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  • Vivent les nomades !

     

     

     

     

     

    par Pascal Rebetez

     

     

    Le bilan d’EasyJet est excellent et, en une année, c’est quasiment l’ensemble de la population suisse (5,8 millions de passagers) qui a décollé en low-cost du territoire suisse. Quel bonheur ! Quelle facilité ! Nous sommes désormais tous devenus des nomades. Attention, pas des Roms, hein, faut pas déconner ! Nous, on est branchés, on s’envoie en l’air, pas cher, on visite en deux jours les villes qui comptent en Europe, et si l’on traverse la Manche, on ne la fait pas !

    Non, si on se fait tondre, c’est en toute connaissance de cause. Nous faire croire qu’on connaîtra une ville en vingt-quatre heures, transport aller et retour de l’aéroport compris, c’est de l’arnaque pure, doublée d’une prétention sans vergogne à soi-disant rencontrer l’autre. Il faut le dire : outre que les vols EasyJet ne sont pas donnés, taxes comprises, taxis, prix des hôtels exorbitants, cadeaux obligatoires à acheter, tout cela nous mène à des dépenses assez considérables. Mais l’admettre, c’est déjà passer pour un pigeon. Alors pigeon d’accord, mais voyageur. J’ai été jusqu'à peu un très bon client, vraiment, très tenté par toutes ces destinations exotiques, Malaga, Liverpool, etc. Tes rêves d’ailleurs à portée de main et de porte-monnaie…

    Et puis désormais, j’hésite, surtout quand, isolé en montagne, je vois le défilé incessant des traces des nomades dans le ciel.

    5,8 millions de passagers dont la plupart sont des consommateurs touristiques, sans aucun réel besoin d’aller ailleurs mais qui y vont parce que ça se fait et que la pub est ainsi faite et l’enthousiasme si généralisé, y compris dans les médias tellement prompts à se réjouir des excellents bénéfices des jeunes compagnies, et ceci malgré que le kérosène, c’est aussi du pétrole et beaucoup de CO2, non ? Le bilan écologique d’EasyJet n’est pas excellent, c’est évident.

    Donc les compagnies sont contentes et le modèle EasyJet est d’une grande rentabilité, comme dit son chef helvète.

    Question à cinquante centimes : pourquoi n’y a-t-il pas de vol pour Bucarest, alors que les clients nomades sont si nombreux à vouloir du low-cost ?

  • Cachez-moi ça !

    Par Alain Bagnoud
     
    Enfin, on travaille à régler le problème des Roms à Genève ! C’est vrai, quoi, c’était insupportable ! Ces pauvres qui ont l’outrecuidance de venir nous rappeler qu’ils meurent de misère chez eux. Qui s’étalent devant les magasins où nous avons lutté pour arracher quelques colifichets de la dernière mode H&M ou devant les banques où nous avons retiré quelques centaines de francs pour nos dépenses et nos menus frais. Et il faudrait leur donner encore une piécette ?

    Qu’on les ôte de là ! Qu’on les fasse disparaître ! Bien sûr, ce ne sont pas des malfaiteurs, je le reconnais, ils n’ont rien à voir avec le crime organisé, ce sont juste des pauvres, mais enfin, ils sont visibles ! On ne peut pas les rater ! Avec leurs vieux habits démodés et élimés qui s’accumulent sur eux en épaisses couches contre le froid, leurs dégaines, leur têtes bizarres. On comprend pourquoi, chez eux, en Roumanie, ils sont discriminés, pourquoi personne ne veut leur donner du travail, pourquoi les policiers les persécutent.

    Chaque fois que je les rencontrais, tenez, j’avais mal au cœur. Une envie de vomir et une sorte de… oui, de culpabilité. Heureusement, ce sentiment si désagréable va disparaître. La police fait le nécessaire. On leur rend la vie difficile. On les contrôle, on les force à passer la nuit dans des abris, pour leur bien, pour leur santé, et puis après dix nuits, ouste ! Rentrez chez vous !

    Grâce à ces petit tracas qu’on leur fait, ils disparaîtront. Ils ne résistent d’ailleurs pas. Ils ont l’habitude de se faire chasser de partout. Et bientôt, enfin, quand ils comprendront que ça ne sert à rien de venir ici, qu’ils seront embêtés, vérifiés, qu’ils s’endetteront encore plus parce qu’ils ne gagneront même pas de quoi se payer le bus du retour, bien fait pour eux, ils se rendront compte. Notre message n’est pas difficile à comprendre. Au contraire. Simple, clair, affirmé : nous ne voulons pas de vous, ne venez pas !

