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  • La Dame de la montagne (Olivier Beetschen)

    par Jean-Michel Olivier

    olivier beetschen,la dame rousse,roman,littérature romande,montagne,oirminaIl y a, au cœur du dernier livre d'Olivier Beetschen, La Dame rousse*, une légende fascinante : celle des « Fils de l'aigle », une famille au destin tragique (et glorieux) habitant une vallée perdue de l'Oberland bernois, dont les enfants, au XVe et XVIe siècle, s'illustrèrent comme farouches mercenaires lors des sanglantes batailles de l'époque. L'histoire de ces trois « fils de l'aigle » occupe la partie centrale du roman, ainsi que la légende de la dame rousse, une femme mystérieuse débarquant un jour chez les « Farouches », après avoir vaincu col et glacier en plein hiver, puis disparue dans la nature, et qui devint leur mère. Cette dame rousse — son fantôme — hante encore la région, comme l'imagination des voyageurs (et des romanciers).

    Cette légende, magnifiquement racontée par Beetschen (qui trouve ici une occasion de déclarer son amour à la montagne), obsède deux amis d'enfance, Luc Riesen et Alain Baud,  qui entreprennent une ascension périlleuse en revenant sur les lieux de la légende de Pirmina. Car La Dame rousse est aussi l'histoire d'une amitié entre deux hommes, malheureux en amour, qui se connaissent depuis trente ans. Alain Baud est guide de montagne, féru de de mythes et de légendes et possède un caractère bien trempé, tandis que Luc Riesen, sortant à peine d'un divorce douloureux, cherche un sens à sa vie, interroge la nature et reste fasciné par la légende que son ami lui raconte.

    Ces deux récits (la légende de Pirmina et l'amitié entre deux hommes) s'entrelacent de manière très subtile, égarant quelquefois le lecteur, qui perd le fil. On aimerait en savoir plus sur ces deux hommes, compagnons d'infortune, si différents et si proches l'un de l'autre, sur leur quête de sens, leur besoin d'affronter leurs limites et leur passion de la montagne. Si la légende des « Fils de l'Aigle » est menée à son terme (avec maestria !), dépliée dans ses moindres détails olivier beetschen,dame rousse,roman,littérature romande,montagne,légende(Beetschen a le sens, très rare en Suisse romande, de l'épopée et du symbole), et le récit de l'ascension évoqué dans une langue extraordinaire (précise, sensuelle et poétique), qui fait penser immanquablement à Ludwig Hohl, l'histoire de cette amitié virile laisse un peu le lecteur sur sa faim.

    Plusieurs figures féminines hantent ce beau roman de la désolation et du dépassement de soi : Christine, la femme séparée du narrateur, Julie, l'épouse d'Alain partie à l'aventure en Amérique, et la Dame rousse, bien sûr, la belle Pirmina, qui représente à la fois le mystère féminin et l'esprit de la montagne. La fée et le démon. La tentatrice, mais également la salvatrice. 

    Le roman se termine avec une autre femme, Edwige, rencontrée à la montagne et retrouvée, comme par enchantement, dans une bibliothèque de Fribourg. Quand Alain Baud était possédé par la folie de la montagne (et l'ivresse des sommets), Edwige aime s'enfoncer au cœur de la terre, dans les grottes, les crevasses, les glaciers souterrains. C'est là, d'ailleurs, dans les entrailles obscures de la terre, sous la peau des apparences, qu'elle entraînera Luc dans une dernière quête qui ressemble fort à une nouvelle naissance.

    * Olivier Beetschen, La Dame rousse, roman, l'Âge d'Homme, 2016.

  • Lecture à deux voix à la Galerie

     

    Mercredi 20 janvier à 19 h

     

    Sarah Olivier et Jean-Michel Olivier 

    liront des extraits à deux voix

    d'un roman à paraître

     

    Passion noire

     

    La Galerie, rue de l’Industrie 13, Les Grottes, Genève

     

    Entrée libre

  • Une farce éclatante (Guy Chevalley)

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    par Jean-Michel Olivier

    Le titre, à première vue, n'est pas très engageant : la cellulose est une fibre constitutive du bois, qui entre dans la composition du papier, mais que l'homme ne peut digérer. Pourtant Morlan, l'un des protagonistes de Cellulose* de Guy Chevalley, dévore un dossier, qu'il croyait perdu, pour éviter la honte de dire qu'il l'a retrouvé ! Cette crise de papyrophagie va bientôt toucher d'autres personnages du roman, comme dans une pièce de Ionesco où tout le monde est frappé de rhinocérite…

