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  • BIVER, printemps, été, automne

    Par Pascal Rebetez

     

    On ne voit que lui dans la presse ces derniers jours : Marc Biver. On le couvre de lauriers, on l’admire, on vante ses capacités extraordinaires, on l’invite à la rédaction, lui et ses montres. On est si bon avec lui, l’ancien manager d’Astana, équipe cycliste kazakhe de Vinokourov et de Kashechkin, exclus du récent Tour de France pour dopage avéré. Mais il a payé. Et puis c’est si vieux. Allons de l’avant !

    Or donc, Biver en juillet quitte le Tour, la tête basse de tant d’avanie, couvert de la honte du tricheur et patatras, deux mois plus tard, tel le Phénix, il réapparaît en « people » lissé comme son crâne. Et mieux même, il fait la « une », est l’invité des rédactions qui paraissent avoir, face à la mémoire immédiate, le réflexe du four autonettoyant.

    Question à deux roues et une injection d’EPO : combien de montres a-t-il prévues dans le budget Hublot pour les relations publiques, d’autant que la marque horlogère est le partenaire officiel de l’Euro 2008 ?

  • Lettre ouverte à Monsieur B.

    Par Sylviane Dupuis

    Vous êtes, Monsieur B., un « grand professionnel » de la politique : cela, même vos ennemis s’accordent à le reconnaître. Vous avez pour ce faire l’intelligence et tout l’argent qu’il faut. Mais justement. Je vous ai écrit une première fois il y a huit ans, Monsieur B., pour vous dire tout le mal que je pensais de votre projet d’entrer au gouvernement, et dénoncer « un système parfaitement programmé, une stratégie parfaitement sous contrôle, là où d’autres ne veulent voir que la sincère défense de convictions ». Depuis, vous avez raté votre premier putsch, mais réussi le second, le « système B. » a parfaitement fonctionné, vous êtes partout, vous êtes la Vedette, votre ego enfle de jour en jour comme celui de la grenouille de la fable, bientôt vous paierez pour qu’on confectionne des chocolats à votre image – et demain, en dépit de vos dérapages, de vos méthodes nauséabondes et des innombrables preuves données, en quatre ans, de votre mépris du droit, de la collégialité, voire même de la Constitution, vous vous retrouverez peut-être président de la Confédération. J’aime encore mon pays, Monsieur B. Je ne me fais pas à l’idée qu’on détourne à son profit la démocratie avec un tel culot. Je vous écris pour vous dire à nouveau que « je ne marche pas ».

    Est citoyen, pour Aristote, qui a part au fait de gouverner et d’être gouverné. Ma qualité de citoyenne me donne donc encore, pour le moment, le droit de refuser publiquement d’être gouvernée par vous. Pour le moment : car quand vous serez devenu notre Grand Guide avec l’assentiment de tous et que chacun sera susceptible à tout moment et au moindre signe de différence de se voir étiqueté « mouton noir »… il sera trop tard pour parler. Or l’exercice de la parole publique est (toujours selon Aristote) l’autre faculté propre au citoyen.

    Je vous dois un aveu, Monsieur B.: depuis huit ans vous êtes devenu ma bête noire, mon obsession. Depuis huit ans, à chaque premier août, je constate l’augmentation du nombre d’activistes d’extrême droite (on sait qu’en dix ans ils se sont multipliés par dix en Suisse) sur la prairie du Grütli – et donc, la montée de la haine ; à chaque nouveau texte de propagande financé par un « richissime sponsor anonyme » que votre parti adresse aux habitants de ce pays, ou encarte à grands frais dans les quotidiens, je m’étonne de la quasi indifférence générale ; comme, à constater année après année la progression irrésistible de ce parti, je mesure celle de l’aveuglement et de l’oubli de l’histoire… Mais parler de B. c’est encore lui faire, paraît-il, de la publicité ; depuis huit ans, chaque fois qu’il est question de vous, je fais mon poing dans ma poche.

    Or, depuis peu, les choses ont empiré : vous m’empêchez de dormir. Quand je compte les moutons, il y en a toujours un qui ne passe pas et c’est par votre faute : je pense à votre affiche et ça y est, je ne vois plus que le mouton noir ! Et puis cela vire au cauchemar parce que soudain le mouton noir a votre tête, Monsieur B., et qu’elle se met à grimacer affreusement, à invectiver tout le monde et à crier au complot.

