Une rencontre avec Jean Chauma
Par Alain Bagnoud
Bu un café vendredi passé avec Jean Chauma.
Vous ne connaissez pas Jean Chauma ? L’auteur de Bras cassés, un roman singulier, sortant complètement des moules littéraires, et qui parle du milieu des voyous dans les années 70 (voir ici et ici). Il vient de sortir un dernier livre qu’il m’a donné vendredi. Poèmes et récits de plaine (Antipodes). Je vous en parlerai plus tard.
Quelques reflets, pour l’instant, de cette discussion. Car Chauma a des idées, une vision personnelle des choses et une expérience particulière. Il faut préciser, pour ceux qui ne connaissent pas cet écrivain, que c’est un ancien braqueur de banques et de bijouteries. Il passé une vingtaine d’années en prison, notamment dans des quartiers de haute sécurité.
Chauma parle du respect, par exemple, mot tellement à la mode. Lorsque j’étais un voyou, explique-t-il, j’étais respecté. Quand au contraire on se met à travailler, quand on devient honnête, on ne l’est plus. N’importe quel type que vous méprisez, qui ne vous vaut pas, peut vous abaisser, vous traiter comme un objet, a le droit de vous renvoyer de votre travail sans motifs s’il est votre supérieur hiérarchique. L’homme honnête est sans cesse humilié et offensé et il a bien du mérite à rester honnête.
Un deuxième thème qui m’a intéressé, c’est celui du langage. Les voyous, explique Chauma, n’ont pas de mots. C’est pour ça qu’ils sont libres d’agir.
Le monde autour d’eux n’existe pas, sinon comme décor. Ceux qui ne sont pas de leur milieu n’existent pas non plus. Quand on braque, explique Chauma, on ne demande aux victimes que de jouer le jeu, et on est très étonné s’ils résistent. Alors, s’ils prennent un coup de crosse ou une balle dans le ventre, c’est de leur faute. Ils n’ont pas fait ce qui était attendu d’eux.
Mais ça cesse, explique Chauma, quand on acquiert du langage. On n’est plus alors dans l’instinct, l’action, mais dans le discours, la réflexion. Et ça rend lâche. Si on commence à comprendre que les autres existent, à deviner ce qu’ils peuvent ressentir, à penser aux conséquences, on n'exécute plus rien.
Par exemple quelqu’un vous agresse. Soit vous réagissez immédiatement, avec les tripes, sans cogiter, et ça peut bien ou mal se passer, peu importe. Soit vous vous dites que l’autre va peut-être vous faire mal, qu’il est peut-être plus fort que vous, et vous ne faites plus rien. Le courage, dit Chauma, c’est l’apanage des brutes.
Je vous résume ça comme je l’ai retenu. Pour voir ces idées incarnées dans les textes de Chauma, vous avez Bras cassés. Ou Poèmes et récits de plaine. Ou, à paraître à la rentrée d’automne, Echappement libre, un roman noir dont l’éditeur dit déjà le plus grand bien. Tous trois aux Editions Antipodes (www.antipodes.ch).
Jean Chauma, Poèmes et récits de Plaine, Editions Antipodes
(Publié aussi dans Le blog d'Alain Bagnoud)
Commentaires
bonjour je suis le fils de onoria degliame. je voudrai savoir si vous etez son cousin jean claud.je vous ai laisse mon adresse msn pour que vous puissez me repondre. si vous voulez je vous donne le numéro de ma mere pour que vous puissez l appellé: 06.60.29.34.19. merci davance
Heureusement, j’ai eu l’occasion de me familiariser avec Jean Chauma et ses Bras cassées (un peu de zeugma si vous n’en êtes pas contre,). Mais une ignorance totale m’accompagne par rapport à ce nouveau bouquin dont je voudrais bien faire la connaissance. Merci pour ce pointage !
Article très intéressant. Merci.