    On le voit : tout démarre sur les chapeaux de roue. Un employé sans histoire (et qui ne veut pas en avoir) se trouve brusquement pris dans un engrenage fatal, dont il ne se sauvera qu'en devenant lui-même un criminel. L'intrigue de Cellulose est un peu mince, mais diablement bien entortillée par Guy Chevalley, dont c'est le premier roman. L'essentiel est ailleurs : dans la galerie de personnages étranges et hauts en couleur ; dans le rythme du récit, qui est haletant ; dans la langue, enfin, de Chevalley qui frappe par sa justesse et sa verve.

    images.pngLes Chuques d'abord, Gustave et son épouse Éliane, obsédés par les poules qu'ils élèvent et les bonnes manières : un couple qu'on dirait droit sorti de Belle du Seigneur (les Deume), surprenant et coincé — si genevois.  Les van Driessche, ensuite, dont la femme, Isabelle, a quitté le domicile conjugal et abandonné ses trois insupportables rejetons au père irresponsable (très belle description d'un dîner au McDo!). Il y a enfin Lisa Knecht, une psy excédée par ses patients, sur lesquels elle balance une partie de son mobilier. Sans oublier un infirmier qui n'aime pas les femmes et quelques dirigeants d'entreprise qui croient faire votre bonheur en vous offrant une promotion que vous ne souhaitez pas…

    Cellulose commence comme une nouvelle de Gogol (Le Nez, par exemple), mais tourne bien vite à la farce, une farce énaurme, les personnages étant happés dans une spirale vertigineuse qui les entraîne loin de tout réalisme. Et cette farce, avouons-le, est éclatante de santé ! Quelle jouissance à brosser, puis à accompagner ces personnages à la fois singuliers et banals ! À chaque ligne, on revit le plaisir que l'auteur a goûté en les mettant au monde (et en scène). Il y a du souffle et du talent dans ce premier roman prometteur en diable.

    La première édition de Cellulose est épuisée, nous souffle son excellent éditeur Olivier Morattel. Ne ratez pas la seconde édition !

    * Guy Chevalley, Cellulose, roman, Olivier Morattel Éditeur, 2015.

  • Anne-Claire Decorvet, Prix Édouard-Rod 2015

    par Jean-Michel Olivier

    « La folie, écrit Michel Foucauld, c’est l’absence d’œuvre ».

    Il la compare à cette phrase paradoxale : "Je mens". Quand le fou parle, il dit quelque chose comme "Je délire". Comment peut-on délirer et, en même temps, dire de soi-même : Je délire ? Comment peut-on fixer les règles de son propre langage au moment même où l'on parle? Ce qui caractérise la folie, c'est qu'elle ne suit pas les mêmes règles du langage que le discours courant. Le fou a la capacité de parler une langue dont il définit lui-même les règles. Du point de vue du discours, il ne dit rien, c'est pure vacuité (absence d'oeuvre). Et pourtant cette « absence » donne l'essence même du langage dans le temps où il émerge.

     Comment dire la folie ?

    anne-claire decorvet,roman,un lieu sans raison,marguerite sirvins,art brut,bernard campicheC’est le défi que s’est donné Anne-Claire Decorvet. Un défi ancien, déjà, qui remonte à son premier livre, paru en 2010 chez Bernard Campiche, intitulé, comme par hasard, En habit de folie. Il s’agissait, dans ce recueil de nouvelles, de parler de folie ordinaire. S'appuyant sur des faits divers survenus ces dernières années, Anne-Claire Decorvet réussit à éclairer d'un point de vue nouveau et original quelques-uns de ces événements ayant largement défrayé la chronique. Qu'il s'agisse des déséquilibres mentaux engendrés par un travail de vidéo-surveillance,  des nuisances olfactives causées par une femme atteinte du complexe de Diogène, d’une mère infanticide ou de cet auxiliaire de santé qui entretient des rapports intimes avec des personnes handicapées, jamais l'auteur ne tombe dans les clichés ou les considérations banales. Elle cherche à chaque fois à pointer les limites de la raison ou de la déraison : ce moment subreptice où l’individu considéré comme « normal » bascule dans la folie.

