Scénaristes romands: le soleil se lève à l'Ouest !
Par Olivier Chiacchiari
Les scénaristes américains sont en grève depuis trois semaines pour tenter d'obtenir quelques dollars supplémentaires sur leurs droits d'auteur... Je soutiens sans réserve, car je me suis moi-même adonné à l'exercice du scénario il y a quelques années, ici, en Suisse romande, et c'est loin d'être mon souvenir le plus réjouissant.
Ce que j'ai pu constater, c'est que le scénariste - qui fournit le texte de base, la matière première sans laquelle rien ne se ferait - est le dernier à être considéré dans le processus de production et le premier à se faire évincer lorsque l'occasion se présente. Un rôle essentiel mais jetable, de crainte qu'il n'empiète sur la toute puissance du réalisateur.
Car si au théâtre, l'affiche mentionne: une pièce de, mise en scène par... au cinéma, elle affirme: un film de ! Point exclamatif final. Dont acte.
Voilà pourquoi les scénaristes les plus méritants finissent toujours par devenir réalisateur. Résultat, il y a pléthore de réalisateurs et pénurie de scénaristes. Là où l'affaire se complique, c'est que les producteurs sont friands de scénaristes qui ne réalisent pas, pour proposer des scénarios à des réalisateurs qui n'écrivent pas. Quadrature du cercle qui embarque des pelletées de jeunes recrues dans des galères démotivantes... peu importe, on en prend d'autres et on recommence !
Or, en Suisse romande, cinéma et télévision relèvent de l'artisanat, non de l'industrie, c'est la raison pour laquelle on devrait privilégier les relations humaines et les collaborations durables. La production y gagnerait, les spectateurs aussi. Mais la plupart des producteurs locaux refusent d'intégrer cette évidence, ils s'obstinent à suivre le modèle américain avec des moyens romands, alors ma foi...
Je lance un appel à tous les aspirants scénaristes: si vous aimez écrire, si vous avez une bonne histoire à raconter, écrivez un roman, une pièce de théâtre, une nouvelle, un poème, une chanson, un conte, mais pas un scénario ! Voie sans issue ! Et si vous persistez contre tout bon sens, alors bétonnez votre contrat et faites-vous rémunérer à la mesure de vos souffrances, car dans le meilleur des cas, le seul bénéfice que vous pourrez en retirer sera financier. Et vous ne l'aurez pas volé.