Ecole, ou quand le bâtiment va, tout va
Cette semaine, j’accueille un invité, Claude Duverney, qui s’était déjà exprimé de manière très pertinente dans notre blog l’année passée. Il s’exprime sur l’école en tant que père dont les enfants fréquentent l’école primaire et le Cycle d’Orientation. Je le remercie de sa prise de position. Pierre Béguin
Qu’on les conteste ou qu’on les relativise, les études Pisa recalent les écoliers genevois année après année. Chacun y va de son commentaire et, surtout – comme il «connaît» l’école pour y avoir usé quelques fonds de culotte – de sa recette pour redresser la barre.
Mais qu’observent les parents que nous sommes en fréquentant les préaux du primaire et en s’intéressant à l’enseignement dispensé à nos enfants? Que les maîtres travaillent consciencieusement avec leurs élèves; parfois, ou souvent même, malgré une conception pédagogique aussi controversée que son imposition est dogmatique. Les penseurs de l’école, pourtant laïque, ont décidément de la peine à se départir d’une certaine religiosité, tant qu’ils se préoccupent de marquer leurs investigations du sceau de la scientificité.
Alors, quelles mesures le DIP prend-il pour juguler l’hémorragie? Des renforts qui pleuvent comme manne céleste; car on nomme… surtout des directeurs (plus de 90). Loin des élèves et de leurs maîtres ou, à tout le moins, en perdant la proximité toute efficace du «maître principal». On imagine d’ailleurs la maîtresse en situation d’urgence prendre le téléphone pour appeler le secrétariat d’une directrice, alors qu’il lui suffisait auparavant de toquer à la porte voisine du maître principal pour régler le problème. Quelle entreprise fonctionne-t-elle encore sans directeur de nos jours – argumente le Président du DIP quand il est sommé de s’expliquer dans les média? Comme si l’école était une entreprise plutôt qu’une Institution, ou comme si elle se devait en tout cas de tourner comme une fabrique.
Mais ces nominations sont-elles au moins efficaces et vont-elles relever le niveau de l’école genevoise? Pas à elles seules, nous laisse-t-on encore entendre. Car on annonce fièrement la constitution de «conseils d’établissements», à la participation desquels des parents sont élus. L’école associe les parents, mais aussi les communes, à son fonctionnement: «Il <le conseil d’établissement> développe des liens entre l’école, la famille ainsi qu’avec et grâce aux communes» (sic!) En faisant au passage de grands gestes d’ouverture et de visibilité, le site du DIP nous explique bien que ce «conseil» apporte aide à la direction et efficacité aux décisions: «Il constitue une aide au pilotage de l’établissement, amène transparence et efficacité aux décisions prises et aux actions menées».
Nous voilà pleinement rassurés. Pensez: les écoles seront dirigées par des directeurs et, pour les aider à diriger et assurer l’efficacité des décisions, on leur adjoint un conseil d’établissement associant parents et communes. Une chape bien lisse pour couvrir une épaisse dalle de béton: l’école est, dès à présent, bien façonnée et consolidée. Et c’est vraiment le dernier des scepticismes qu’il faudrait convoquer pour discerner une fissure dans l’édifice. Pourtant, puisque l’on parle bâtiment et que l’on conçoit à présent l’école sur le modèle d’une entreprise, osons une comparaison.
Considérons une entreprise genevoise engagée dans la construction d’un immeuble. Comparaison n’est pas raison, certes, mais il en va tout de même d’édification dans les deux cas. Esprit ou matière, quelle importance d’ailleurs, quand on vise la performance de part et d’autre? Notre entreprise, révèle une étude à ceux qui ne le voient toujours pas, accuse un retard sur celles de cantons voisins affairées sur des chantiers de même envergure. Que fait le patron de l’entreprise genevoise afin de rattraper son retard? Il nomme une dizaine de chefs de chantier qu’il installe dans des bureaux. Il met sur pied un conseil d’entreprise, avec élection de représentants du quartier et du voisinage, pour aider les chefs et assurer l’efficacité et la transparence des mesures décidées. A n’en pas douter, toute personne dotée d’une once de bon sens s’insurgerait et dénoncerait l’inadéquation des mesures prises pour accélérer la construction. Tant il est vrai que les chefs ne vont pas plus monter des murs que les voisins couler des dalles.
Mais pourquoi cette approbation par le silence lorsque des mesures aussi contre-productives sont appliquées dans l’école genevoise? Quand elle ne serait qu’une entreprise, l’école vaudrait déjà qu’on la sauve – et Dieu sait que la chose est d’actualité; mais l’école est une Institution qui exige qu’on la défende à titre d’organe de la République. Peut-être notre absence de réaction est-elle déjà l’effet de l’érosion de la réflexion critique; une érosion conséquente, en partie d’ailleurs, à la volonté politique d’aligner l’école sur les attentes professionnelles. Et quand l’esprit critique n’y résiste plus, les slogans nous envahissent, qui nous évitent de penser. Alors nous allons bientôt tous répéter d’une même voix, servile et béate: «quand le bâtiment va, tout va, même l’école!»
Claude Duverney, parent d’élèves


que le crime est perpétré. Mais ce processus de mise à mort est raconté sur le mode comique. On se dirait dans un film de Buster Keaton. Dans une langue dépouillée à l’extrême (presque aucun adjectif), l’écrivain tchèque a élevé au rang de héros ce pitoyable employé.
Cette journée, où se sont retrouvés les directeurs de collège, de nombreux doyens et présidents de groupe – rejoints dès 14 heures par MM. Charles Beer, Daniel Pilly, Georges Schürch et les deux vice-recteurs de l'Université, MM.Yves Flückiger et Pierre Spierer – a été mise sur pied à la demande des autorités du DIP et organisée par la direction du Collège de Genève. Elle s'est déroulée selon le programme suivant:
Vous êtes, Monsieur B., un « grand professionnel » de la politique : cela, même vos ennemis s’accordent à le reconnaître. Vous avez pour ce faire l’intelligence et tout l’argent qu’il faut. Mais justement. Je vous ai écrit une première fois il y a huit ans, Monsieur B., pour vous dire tout le mal que je pensais de votre projet d’entrer au gouvernement, et dénoncer « un système parfaitement programmé, une stratégie parfaitement sous contrôle, là où d’autres ne veulent voir que la sincère défense de convictions ». Depuis, vous avez raté votre premier putsch, mais réussi le second, le « système B. » a parfaitement fonctionné, vous êtes partout, vous êtes la Vedette, votre ego enfle de jour en jour comme celui de la grenouille de la fable, bientôt vous paierez pour qu’on confectionne des chocolats à votre image – et demain, en dépit de vos dérapages, de vos méthodes nauséabondes et des innombrables preuves données, en quatre ans, de votre mépris du droit, de la collégialité, voire même de la Constitution, vous vous retrouverez peut-être président de la Confédération. J’aime encore mon pays, Monsieur B. Je ne me fais pas à l’idée qu’on détourne à son profit la démocratie avec un tel culot. Je vous écris pour vous dire à nouveau que « je ne marche pas ».