    Comment dire la folie, donc ?

    Dans son dernier ouvrage, Un lieu sans raison — qui est son premier roman — Anne-Claire Decorvet décortique, une fois encore, la mécanique de la folie. Ou plutôt elle tente d’en dénouer les fils. La folie est un labyrinthe. Une toile serrée qu’on tisse chaque jour et qui finit par vous emprisonner. Au sens propre comme au sens figuré, puisque Marguerite Sirvins, l’héroïne du roman de Anne-Claire Décorvet, fut internée près de trente ans à Saint-Alban, un asile oublié de Lozère. C’est là, dans cet ancien château fort, que la folie se noue, qu'elle prolifère, contagieuse, d'interné en interné, qu'elle se sédimente, se pétrifie, à l'image de cet endroit clos et minéral. Avant leur entrée à l’asile, les « fous » ne le sont pas. « Gâteux, trisomiques ou rebelles », les familles s'en débarrassent. Puis le confinement fait le reste, surtout quand on est encadré par des sœurs de charité peu charitables.

    images-3.jpegDans ce roman à la texture intense, Anne-Claire Decorvet tire plusieurs fils. Il y a d’abord l’enfance de Marguerite Sirvins, qui n’est pas malheureuse, même si elle est marquée par des événements traumatiques (mort d'un petit frère à peine né, mort d'une collègue après un avortement, ravage de la Grande Guerre). Car Marguerite est fille de bonne famille, éduquée, élégante, libérée (elle travaillera dans une boutique de mode à Paris). Mais déjà pèse sur elle l’ombre rigide de sa mère, incarnation d’un sur-moi écrasant. La voix de Marguerite, qui parle à la première personne au début du roman, va éclater, se diffracter en plusieurs voix intérieures, premier signe de schizophrénie. Mais ce qui causera le basculement dans la « folie », c’est une liaison avec un homme marié — passion qui habitera Marguerite toute sa vie. Et nourrira son éternel rêve d’amour, d’union charnelle, réalisé dans sa fameuse robe de mariée.

    À 40 ans, Marguerite est internée à Saint-Alban. Elle n’en sortira plus jusqu’à sa mort, en 1957. Pendant des mois, Anne-Claire Decorvet a mené une enquête minutieuse, interrogeant les membres de la famille de Marguerite Sirvins, étudiant les archives de Saint-Alban, questionnant les médecins et le personnel de l’asile. Pour tenter de comprendre, de l’intérieur, la genèse de ce dérèglement. D’où vient la folie ? Est-ce une maladie de l’âme ou de la société  Ne serait-ce pas plutôt les asiles qui produisent la folie, comme les prisons produisent les criminels ?

    Ces questions, Anne-Claire Decorvet se les pose et nous les pose, bien sûr. Elle nous raconte aussi l’histoire de Saint-Alban, asile dirigé par des religieuses, qui accueillit longtemps les parias de la société, avant de donner refuge aux maquisards pendant la Seconde guerre mondiale, puis aux artistes résistants comme Paul Éluard, qui donne son titre au roman d’Anne-Claire Decorvet. Enfin, après la guerre, Saint-Alban va devenir une sorte de laboratoire pour les médecins proches de l’antipsychiatrie. Les conditions d’hygiène seront améliorées. Les malades jouiront de meilleurs soins et d’un peu de liberté.

    Comment dire la folie ?

    Le fou, c’est l’autre, celui qu’on ne comprend pas, ou celle qui se comporte bizarrement. À chacune des étapes de sa vie, Marguerite Sirvins sera diagnostiquée. Et à chaque fois, différemment, bien sûr. Non pas que sa « maladie » évolue ou empire : c’est le regard de l’autre, du médecin, du juge, qui change. Finalement, le diagnostic de schizophrénie va tomber, abrupt, définitif. C’est alors que le « je » disparaît du roman. Marguerite se perd dans le brouillard de ses identités. Elle ne sera plus évoquée qu’à la troisième personne.