    Les riches, si, tous, de tous les coins de la planète ! Débarquez, arrivez, on vous fait des avantages fiscaux, on vous aime, on vous admire, on vous vénère. Vous êtes nos dieux, nos saints, nos modèles. Nous aimerions tellement être comme vous. Vous sentez bon, vous nagez dans le  luxe, vous passez à la télé, vous nous faites rêver. Vos petits problèmes nous émeuvent. Vos séparations, vos excès, l’éducation de vos enfants. Ce que vous mangez. Vos vacances à Saint-Barth. Tout nous intéresse. Nous nous prosternons devant vous. Ah ça, qu’est-ce que nous pouvons vous aimer, les riches !

    Mais les misérables, non ! Pas eux ! Qu’ils nous épargnent leur vue ! Ils peuvent bien vivre tranquilles, nous ne leur souhaitons pas de mal, mais loin, dehors, ailleurs !
    Qu’ils cessent de heurter notre sensibilité. Qu’ils arrêtent enfin une bonne fois pour toutes de nous donner mauvaise conscience !


    (Voir aussi Le blog d'Alain Bagnoud)

  • Dieu enfin identifié?

    Par Pierre Béguin

     

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    Pour tous ceux qui douteraient encore de l’utilité de la presse gratuite, le journal 20 minutes livre une information capitale par la bouche (et ce n’est pas rien!) de Salma Hayek. L’actrice mexicaine, fervente catholique, attribue à une intervention divine la perfection de ses seins. Dans l’édition du 16 novembre, en page 22 (je cite mes sources, mon confrère Chiacchiari ayant pu constater, lors de sa récente pensée de la semaine, qu’avec un certain lecteur la précision en ce domaine est une exigence absolue), en haut de la page 22 donc, la belle révèle qu’elle était une adolescente complexée (original, non?): «Contrairement aux autres filles de ma classe, j’étais plate comme une planche et je vivais cela très mal». C’est alors que le miracle eut lieu, un de ces miracles qui vous donnent envie de vous convertir immédiatement à une religion répondant si bien aux attentes des hommes: «Durant un voyage avec ma mère, nous nous sommes arrêtées dans un église réputée pour ses miracles. J’ai trempé mes mains dans l’eau bénite et j’ai dit: «S’il vous plaît Seigneur, faites que mes seins grossissent!». Quelques mois plus tard, ma poitrine s’est développée».
    Je ne sais pas pour vous, mais moi, je n’hésite plus: je me fais catholique! Que la concupiscence, toutefois, ne nous détourne pas de l’essentiel: cet aveu pourrait nous permettre de remonter la piste menant à Dieu et d’identifier enfin notre Père à tous. Il semblerait donc qu’Il habite au Brésil, qu’Il se cache sous un pseudonyme du genre Oliveira Santos da Silva (ou quelque chose d’approchant) et qu’Il fasse précéder ce nom de l’appellation «Docteur». Il paraît même, selon certaines rumeurs d’Orléans (non, ce n’est pas Jeanne D’Arc!), qu’Il aurait inscrit sur sa porte «Chirurgie plastique». Et voilà pourquoi, au Brésil tout spécialement, on ne sait plus à quel sein se vouer. Et voilà pourquoi, à partir de maintenant, les agnostiques auront tout faux.
    Merci qui? Merci 20 minutes! Merci Salma Hayek!
    Pour rester dans la presse récente – à un autre niveau certes mais toujours en relation avec Dieu – La Vie protestante (je salue son rédacteur s’il me lit et j’en profite pour lui rappeler que j’attends son téléphone depuis deux mois… Eh oui! Ça se passe comme ça chez les protestants, le rédacteur est aussi invisible que Dieu. Alors que chez les catholiques, les veinards, Il se manifeste, et plutôt gaillardement: voyez les seins de Salma Hayek! Enfin! Quand je dis «voir», il s’agit d’un vœu pieu que même l’œcuménisme ne saurait exaucer… Bon! Je me suis complètement égaré dans ma phrase. Je reprends.) La Vie protestante, donc, (dans son édition du mois de novembre 2007, en page 7, dans la rubrique «Economie») consacre un article à la bulle immobilière américaine (Non, lecteur! Rien à voir avec les seins de Salma Hayek!). Son auteur (dont je tairai le nom, le soupçonnant fortement – et je le comprends – de ne pas désirer se compromettre dans un article dédié avant tout aux seins de Salma Hayek, même s’ils mènent à Dieu), son auteur, donc, approuve l’intervention spontanée des banques centrales américaines et européennes, accourues d’un seul homme à la rescousse sur les marchés de crédit. Que les banques centrales aident les banques responsables de la crise et laissent les citoyens victimes de la bulle perdre leur maison est, bien entendu, économiquement justifiable. Et tant pis pour l’éthique! L’auteur pose tout de même cette question rhétorique: «N’aurait-il pas fallu interdire l’action des banques centrales pour donner une leçon d’équité civique au secteur financier en le laissant s’écrouler sous le poids de ses erreurs et crier revanche avec les loups d’une autre époque?» Et de répondre aussitôt : «Non. Bien sûr, car qui demanderait à un pompier de retrouver et punir un pyromane avant d’éteindre l’incendie?» Sauf que le citoyen, lui, peine à distinguer, dans ces histoires de bulle immobilière, le pompier du pyromane. Et qu’il ne comprend pas pourquoi le fait d’éteindre a priori l’incendie empêcherait a posteriori de punir le coupable. A moins que pompiers et pyromanes soient un peu les mêmes, comme flics et voyous en somme. Mais punit-on les dieux de l’Olympe de leur insouciance, même si les hommes paient l’addition? Non, bien sûr, car ces exigences éthiques sont "d'une autre époque". Tiens, tout cela me rappelle l’histoire récente de notre chère République genevoise!
    Et pendant ce temps, que fait la Régie? Je veux dire: que fait Dieu? Demandez à 20 minutes et à Salma Hayek!

