Un puissant roman sauce chasseur
par Pascal Rebetez
Il y a des semaines gagnées par la grâce. Ces derniers jours, j’ai assisté dans le désordre à la splendide leçon de tennis de Roger Federer, à la fabuleuse victoire du Barça sur le Real, j’ai aussi aperçu deux daguets, jeunes cerfs dévalant une pente en lisière des mélèzes. Vision quasi surréaliste : l’ai-je rêvée ? On dirait un conte. Et puis on se rassure, c’est bien réel, grâce à une autre vision, celle du livre L’Embrasure.
Son auteur s’appelle Douna Loup, une Genevoise de 28 ans. Bon sang, quel souffle ! C’est bluffant de bout en bout, ça part de la forêt, ça s’en nourrit, ça passe dans les villes comme un renard, dans les usines comme une fouine et puis ça pousse dans l’amour, comme une plante de sous-bois. Ça se lit d’un trait halluciné, c’est beau comme un chant moldave, c’est bon comme un bol de soupe sur des lèvres gercées, toujours en équilibre entre la raison et les réflexes archaïques : c’est du grand art, déroulé cash. L’auteur arrive au tour de force de nous faire aimer le chasseur, de le suivre et d’aimer à notre tour les mystères de la forêt et des êtres au « sang chaud » qui la parcourent et désormais nous habitent.
Pour notre plus grand bien.
Douna Loup, L’Embrasure, Le Mercure de France, 2010.