    « Un vide égaré quelque part entre le mur et le mur, celui de la salle de jour et celui de la cour. Un vide enfermé dans un lieu sans raison! Quelqu’un pourrait m’appeler Matricule, encore une fois ce serait pure convention. Quel que soit le mot dont on me désigne, il tombera forcément à côté, je ne m’y reconnaîtrai pas. Matricule vous déplaît ? Parlez de Marguerite ou de moi, d’elles ou de nous, pour ma part je ne dirai plus « je ». »

    Ce roman d’une grande richesse et d’une profonde humanité relate une vie ordinaire qui bascule imperceptiblement dans la folie. D’où vient-elle, cette folie ? De la mère étouffante ? De l’amour déçu, puis rêvé pour un homme déjà pris ? De l’enfermement à Saint-Alban ? De la solitude ? Du silence ?

    Anne-Claire Decorvet ne tranche pas. Elle donne, dans son roman, la parole à la folie. Une parole assumée tout d’abord par un « je » raisonnable, lucide, doué de personnalité. Puis cette identité s’effrite, gagnée par la déraison, qui prend possession des lieux. Sans raison. Il y a dans ce livre des pages bouleversantes sur la vie des aliénés (comme on dit), les traitements inhumains (électrochocs, camisole chimique, insulinothérapie), la naissance de l’Art brut avec Jean Dubuffet, l’évolution de la psychiatrie, etc.

    anne-claire decorvet,roman,un lieu sans raison,marguerite sirvins,art brut,bernard campicheTous ces fils se rejoignent, en fin d’ouvrage, pour tisser cette robe de rêve qui a occupé Marguerite Sirvins pendant les dernières années de sa vie. Cette robe de mariée, qu’elle ne portera jamais, est créée selon la technique du point de crochet, avec des aiguilles à coudre et du fil tiré des morceaux de draps usagés.  Et cette robe de rêve, tissée des fils de la folie, est devenue un roman. Grâce à Anne-Claire Decorvet.

    À qui je suis heureux de remettre, aujourd’hui, le Prix Édouard-Rod 2015.

    * Anne-Claire Decorvet, Un lieu sans raison, éditions Bernard Campiche, 2015.

  • Le grillon du foyer (Olivier Sillig)

    images.jpegPar Jean-Michel Olivier

    Ça commence comme un conte ou un polar américain de série B : un minibus tombe en panne en rase campagne (un coin perdu de l’Aveyron), et John, le conducteur, un touriste anglais en vadrouille, ne sait que faire. Sa femme Helen l’a quitté deux jours plus tôt. Il ne connaît personne, ni rien de la région. Surgit alors de nulle part un bel adolescent qui l’aidera à pousser le minibus jusqu’aux Bains, où vit une communauté de marginaux. Cet adolescent — le môme — se prénomme Jérémie Crichon. Mais bien vite, pour tout le monde, il sera Jiminy — allusion au Pinocchio de Collodi et à Jiminy Cricket, la bonne conscience du pantin de bois.

    Au fil des jours, John va s’intégrer dans cette communauté qui compte une dizaine de personnes et vit en autarcie. Il y a des tensions, des conflits, comme dans toute société, mais Jiminy, en bon génie des lieux, trouve toujours le moyen de les régler. En particulier en couchant avec tout le monde, les femmes comme les hommes (« Jouir sans entraves » était l’un des slogans de 68 : il est ici mis en pratique). images-1.jpegC’est « un rayon de soleil ». L’incarnation, douce et joyeuse, du lien social. Grâce à lui, malgré les difficultés matérielles, la petite société tient le coup. Jusqu’au jour où un méchant agent immobilier vient reprendre possession du domaine où vivent les marginaux.

    Dans un style simple et efficace, qui supprime tous les adjectifs, Sillig parvient à donner corps à l’utopie communautaire de mai 68. Cette utopie repose en grande partie sur une totale liberté sexuelle — pierre de voûte de toute libération personnelle — incarnée par Jiminy qui virevolte d’un sexe à l’autre, donnant et recevant du plaisir de chacun, sans jamais se fixer avec personne, comme le parfait grillon du foyer.

    Bien sûr, la réalité va rattraper les doux rêveurs et le conte, à l’inverse de la plupart des contes de fée, se terminera mal. Dans la rage et le sang. Jiminy sera sacrifié sur l’autel des utopies, et exécuté. Quatre ans avant qu’un certain Robert Badinter n’abolisse pour toujours la peine de mort.

    Même si le livre est un peu long (pas mal d’anecdotes inutiles) et la fin, abrupte, il se lit comme une fable entendue dans l’enfance, avec émotion et une pointe de nostalgie.