    Depuis peu, je ne dors plus, mais mes cauchemars ont du bon : ils m’ont appris que vous étiez notre mouton noir, Monsieur B., et que vous aviez entrepris, lentement mais sûrement, de nous contaminer. A ceux de mes concitoyens qui résistent encore à votre « système » (en dépit des haussements d’épaules qui déjà succèdent aux alarmes), et quelles que soient par ailleurs leurs convictions, je suggère de vous écrire à leur tour pour dire NON à tout ce que vous incarnez. Définitivement. Ou bien vous aurez eu raison de nous traiter, sur vos affiches, de moutons stupides.


                                                                ©  Sylviane Dupuis, écrivain – Genève

     

  • Valdinho ou Teodoro? Vivre ou se préserver ?

    Pierre Béguin

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    Valdinho, le jeune voyou libertin et succulent, premier mari de Dona Flor dans le roman de Jorge Amado Dona Flor et ses deux maris, m’a toujours semblé une parfaite représentation du désordre, de l’anarchie festive, de la gaieté spontanée de l’Amérique latine. D’une certaine partie de l’Amérique latine du moins. Son second mari, le docteur Teodoro, bon bourgeois sécurisant mais insipide, ennuyeux comme sa retenue et sa prudence, m’apparaît au contraire comme l’incarnation même de la rationalité et de la sagesse occidentale. Dona Flor n’oubliera jamais Valdinho qui phagocyte peu à peu tout l’espace de ses fantasmes pour en expulser le bon Teodoro.


    Vivre ou se préserver?


    Je me souviens du récit que me faisait un ami de son voyage aux Galapagos depuis Guayaquil, dans un petit bateau à moteur secoué par la houle. Une dizaine de touristes s’était embarqué. D’un côté, un groupe de sud-américains festifs, bavards, buvant de l’aguardiente et riant aux éclats, vivant intensément ce qu’ils considéraient comme un moment fort de leur existence. De l’autre, mon ami et sa copine, Suisses bon teint, prévoyants, assis sagement à l’intérieur du bateau en suçant des pastilles contre le mal de mer, anxieux des conséquences possibles du bercement des vagues. Quelques heures plus tard et jusqu’au lendemain, les sud-américains penchés au bastingage, vomissant tripes et boyaux, d’un côté; de l’autre, les deux Suisses contemplant les rivages des Galapagos, l’estomac bien en place, la conscience joyeuse et dédouanée des frustrations initiales par la satisfaction de la vengeance.


    Pour mon ami, aucun doute: l’épilogue justifie le choix frustrant du début en même temps qu’il illustre les raisons de la richesse nord-occidentale: la capacité de prospection, la faculté d’anticiper les problèmes et d’assumer les frustrations qui en découlent. Pas sûr! Moi, en tout cas, je n’hésite pas: entre Valdinho et Teodoro, je choisis le premier. Je choisis la capacité d’anarchie irraisonnée, de joyeux désordre, d’exaltation de l’instant, d’oubli de tout ce qui ne constitue pas le moment présent. Je le choisis aux dépens de cette conscience exacerbée du lendemain, cette ennuyeuse prudence, cette anticipation angoissée de l’avenir… Mais mon choix reste pure abstraction, sans effet sur mon quotidien: l’atavisme, l’éducation, la culture helvétique forment un carcan trop étroit contre lequel s’épuisent mes velléités rebelles. Pourtant, vrai! J’aurais aimé cette périlleuse exaltation, cette gratuité festive, cette énergie gaspillée sans calcul, ces plaisirs alimentés par l’insécurité, que je n’ai vraiment vécus qu’entre 25 et 35 ans. A cette époque, cet ami n’était pas en reste. Epoque bénie! Mais nous avons opté, comme tous ceux qui affrontent le temps, pour l’idéal petit bourgeois de prudence, de réserve, de sagesse, d’anticipation, jalonné par l’interminable liste de nos devoirs stériles. Nous avons oublié Valdinho pour devenir Teodoro. Adieu désordre et gaieté!


    Par mes romans et mes nombreux voyages outre atlantique, j’ai essayé de retrouver Valdinho.  Je le retrouve encore dans la littérature latino-américaine où déborde – quelques exceptions, dont Borges, mises à part – cette anarchie jubilatoire que j’aime tant. Littérature essentiellement baroque. Peut-on rendre compte autrement que par l’excès de métaphores, d’adjectifs, de subordonnées, la spontanéité festive et anarchique de ce continent? Pour le retrouver, il me reste surtout, et c’est beaucoup, ma femme, colombienne garantie d’origine, qui incarne parfaitement ces caractéristiques sans lesquelles ma vie ressemblerait un peu trop à Teodoro. Mais, bon sang! ce que son désordre peut m’énerver!
     

