanait justement de Sven Teske (No 3), l’un des auteurs principaux du chapitre 10 du Rapport (dûment cité comme tel (SRREN : 791) Or à l’époque, Teske était responsable des énergies renouvelables chez Greenpeace International et engagé par l’European Photovoltaic Industry Association !

Le Communiqué de presse du 9 mai 2011 était encore plus scandaleux, comme on peut le voir dans l’encadré qui suit. Car une fois signalé dans les titres que plus de 160 scénarios avaient été envisagés, le premier paragraphe affirmait purement et simplement que « Près de 80% de l’approvisionnement énergétique mondial pourrait être couvert par LES énergies renouvelables à l’horizon 2050 à condition que des politiques publiques adaptées soient mises en place » (je mets « les » en majuscules).

Duverney1.jpg

Le même Communiqué affirmait sans vergogne : « Il s’agit d’un rapport impartial, de portée générale, sur l’état actuel des connaissances traitant du potentiel présent et futur d’une filière énergétique économe en ressources et sobre en carbone » déclare le Professeur Edenhofer. » (SRREN, Communiqué de presse : 3)

Ce sont donc les « perspectives » d’un seul homme (Sven Teske), mises en exergue par le SRREN grâce un co-religionnaire (Ottmar Edenhofer), qui dictent depuis 2011 les politiques des pays visant tête baissée la décarbonation : « [le] rapport SRREN (…) bouleversa depuis sa parution l’économie mondiale en l’entraînant sur une voie sans issue et malheureusement ruineuse au détriment de ceux qui la suivent, et au-delà de l’humanité tout entière. » (Gérondeau, 2022 : 51). On commence à s’en apercevoir, et ce n’est que le début !

Notes et références :

Gérondeau, La religion écologiste. Climat, CO2, hydrogène : la réalité et la fiction, L’Artilleur, Paris, 2021.

Gérondeau, Les douze mensonges du GIEC. La religion écologiste 2, L’Artilleur, Paris, 2022.

SRREN, Edenhofer O., Pichs-Madruga R., Sokona Y., Seyboth K., Matschoss P., Kadner S., Zwickel T., Eickemeier P., Hansen G., Schlömer S., von Stechow Ch. (ed), 2011, Special Report on Renewable Energy Sources and Climate Change Mitigation (SRREN), Special Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change, Cambridge University Press.

SRREN communiqué de presse.pdf

 

Les commentaires sont fermés.