    * Olivier Sillig, Jiminy Cricket, roman, l’Âge d’Homme, 2015.

  • Les années berlinoises (Anne Brécart)

    images.jpegpar Jean-Michel Olivier

    Il y a toujours, chez Anne Brécart, ce silence et ces glaces qui habitent ses personnages de femmes, ces atmosphères de brume, ces gestes à peine esquissés qui restent comme suspendus dans le vide. On retrouve ces couleurs et ce charme dans son dernier roman, La Femme provisoire*, son livre sans doute le plus abouti.

    Tout se passe à Berlin, dans les années 70 (ou 80 ?), dans cette ville à la fois ouverte à tous les vents et encerclée par un haut mur de briques. C’est le refuge, à cette époque, de beaucoup d’étudiants étrangers (turcs, mais aussi anglais, espagnols, suisses). Certains sont vraiment venus suivre les cours de l’Université. Les autres vivent de petits boulots. Mais tous sont là provisoirement. De passage. En transit. Comme l’héroïne du roman d’Anne Brécart qui vient rencontrer, à Berlin, une écrivaine allemande qu’elle essaie de traduire. C’est une femme blessée qui vient de subir un avortement et porte encore en elle le fantôme de l’enfant à naître. C’est aussi une femme libre qui vit seule, parmi ses livres, et qui rencontrera un bel amant de passage. Elle saura peu de choses de lui. Mais partagera un grand appartement avec cet homme qui vient d’avoir un enfant, et dont la femme a disparu.

    images-1.jpegLa narratrice se glissera dans la peau d’une mère absente. Elle s’occupera de cet enfant, comme s’il était le sien, et elle jouera parfaitement (un peu inconsciemment) le rôle de la mère provisoire. Avant de rendre cet enfant — comme dans le fameux film de Wim Wenders, Paris, Texas — à sa mère biologique. C’est cet enfant, vingt ans plus tard, qui viendra lui rendre visite, un beau matin, sans crier gare, et enclenchera le mécanisme du souvenir et l’envie d’écrire son histoire.

    Il y a beaucoup de finesse, et de mélancolie, dans ce livre doux-amer qui retrace le destin d’une femme libre, ouverte aux rencontres, qui se retrouve comme obligée (par amour, par humanité) de jouer des rôles qu’elle n’a pas choisis. Elle est une mère provisoire, comme une maîtresse provisoire, une étrangère de passage. Elle n’arrive pas à se fixer. Pourtant, comme on écrit sa vie, elle laisse des traces derrière elle, images, amours, sensations, regrets, qui un jour la rattrapent. Cela donne un beau livre qui accompagne longtemps le lecteur.

    * Anne Brécart, La Femme provisoire, roman, Zoé, 2015.

  • L'amour, quelle galère ! (Sacha Després)

    images-3.jpegpar Jean-Michel Olivier

    Il  y a une étrange poésie dans le récit intense et tourmenté de La Petite galère*, de Sacha Després. Le titre fait référence à une célèbre série américaine : La petite maison dans la prairie, qui mettait en scène, on s'en souvient, une famille à peu près parfaite dans les plaines de l'Ouest.

    Ici, bien sûr, c'est le contraire : Sacha Després (peintre, plasticienne) fait la chronique d'une famille à la fois ordinaire et poursuivie par le malheur. Les parents se sont rencontrés dans les années 80. Ils ont cru à l'amour fou, ont traversé tous les rites de passage du mariage, ont fait un enfant, puis un second pour essayer de sauver leur couple. Mais le malheur a frappé à la porte. La mère se suicide avec des somnifères. Le père déserte le foyer et se met à boire. Restent deux sœurs, qu'un écart de dix années sépare, qui vont vivre une relation très fusionnelle.

    images-2.jpegLa chronique douce-amère se transforme en roman d'apprentissage. Car l'aînée des deux sœurs, Marie, entreprend d'initier Laura, la cadette, aux ruses de l'amour. Elle va écrire au prof dont sa sœur est amoureuse des lettres enflammées, puis organiser un rendez-vous dans une loge de l'Opéra Bastille (scène chaude et très réussie). La grande sœur fusionnelle se révèle alors une manipulatrice de premier ordre. Et le malheur s'acharne sur La Prairie : Marie rencontre une sorte de traîne-patins, expert en beaux discours, Jack, qui peu à peu, à force de paroles lénifiantes et de fumette, va transformer la vie des deux sœurs en vraie galère. 