     

  • Olivier Chiacchiari

    Tous les espaces d'écriture sont bons à prendre

     

    A notre époque, si l'on souhaite rester en contact avec ses contemporains et préserver une vie sociale digne de ce nom, il faut réunir trois conditions essentielles: un téléphone portable toutes options, une connexion internet haut débit, et un blog en ligne. Oui, un blog, ça m'a étonné dans un premier temps mais tous les spécialistes s'accordent désormais pour le dire.
    Alors évidemment, quand l'opportunité s'est présentée de créer mon propre espace virtuel sur la grande toile de la communication électronique, j'ai décidé de plonger. Mais pas tout seul. Car si blogger en solo peut entretenir la vie sociale, blogger à plusieurs doit l'exalter, vive le blog échangiste !
    C'est ainsi qu'on se retrouve à quatre compagnons de plume pour entamer cette modeste aventure, avec le sentiment d'appartenir à un fait planétaire. D'où l'émotion d'apporter aujourd'hui mes première lignes à l'édifice.
    Espérons que le courant électrique nous sera propice, que les pixels seront au rendez-vous, et que nos interventions auront la chance de rencontrer de nombreux… heu… lecternautes ?

    Biographie

    Olivier Chiacchiari est né à Genève en 1969. Il est l’auteur d'une quinzaine de pièces de théâtre, dont plusieurs ont été créées en Suisse romande - notamment à la Comédie de Genève par Claude Stratz - et en France.
    Prix du dialogue au Festival du film de Soleure pour Sale Histoire en 1997, prix de la Société Genevoise des Ecrivains pour La Cour des Petits en 1998 et prix Welti (Berne) pour La Mère et l'enfant se portent bien en 2007.
    Il écrit également pour la radio et la télévision.

     

    Bibliographie
    La Mère et l'enfant se portent bien, Editions de l'Aire, 2006.
    La Preuve du contraire. Editions Zoé, 2003. Traduction italienne, SSA, 2005.
    Les Passeurs, in De Mémoire d'ondes - Mémoire et résistance à toutes les formes d'infamie. Editions Lansman, 2000.
    Traductions allemandes de Sale Histoire et du Drame, SSA, 1999.
    La Cour des Petits suivi de Sale Histoire. Editions Zoé, 1998.
    Le Drame. Editions Zoé, 1997.
    10 - Le Livre des Machines suivi de Nous le sommes tous.
    Editions l'Age d'Homme, 1996.

  • Pascal Rebetez

    Le Club des Cinq, voilà à quoi me fait d’abord penser cette histoire de blog à quatre. Les aventures écrites par Enid Blyton dans la « Bibliothèque rose » baignèrent de leur ambiance bretonne mon entrée dans le monde magique de la lecture et donc, par accoutumance progressive, dans la littérature. Les gamins d’alors étaient quatre et il y avait un chien, comment s’appelait-il ? ah oui Dagobert, me dit Wikipedia.

    Que vient-on faire dans cette blogosgalère ? A quelles énigmes seront-nous confrontés ? A quelle sauce mangés ? Qui d’entre nous s’occupera de la gestion des doggy bags ? N’est-ce pas encore une manière de tirer la couverture ou de mettre sa culotte à l’envers comme ce roi mérovingien débauché ? Tout ceci est palpitant et nous amène à frémir du museau et frétiller de la queue dans l’attente du prochain épisode.

     

     

    Pascal Rebetez est né en 1956 dans le Jura. D’abord comédien, il est aussi journaliste et présentateur de télévision, éditeur à l’enseigne des éditions d’autre part (www.dautrepart.ch) et écrivain. Parmi ses treize livres publiés, il y a en 2006 Un Voyage central aux Editions de l’Hèbe et On m’appelait Judith Scott à la Collection de l’art brut.