     PS. Oui, je sais! J’avais annoncé la suite de ma rubrique To read or not to read. Mais ces considérations littéraires n’ont guère d’importance en regard de l’actualité lorsque celle-ci est si brûlante (et c’est le cas, ne trouvez-vous pas?). A la semaine prochaine, donc!

  • Le substantif androgyne


    Par Olivier Chiacchiari

     

    Une obsession grammaticale, ça commence par une angoisse au détour d'un mot qui déconcerte. Et voilà que le doute s'installe, voilà que le savoir vacille, voilà qu'on s'acharne à interroger les limites de sa connaissance avant de se jeter à corps perdu sur le premier dictionnaire venu!
    Ouf, une réponse claire, mais pour combien de temps? L'angoisse génère l'obsession, à moins que ce ne soit le contraire, c'est bien connu.
    Au fil des ans, mes obsessions se sont focalisées sur la conjugaison du subjonctif imparfait (élégant bien qu'inutile), le pluriel des mots composés (nécessaire bien qu'improbable), les participes passés ne s'accordant pas avec le verbe être (ils se sont lavé les mains (sic))... enfin bref, tous les terrains qui relèvent de l'aventure grammaticale extrême!
    Voici la dernière en date, j'ai nommé: le substantif androgyne. Ces mots dont on ne peut distinguer le sexe, qui oscillent entre masculin et féminin, à tel point qu'on voudrait parfois pouvoir les dévêtir...
    J'ai dressé une liste que je vous invite à tester ici, et si en plus vous débusquez les trois exceptions qui s'y nichent, vous êtes vraiment incollable.

    Abîme - Aérogare - Alluvion - Amalgame - Amarre - Amiante - Amorti - Amour - Antidote - Aparté - Apogée - Apostrophe - Argile - Armistice - Astérisque - Augure - Chasuble - Délice - Dithyrambe - Dividende - Echappatoire - Echauffourée - Ecritoire - Edelweiss - Effluve - Electrode - Eliminatoire - Eloge - Enzyme - Ephéméride - Epice - Epitaphe - Epître - Equinoxe - Equivoque - Escrime - Estime - Evangile - Exergue - Granule - Haltère - Hémisphère - Hémistiche - Interface - Intervalle - Interview - Métastase - Météore - Météorite - Minuit - Moufle - Oasis - Opprobre - Orgue - Orque - Pétale- Planisphère - Recel - Sémaphore - Sitcom - Tentacule

    Pour obtenir les réponses, cliquez ici

  • J’ai servi la beauté

    Par Pascal Rebetez

     

     

    Profiter de cette tribune pour saluer une frangine de lettres, Pierrette Micheloud, partie rejoindre les déesses et les dieux de la « gynandrie », ce lieu alchimique de la femme nouvelle, cette mystique poétique qu’elle aimait à développer dans ses textes comme dans sa vie.