    Cette galère n'est petite que par litote : la fin du roman basculera dans la tragédie. Et c'est tout le talent de Sacha Després de décrire cette lente et inexorable descente en enfer avec des mots doux et précis, avec humour et sensibilité. Ce qui donne au récit (qui n'est trash qu'en apparence) un véritable souffle épique et poétique.

    L'auteur sera présente au Salon du Livre de Genève. Profitez-en !

    * Sacha Després, La Petite galère, roman, L'Âge d'Homme, 2015.

  • Une Liaison dangereuse (Marie Céhère-Roland Jaccard)

    images-4.jpegFaut-il répondre aux inconnus qui vous écrivent — surtout si ces inconnus sont des femmes ? Pourquoi répondre ? Et quelle attente, quel désir, quel espoir, s'empare alors des deux correspondants ?

    Tout commence par un échange de messages sur Facebook : Marie Céhère, jeune étudiante en philo, écrit à Roland Jaccard, nihiliste japonisant, pour lui dire simplement qu'elle apprécie les vidéos qu'il poste sur YouTube. C'est Marie, dans ce livre, qui lance la première flèche (ou la première bouteille à la mer). Le dandy lui répond, un peu désabusé. Commence alors une liaison virtuelle, haletante et poignante, que le lecteur découvre en live, si j'ose dire. Les courriels s'échangent à la vitesse de la lumière. On dirait une de ces parties de ping-pong dans lesquelles l'écrivain lausannois excelle. Ça va vite. Tous les coups sont permis (et même de dire la vérité). Chacun sert à son tour et tente de remporter le point.

    images-3.jpegOn assiste, en direct, à la naissance de quelque chose qui pourrait être l'amour, ou l'amitié, ou la tendresse. Une liaison dangereuse, quoi. Qui sait ce qu'il y a au bout des mots ? Au fur et à mesure du livre, les mails s'échangent de plus en plus vite, à toute heure du jour ou de la nuit, la fièvre gagne les deux épistoliers. Le philosophe américain John Searle dirait que le langage, ici, devient performatif, puisque les mots se réalisent (ils font ce qu'ils disent).

    Étrange expérience, aussi, pour le lecteur fasciné par cet échange fiévreux et qui se demande sans cesse ce qui va advenir aux amants-amis. Le suspense, dans ce livre, est presque insoutenable ! Il dure jusqu'au moment de la rencontre : une soirée mémorable dans un restaurant japonais avec un prof d'université, une étudiante lausannoise et lesbienne, Marie et Roland, qui se demandent ce qu'ils font là. On se sépare (ou pas) dans la rue. On se retrouve rue Oudinot. Ce qui arrive ensuite est leur affaire…

    Ces échanges passionnés occupent l'essentiel de ce bref et intense roman. Ils sont encadrés par des textes écrits au singulier par chacun des deux protagonistes. Marie se glisse dans la peau de Cécile de Volanges (en attendant d'être un jour Madame de Merteuil !) et Jaccard dans celle de Valmont. Et la liaison qui naît sous nos yeux porte tous les dangers : c'est le risque que courent les amants qui s'écrivent.

    * Marie Céhère et Roland Jaccard, Une Liaison dangereuse, L'Éditeur, 2015.

  • Le Jardin des muets (Trieste)

    par Jean-Michel Olivier

    images.jpegIl y a, près du port, un parc public appelé le Jardin des Muets.

    En partant de la ville, on descend vers la mer. On tourne à droite après la Poissonnerie, puis on remonte en direction de l’église San Giusto. Mais on ne va pas jusque-là. On entre dans un parc immense et silencieux que peu de gens connaissent. Il y a des frênes aux belles fleurs écarlates et des arbres de Judée.

    Mais ce qui fait le charme de ce jardin secret, c’est le silence qui y règne. Un silence de lecture ou de mort. C’est là que je venais lire ou écrire, loin des bruits de la ville, quand j’étais au lycée. On n’est jamais seul quand on lit un bon livre. On converse en silence avec les ombres. On voyage dans le temps et l’espace du rêve. On vit des aventures qui vous emportent au bout du monde ou vous font visiter votre ville, comme si elle était étrangère.

    Je voulais vous montrer ce jardin, Romano, c’est le jardin de mon enfance, mon refuge et ma joie.