  • Pierre Béguin

    pierre2b[1].jpgIl semblerait que la Tribune de Genève encourage des écrivains genevois à créer leur blog. Des écrivains genevois! Allez donc! Lisez leurs noms: un Valaisan pur fendant, un Jurassien grande gueule et un Italien à l’accent carougeois. Pas plus de Genevois que de sponsors au Servette! Constat doublement regrettable si l’on se souvient que, il y a bientôt cinq siècles, cette ville abritait en son sein une très forte équipe de théologiens, avec à sa tête un certain Jean Calvin, alors meilleur bûcher du championnat, et une horde de supporters qui, après chaque victoire, allumait des feux de joie aux cris de «Aaallez Servet, aaallez Servet, aaalleeez…!» Or, donc, (sic!) il fallait bien sauver l’esprit de notre glorieux passé. Je me suis dévoué, moi le Genevois calviniste, labellisé austère et garanti d’origine, avec la même précipitation qu’un politicien qui doit poser devant des caméras et, en plus, une arrière-pensée d’ethnologue désireux de mieux connaître sa propre ville. Le résultat fut particulièrement édifiant durant les séances de préparation: figurez-vous que le Valaisan boit, que l’Italien parle (le problème, c’est qu’il trouve également le temps de boire; je n’ai pas encore compris comment, mais je vous promets d’étudier le phénomène), et que le Jurassien, qui s’est subitement trouvé quelques heures de libre, s’en est retourné faire sécession dans le Jura. Pour peu que Servette et Delémont rejoignent Sion en Super League et que la Suisse batte l’Italie en compétition officielle, les futures séances de travail promettent des perspectives palpitantes (notez l’allitération; on ne se refait pas!). Mais pour cela, ce blog devra durer très longtemps. Vraiment très longtemps. Une bonne raison en tout cas pour lui souhaiter longue vie.

    Ah! J’oubliais, encore un mot: à partir de maintenant, ne perdez plus votre temps à visiter le blog d’Alain Bagnoud, il ne sera bientôt plus qu’une pâle copie de celui-ci. Préférez-lui l’original!

     

     

    Biographie

     

    Pierre Béguin est né à Arare – Genève – le 25 février 1953. Entre ses études – diplômé en Lettres et DEA en Psychologie et Sciences de l’éducation à l’Université de Genève –, et après ses études, il voyage beaucoup, un peu partout dans le monde, plus spécialement en Amérique latine qu’il arpente de long en large. D’un voyage au Chili, il tire son premier roman L’Ombre du Narcisse (Ed. L'Age d'Homme, 1993), d’un séjour de plusieurs mois en Colombie Joselito Carnaval (Ed. de L'Aire, 2000), d’une expédition en Amazonie et de rencontres avec des guaqueros – ces fameux pilleurs de tombes précolombiennes – Terre de Personne (Ed. de L'Aire, 2004) qui obtient la distinction de la Fondation Schiller en 2005. En 2007, en souvenir d’un fils décédé quelques jours après sa naissance, il publie Jonathan 2002 (Ed. de L'Aire), à la fois témoignage d’amour et récit initiatique qui pose les questions essentielles sur la vie, la mort et la responsabilité. Suivront en 2011 un recueil de chroniques Bureau des assassinats et autres coups de sang et en 2013 un roman largement autobiographique autour du thème de la mort assistée Vous ne connaîtrez ni le jour ni l'heure, aux éditions Philippe Rey, Paris.

    Marié, père de deux petites filles, il a enseigné jusqu'en 2012 la littérature française au Collège Calvin.

  • Alain Bagnoud

    img_0112.jpgUn deuxième blog ? Pourquoi faire ?

    Blog. J’en ai déjà un, personnel, choyé, entretenu. Pourquoi alors s’engager dans l'opération de concevoir un second avec d’autres personnes ?

    Mais d’abord pour l’échange. Pour participer à une création vivante, littéraire, interactive, avec des écrivains dont j’estime l’œuvre et dont j’apprécie le talent. Car c’est une chose d’agir seul dans son coin et c’en est une autre de dialoguer, de prendre appui sur d’autres personnes et d’autres textes, de pousser sa réflexion grâce à ça ou de polémiquer sur des sujets qui pourraient nous opposer.

    Ensuite par amitié. Ceux qui ont pu voir, dans les restaurants et les cafés, les fondateurs de ce blog en train de préparer sa mise en orbite savent que nous ne sommes pas quatre froids organisateurs liés par le calcul ou l’intérêt, dont l’ultime activité serait de peser les avantages et les inconvénients d’une telle entreprise. Que l’amitié est le point de départ de l'affaire, et ce blog l’une de ses manifestations, un prétexte pour nous retrouver, une manière de prolonger nos rencontres – et de puiser dans les ressemblances et les différences des autres une vivification de notre existence littéraire et sociale !

     

    Biographie

     

    Alain Bagnoud est né en 1959 en Valais. Il vit et travaille à Genève depuis 1978. Il est l’auteur d’un essai, Saint Farinet, et de cinq romans, tous aux Editions de l’Aire. Le dernier paru, La leçon de choses en un jour, inaugure un cycle d’autofiction qui devrait occuper plusieurs volumes. Il tient aussi depuis plus d’une année un blog personnel, Le blog d’Alain Bagnoud.