Par Pierre Béguin Dans son blog du 5 juin, Philippe Souaille soutient CEVA. C’est son droit le plus strict. J’aurais aimé être convaincu. C’est raté. Aucun argument, aucun développement. Que les professions de foi habituelles du genre «le barreau sud ne répond pas aux besoins d’irrigation de la région genevoise» (ah bon? première nouvelle! et pourquoi donc? Qu’en pensent les habitants de Plan-les-Ouates?) «C’est le CEVA qui est la bonne solution» (donnez au moins un argument!) «relier CEVA à Etrembière» (comment? demander aux Français? et pourquoi pas à Bardonnex alors?) «Construire un tram entre la Praille et Bardonnex » (et le faire passer où? A la place des voitures? Excellent! On va donc fermer le village, enfin… et Plan-les-Ouates va devenir le Zermatt genevois? Pourquoi pas, au fond?) Ah si! Tout de même un argument développé: «le CEVA fera la valeur des appartements de Champel (…) au lieu de s’effondrer…» Là, je suis soulagé, le CEVA va donc servir à quelque chose: maintenir le statut immobilier de Champel. Si l’on pouvait me présenter des arguments un peu moins débiles en faveur du CEVA, cela m’intéresserait? J’en cherche depuis longtemps…
Plus sérieusement, si le CEVA était conçu comme un métro circulaire avec plusieurs arrêts entre la Praille et les Eaux-Vives (au lieu d’un seul, pas forcément le plus utile, à Champel), et ensuite relié à Cornavin par une traversée de la Rade, il aurait toute son importance et sa pertinence, je vous l’accorde, et je soutiendrais ce projet mordicus (sous lacustre, la traversée, si possible...) Mais CEVA, rappelons-le, est un projet des CFF qui a pour but de relier le réseau nord au réseau sud et sur lequel Genève croit pouvoir se greffer à bon compte pour résoudre son problème de trafic, transfrontalier entre autres. Association d’intérêt où seuls les CFF sont gagnants. Car Genève se trompe sur deux plans: d’abord, le projet sera au moins deux fois plus coûteux qu’annoncé, tant dans sa réalisation que dans son exploitation, déjà prévue déficitaire – Genève s’est engagée à combler les déficits annuels d’exploitation (les citoyens en sont-ils informés?), preuve que le CEVA ne résoudra rien et que les autorités le savent; ensuite, le projet est inefficace à remplir les objectifs pour lesquels il a été conçu. Qui m’expliquera clairement comment le fait de relier la Praille aux Eaux-Vives pourrait régler le problème du trafic transfrontalier alors que ledit problème se situe essentiellement aux entrées du canton, à Bardonnex et à Meyrin principalement, mais aussi à Thônex, et à tous les petits villages en bordure du territoire. Demandez aux habitants de Soral, de Chancy, et je ne parle pas de ceux de Plan-les-Ouates, ou expliquez-leur comment le CEVA va améliorer leur situation! Mais justement, on ne veut surtout pas leur demander, comme on ne veut pas faire voter les Genevois de peur qu’ils ne découvrent l’inanité du projet. Relier la Praille à Bardonnex avec un P+R (d’autant plus avec la construction de l’autoroute d’Annecy) relève de l’évidence pour celui qui dispose de trois neurones et d’une once de bon sens, et qui connaît bien la région Perly Plan-les-Ouates. Je me demande comment les défenseurs du CEVA expliqueront aux Genevois, si le projet se réalise, son coût réel astronomique (et non pas celui budgété) et, surtout, son incapacité à remplir les objectifs pour lesquels il a été déterré là où il dormait depuis un siècle – il pourrait au contraire péjorer la situation par un encouragement au trafic à la Praille, par Perly, via Plan-les-ouates, ou par Troinex, et aux Eaux-Vives par Thônex Chêne-Bourg –; de la même manière, et pour les mêmes raisons, que l’autoroute de contournement de Plan-les-Ouates n’a pas résolu les problèmes de trafic dans le village-même, comme cela avait été pourtant annoncé à grands coups de prophéties ridicules par quelques Philippe Souaille de service...
Enfin, notre blogueur prétend que les adversaires de CEVA «sont décidés à tout faire pour déclencher (!) son avortement». Ne confondons pas! D’un côté, il y a ceux qui sont décidés à tout faire pour que le projet passe en force sans consultation par les urnes; de l’autre, il y a ceux qui sont décidés à tout faire pour que la discussion vienne sur la place publique et que la question soit tranchée en votation. De quel côté placez-vous les fossoyeurs, de quel côté les garants des fonctionnements démocratiques élémentaires? Une décision aussi importante, et qui engage la politique des transports du canton pour des décennies, mériterait bien un débat public. Non? Expliquez-moi alors pourquoi les partisans politiques (Robert Cramer en tête) et économiques du projet font tout pour l’éviter. Poser la question, c’est aussi y répondre…
Je précise que j’écris en citoyen franc-tireur, que je ne fais partie d’aucune association en relation avec CEVA et que, si je suis né à Plan-les-Ouates, je n’y habite plus depuis dix ans…