    Un jour, était-ce fin avril ou début mai, je ne sais plus, nous quittons de bonne heure la librairie et nous longeons le Grand Canal. Un peu partout, les acacias en fleur sont déjà couverts d’hirondelles.

    Trieste est une ville de l’été et l’été, ici, commence au début mai et finit en octobre.

    Je cueille une branche de mimosa, je vous la donne et vous la respirez longuement, les yeux fermés, comme si vous récitiez une prière. Vous avez toujours été sensible aux fragrances, et celle-ci vous transporte.

    images-3.jpegOn croise alors Umberto Saba, son béret sur la tête et la pipe à la bouche. Il est appuyé sur une canne.

    Vous êtes impressionné, Romano, face au poète silencieux qui vous regarde avec ses yeux de bronze.

    Plus loin, il y a Italo Svevo, sa grosse moustache et son nœud papillon, qui semble regarder ailleurs, toujours, vers l’horizon brumeux. Un mauvais plaisantin a aspergé son buste images-4.jpegde peinture rouge. Alors on jurerait qu’il a reçu un coup de hache ou de marteau sur la tête.

    Vous cherchez Ezra Pound, le poète maudit. Il est caché derrière un cèdre noir, tout au bout de l’allée, dos au cimetière. Regard fou, cheveux en broussaille, moustache et barbichette mal taillées. Le Paradis, voilà ce que j’ai tenté d’écrire. Mais le Paradis du poète s’est brisé quelque part entre Venise et Trieste, la prison et l’asile psychiatrique. images-5.jpegLui qui considérait le sexe comme un sacrement et n’acceptait pas que l’Église touche l’argent destiné aux artistes et aux philosophes, il a fait vœu de silence depuis qu’on l’a accusé de trahison…

    Au détour d’une allée, je vous montre le buste d’un illustre anonyme. Ses cheveux noirs sont coiffés en arrière et collés sur son crâne avec de la brillantine. Il a une partition de piano sous le bras. Sa petite moustache lui donne un air joyeux. Détaché des réalités du monde. C’est mon grand-père Heinrich. Heinrich Peter Buchacher. Musicien amateur et photographe du Duce. Je lui lance un baiser de la main.

    Je vois que vous cherchez quelqu’un, Romano, dans cette crypte à ciel ouvert. Mais vous ne l’avez pas trouvé…

    « Et Trieste ! Ah Trieste a mangé mon foie ! »

    La nuit tombe déjà. Les portes du jardin vont bientôt se fermer. Il faut quitter le colloque des bustes.

    Mais vous n’écoutez pas et vous m’entraînez par la main.

    images-6.jpegDerrière une allée de cyprès, au milieu d’une pelouse, face à la mer qu’on entend murmurer, il y a un homme debout, son chapeau de guingois sur la tête, un bandeau de pirate sur l’œil gauche, une petite moustache, appuyé sur une frêle canne en jonc.

    « Ah ! Le voilà… »

    Vous approchez du poète irlandais qui a vécu et écrit ses plus belles pages dans cette ville, celui qui a réinventé l’odyssée quotidienne d’un petit juif de Dublin à la table des cafés de Trieste, entre deux leçons particulières d’anglais et ses cours de l’école Berlitz.

    « James Joyce ! »

    Il semble cligner de l’œil, nous inviter à boire avec lui un verre de pur malt et sourire de cette farce qui fait de lui un écrivain académique, coulé dans le bronze, lui qui n’a cessé de bouger, comme vous, Romano, l’exilé, l’étranger constamment au début de son histoire…

    Dans la vie, vos héros sont des artistes !

    J’entends des pas dans l’allée. Je vous prends par le bras, mais vous ne voulez pas partir.

    Vous êtes un étranger, Romano, arrivé clandestinement en Italie avec de faux papiers ! Vous risquez d’être arrêté, jeté en prison, refoulé dans votre pays…

    Deux carabiniers, en grande conversation sportive, débouchent de l’allée. Ils ne nous ont pas vus. J’empoigne votre bras et nous disparaissons sous les branches du cèdre. Je colle ma main sur votre bouche.

    Les pandores poursuivent leur ronde. Ils ne regardent pas autour d’eux. Ils continuent à s’engueuler. Qui va gagner le match de dimanche entre la Triestina et l’Inter de Milan qui occupe la tête du championnat d’Italie ? Est-ce que l’Inter va jouer avec Bruno Masta et Fulvio Nesti ? Dans ce cas, les Triestins n’ont pas l’ombre d’une chance…

    Je sens que vous avez envie d’ajouter votre grain de sel.

