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Désir de néant

 


par antonin moeri

 

 

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Un étudiant en médecine a besoin d’argent. Il trouve un boulot de planqué: vidéo-surveiller ce qui se passe dans la gare, c’est-à-dire balayer un écran, débusquer une attitude ambiguë, signaler les bizarreries. Le narrateur adore plonger dans cet univers fascinant. Les types qui bossent avec lui tuent le temps à coups de bières et de cacahuètes. Il y a parfois des incidents: un homme s’effondre, une gamine coincée dans l’escalator, un couteau brandi, un molosse sans muselière. On passe allègrement du bureau de vidéo-surveillance à la chambre à coucher. C’est que la compagne du narrateur commence à trouver le temps long. Son compagnon n’est plus aussi attentif à elle. Il se sent observé, suivi, surveillé par un juge impitoyable. Il se crispe, mate les filles qui font pipi dans les toilettes publiques. Il sent la caméra s’enclencher quand il fait l’amour à sa compagne qui ne le reconnaît plus. Il finit par la cogner, sa copine qui va faire sa valise. Il ne veut surtout pas retourner à son existence terne d’étudiant en médecine. Il préfère désormais les écrans. Celui qui dit JE devient IL. Un Il qui devient cinglé, fracasse le crâne d’un collègue. Un Il qui finira psychiatre.

La chute est inattendue et drôle. Ce qui intéresse Decorvet, c’est le marigot où grouillent les pulsions inavouables, c’est l’intimité des êtres où l’enfer s’élabore, c’est la parade sans grandeur des égoïsmes rancis. Le récit «Sous surveillance» est habilement mené. Sa lecture ne laisse pas indifférent. On comprend pourquoi Anne-Claire Decorvet a choisi pour son premier recueil de nouvelles ce titre que je trouve très beau: «En habit de folie».

 

 

Anne-Lise Decorvet: En habit de folie, nouvelles, Editions Campiche.

 

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