    Pierrette est décédée d’un cancer et m’en parlait avec une touchante sérénité au printemps dernier, dans une salle du Sénat français où étaient réunis les jurés et les lauréats des Prix de la Francophonie. C’était un tout petit bout de femme, – de bientôt 92 ans mais qui s'était rajeunie de cinq ans en arrivant à Paris– vive, souriante, la voix cascadante, attentive aux autres et à leurs oeuvres qu’elle a défendues en tant que critique, membre de jurys, créatrice de Prix littéraires.

    Dès 1950, elle a vécu dans une mansarde du Quartier latin et revenait l’été planter la poésie dans les villages de son Valais natal, en trouvère inspirée. « J’ai servi la beauté » se plaisait-elle à dire. Il reste à retrouver et lire quelques vingt ouvrages et un livre-hommage paru en 2002 aux Editions Monographic Présence de Pierrette Micheloud. Allez aussi la revoir sur http://mediaplayer.archives.tsr.ch/micheloud-coeur/0.ask
  • Jules Renard et la mesure des mots

    Proposée par Olivier Chiacchiari

     

        

         Les mots ne doivent être que le vêtement,

         sur mesure rigoureuse,

         de la pensée.

        

         Jules Renard

     

     

     

         Que l'on me permette d'ajouter:

         le reste n'est que bavardage.

  • Le meilleur des mondes

    Par Alain Bagnoud


    Visionnaire, Huxley, dans cette fable de science-fiction utopique qu’est le Meilleur des mondes? Evidemment. Il a prévu toutes sortes de choses qui sont arrivées. La consommation à outrance et les objets comme principale jouissance. Le jeunisme et ses avatars : infantilisme, refus de la dégradation du corps à tout prix, évacuation de la mort. Un système de castes satisfaites de leur sort. Comme nous le sommes. Bien contents de ne pas être plus bas et qui ne contestons pas ceux qui sont plus haut.
    Ou encore le sexe considéré seulement comme une distraction.
    Quoique là, non ! Il y a encore du travail. Nous n’arrivons pas, décidément, à mettre dans trois cases distinctes les sentiments, la sexualité récréative et la reproduction. Mais nous y travaillons.
    Seulement, Huxley était encore un peu aveuglé par sa vieille société. Cette idée d’envoyer les déviants en exil …
    Car à la fin de son livre, on règle le sort des inadaptés. De ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas s’intégrer à la société parfaite du loisir, de la distraction et de l’infantilisme. Qui s’obstinent à cultiver leur moi, à développer leur individualité, à réfléchir sur leur existence et sur la société dans laquelle ils vivent.
    On les expédie dans des îles. L’Islande, les Falklands ou des paradis tropicaux, à choix. Une punition qui est en fait une récompense. Les marginaux se retrouvent avec des gens comme eux dans une petite société d’élite qui partage les mêmes préoccupations et peut s’interroger tant qu’elle veut sur Dieu, l’Art, la Création, la Science, la Littérature.
    Nous avons résolu le problème à moins de frais. Chez nous, on les garde à l’intérieur. Bien au chaud, abolis, sans danger pour quiconque, puisque personne ne les écoute.
    Et comme il faut garder les apparences et les faux-semblants, on fait passer à la télévision des marionnettes censées incarner ces gens : des fantoches inoffensifs généralement pourvus d’une ou deux idées fixes, dont le rôle est d’incarner une fonction et de participer à la société du spectacle.
    Vous voyez de qui je parle ? Non ? Moi non plus.

    (Publié aussi dans le blog d'Alain Bagnoud)
  • To read or not to read I

     Par Pierre Béguin

     

     

