Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Reynald Freudiger, Àngeles

Par Alain Bagnoud

 

freudiger_angeles.jpgDeuxième livre de Reynald Freudiger après La mort du prince bleu, Àngeles est une réussite.

D’abord la préface.

On ne fait plus de préfaces désormais, déplore Freudiger, qui les aime et du coup en pond une charmante. Il y parle de son titre, de la manière idéale de lire son recueil: chaque texte d’une traite. Idéal pour les pendulaires: un à l’aller, un autre au retour. Le livre leur propose ainsi une semaine de trajet.

Ces textes courts ne sont pas de nouvelles dans le sens traditionnel du mot. L’éditeur les annonce comme des récits, Freudiger leur préfère le mot de contes. Définissons tout ça. Je sors mon dictionnaire.

Un conte, c’est une « action de rapporter à quelqu'un un fait réel » ou un « récit d'aventures imaginaires destiné à distraire, à instruire en amusant ». Les deux définitions collent avec le projet de Àngeles. Le livre a aussi des affinités avec ce qu’on appelle le réalisme magique, qui se donne « généralement pour but de saisir une réalité avérée à travers la peinture quotidienne de populations latino-américaines ou caribéennes pour en révéler toute la substance fabuleuse, irrationnelle parfois étirée jusqu’au rang de mythe. » (voir ici).

Les histoires séduisantes et âpres qu’on trouve dans Àngeles se passent en Amérique latine, et mettent en scène des personnages communs (par exemple un Bolivien immigré) ou extraordinaires (un ange avec ses ailes bricolées). Ils reflètent une vision de ce continent poétique ou réaliste (les jeunes kidnappeurs), liée à l’Histoire (les dictatures) ou à un quotidien parfois violent (rapt, assassinats).

Il y a de l’humour aussi, sous-jacent ou au premier plan, comme dans ce récit où les passagers d’un bus voient une apparition: une tête barbue. Tout le monde identifie le Christ sauf le narrateur, en proie à une mission littéraire, qui tente de persuader les autres qu’il s’agit de Don Quichotte.

e13cfc36d3.jpgTous ces contes un peu baroques forment un univers cohérent, avec pour lien thématique et suspendu la présence des anges. A chaque fois, il s’agit de l’autre, de la manière de le voir, de le juger, de le comprendre, des variations aussi du regard qu’on peut avoir sur autrui.

C’est l’écriture également qui les unit. Leur composition se réfère à une esthétique cohérente. Les voix différentes qui parlent ont en commun un ton détaché, amusé, candide, qui prend de la distance avec les drames, les cruautés et les émerveillements, et distille une force contenue d’émotion. Présence d’un auteur qui maîtrise son récit et joue avec lui.

Reynald Freudiger est né en 1970. Il a voyagé en Amérique latine après ses études de lettres à Lausanne. « Là-bas, il s’intéresse de près au mouvement de fond qui, un peu partout sur le continent, porte alors la gauche au pouvoir. » (Culturactif) On le retrouve collaborateur à l’édition critique des œuvres complètes de Charles-Ferdinand Ramuz pour le compte du Centre de recherches sur les lettres romandes. Actuellement, il enseigne le français dans un gymnase et s’adonne à la critique littéraire – et à l’écriture.

 

Reynald Freudiger, Àngeles, L’Aire

 

Les commentaires sont fermés.