Deorum offensae diis curae
Par Pierre Béguin
«C’est aux dieux seuls à se soucier des offenses faites aux dieux».
Tel était le grand principe du sénat et du peuple chez les anciens romains. Et voilà pourquoi on n’y trouvait pas un seul homme persécuté pour ses sentiments (les martyrs chrétiens le furent avant tout en réponse à leur propre intolérance).
Mais le latin et sa culture se perdent. Dommage en ces temps de caricatures comiques ou de court métrage imbécile...
Commentaires
Rousseau dit que les chrétiens furent persécutés parce qu'ils mettaient un dieu au-dessus de Rome. Il donne d'ailleurs raison aux Romains, estimant que rien n'est plus divin, si l'on peut dire, que la cité. Mais en réalité, il y avait bien un dieu que les Romains ne supportaient pas de voir insulter: Rome même. Pour eux, Rome était plus sacrée que les dieux. Rousseau le répercute en assurant que les héros de la république romaine agissaient mieux que les dieux que Rome adorait. On a réellement martyrisé des juifs et des chrétiens parce qu'ils refusaient de regarder Rome comme plus importante que leur dieu, et qu'ils refusaient de sacrifier à Rome, en particulier à l'image divinisée de l'Empereur. En réalité, cela ressemble à ce qui se passe en Chine, Pékin demandant aux Tibétains de regarder la patrie chinoise comme plus importante que leur religion. Il faudrait donc dire aussi: insulter le drapeau, ou l'hymne national, cela regarde le génie de la nation au sens abstrait, le bon ange de la nation; quant aux hommes, ils n'ont pas à s'en soucier. Mais en France, par exemple, insulter le drapeau ou siffler l'hymne national, c'est un délit. La raison en est simplement qu'elle hérite à cet égard de l'ancienne Rome. Cela dit, quand cela arrive, on réagit mollement. Mais il y a des "valeurs" de la République qui apparaissent comme sacrées, et qui autorisent certains à bondir, lorsqu'on les critique. Ces "valeurs" étant aussi de simples préjugés nationaux, parfois.