    1. Fascination et répulsion

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    Je me suis souvent demandé pourquoi, après m’avoir tant fasciné, avec une soudaineté et une force à la mesure d’un coup de foudre, l’œuvre d’André Gide, depuis plus de 15 ans, me rebute avec la même violence qu’elle m’a jadis attiré. Bien sûr, fascination et répulsion reposent sur la même logique.
    Gide incarnait pour moi – disons plutôt son œuvre, la personne m’ayant toujours inspiré de l’aversion – le refus de toutes limitations et contraintes (même, et surtout, la fidélité à soi-même et aux autres), une volonté de privilégier l’instant présent, le désir immédiat, l’humeur, l’instinct, le mépris des morales toutes faites, et du prêt-à-porter en général, une justification de l’irresponsabilité, du changement, une prédilection pour la disponibilité absolue au moment, au désir, à la gourmandise, à la découverte, à toutes mes potentialités même les moins avouables.
    A 20 ans, ce programme m’était aussi nécessaire que la respiration. Mais maintenant que je me suis installé, marié, que j’ai deux enfants… De deux choses l’une: soit je ne supporte plus l’œuvre de Gide parce que j’ai dépassé ce programme, l’ayant à ma manière réalisé, soit parce que, précisément, j’ai été incapable de le dépasser et que son rappel en rendrait l’échec plus insupportable encore. Mais ce qui est certain, c’est que, face à une forme d’imposture de mon éducation, à ce carcan moral qui m’a tant étouffé, à cette peur de l’échec et du quant-dira-t-on qui m’a contaminé, à cette résignation petite bourgeoise, à tout ce protestantisme que j’ai souvent porté comme un fardeau dans la course de mon existence, Gide fut un libérateur. D’où ma fascination (de là peut-être l’oubli dans lequel il est tombé: la nouvelle génération n’a guère besoin de libérateur). Se pose t-il maintenant pour moi comme un accusateur? Un «inquiéteur», puisqu’ainsi définissait-il sa fonction? D’où ma répulsion?
    Gide, miroir de mo1732636420.jpgn échec ou de ma réussite?
    Au-delà d’une réponse toute personnelle, il reste le grand mérite de la lecture. En ce sens, citons Proust : «Chaque lecteur est, quand il lit, le propre lecteur de soi-même. L’ouvrage de l’écrivain n’est qu’une espèce d’instrument optique qu’il offre au lecteur afin de lui permettre de discerner ce que, sans ce livre, il n’eût peut-être pas vu en soi-même.»  Ou encore Nathalie Sarraute : «Les lecteurs doivent trouver dans la littérature cette satisfaction essentielle qu’elle seule peut leur donner : une connaissance plus approfondie, plus complexe, plus lucide, plus juste que celle qu’ils peuvent avoir par eux-mêmes de ce qu’il sont, de ce qu’est leur condition et leur vie.»
    Fascination ou répulsion d’un livre nous interroge de même; et, dans cette systématisation du divertissement qui nous invite à consommer à l’excès notre dose de délire quotidien, la littérature reste l’un des derniers lieux d’interrogation sur soi-même et sur le monde. Vivre sans lire, ce serait comme voyager sans carte, sans informations et sans jamais s’arrêter pour simplement regarder. Même si beaucoup d’écrivains ne semblent pas partager cette opinion, à commencer par Gide lui-même. Mais de cela, nous en reparlerons la semaine prochaine…

  • Aristote contre le populisme

     

    Proposée par Olivier Chiacchiari

     

     

         Il n'y a pas de réponses simples

         aux problèmes compliqués.

     

        Aristote

     

     

     



    Aphorisme que je dédie tout particulièremenr aux sympathisants de l'UDC, dans une époque où de plus en plus de monde exige des solutions simples et rapides aux problèmes de nos sociétés. Une autoroute pour les populistes!

  • Publicité expéditive

     

    Par Olivier Chiacchiari

     


     

    Il y a quelques années, une pub télévisée nous montrait un homme exténué par son travail, reprendre un second souffle après l'absorption d'une pastille effervescente vitaminée. A l'issue de cette démonstration, on nous gratifiait du slogan:

    La fatigue est une maladie qui se soigne

    Je ne me serais jamais souvenu de cette formule si mon regard n'avait pas croisé l'autre jour dans la rue, une affiche vantant les mérites d'une autre pastille effervescente, antigrippale cette fois, déployant le slogan:

    Pas de temps à perdre avec la grippe

    Bon... arrêtons ce flux publicitaire le temps d'une réflexion: la fatigue n'exige-t-elle pas du repos, tout simplement ? Et la grippe, n'est-ce pas une affection hivernale qui demande à être soignée bien au chaud, de préférence au calme et allongé sous une couette, devant un grog fumant et un bon DVD, pourquoi pas ?
    Que cherche-t-on à nous faire entendre ? Qu'il nous faut-il désormais œuvrer 24h sur 24, que nous sommes condamnés à nous agiter perpétuellement, sans plus envisager la moindre pause, fut-elle imposée par notre corps contre l'obstination de notre esprit ?
    Allons donc ! Moi je dis prenons le temps d'un repos, prenons le temps d'une grippe, sinon à ce rythme-là on verra bientôt des entreprises funéraires lancer de vastes campagnes avec des slogans du genre:

    Ne vous embêtez plus avec la vie !