    Heureusement que les carabiniers sont loin !

    Leurs voix se perdent dans l’air du soir.

    Vous embrassez ma main et je vous laisse faire. Vous embrassez mon bras, mon cou, mes seins. Je ne fais rien pour arrêter votre fougue. Nous nous laissons glisser sur la pelouse, dans la nuit parfumée. Nos baisers n’ont pas de fin. Notre désir non plus.

    Joyce nous regarde en clignant des paupières. 

  • Opération Tandem à Casablanca

    par Bouthaïna Azami

    le360_fw_img_31021.jpgDans le cadre des tandems organisés par le Salon du livre de Genève et le Salon de Casablanca, j'ai eu le bonheur de dialoguer, ce dimanche 15 février, avec Jean-Michel Olivier, Prix Interallié 2010. Une plume et un univers dont on a le sentiment de ressortir grandi.

    Jean-Michel Olivier est reconnu pour être l’un des plus grands écrivains suisses de sa génération. Né à Nyon, il vit depuis trente ans à Genève où il se partage entre son activité d’enseignant et l’écriture. Auteur d’une vingtaine d’ouvrages, essais, livres autour de la photographie et de l’art contemporain, romans, Jean-Michel Olivier a reçu, en 2010, le Prix Interallié pour son romanL’amour nègre. Un roman qui, me confiera-t-il lors d’une rencontre dans le cadre du Salon du livre de Casablanca, marque un tournant dans sa carrière pour être très différent de ses précédents écrits.

     

    De La Dame du Fort-barreau à L’amour nègre

    Avec L’Amour nègre,  Jean-Michel Olivier quitte en effet la Suisse et, notamment, sa ville de Genève, son quartier des Grottes qui vous prend par la main et vous mène, dans Notre dame du Fort-barreau, à la rencontre de Jeanne. Jeanne, cette «sublime mendiante», «les cheveux en bataille, les bas mités, le châle qui part en filoche» mais qui a «cette flamme dans (les) yeux». Cette flamme, bouleversante, qui irradie de cette lumière émanant de ces être rares qui ont renoncé au monde sans pour autant cesser d’aimer les hommes. Qui ont renoncé au monde pour mieux aimer les hommes. images-8.jpegEt Jeanne, je l’ai croisée aussi. Nous avons de temps à autre échangé un sourire, quelques mots, dans ce quartier où j’ai vécu durant trente ans, comme Jean-michel Olivier, que j’ai dû certainement croiser aussi, sur cette fameuse rue du Fort-Barreau ou dans les ruelles de ce village des Grottes où tout le monde se retrouve finalement, dans les mêmes lieux, les mêmes cafés... Mais il aura fallu ce Salon du livre de Casablanca pour que la rencontre se fasse vraiment. Et l’univers de l’écrivain m’a d’autant plus touchée que la plume est juste; incisive, certes, mais sans jamais sombrer dans le pathos, car elle trempe dans cette encre dont seuls les Suisses ont le secret: une plume d’un amour et d’une générosité uniques qui se déprend de soi pour se prendre à l’autre, s’éprendre de l’autre. Se prendre à Jeanne qui va les bas troués, livrée à la cinglante bise genevoise; Jeanne sur laquelle d’aucuns se retournent comme sur une miséreuse «folle» et qui,en réalité, est la propriétaire de deux immeubles dans lesquels elle accueille ceux qui n’ont pas de lieu et parfois pas même lieu. Jeanne, qui fera visiter au narrateur,  qui n’est autre que Jean-Michel Olivier lui-même, un appartement dans lequel il s’installera comme dans un sanctuaire, tant la rencontre avec cette «fée» le prendra dans l’âme et la chair. Un sanctuaire, «Un oratoire» gorgé de mémoires à présent absentées qu’il traque, armé de son Nikon, tant elles hantent l’espace, imprègnent les murs. «Un oratoire» car, ces mémoires des lieux, Jeanne vient désormais lui en livrer les secrets, elle qui lui rend à présent visite chaque jour, s’annonçant d’un discret coup asséné à la porte de «la pointe du pied». Ainsi, elle lui racontera qu’un certain Vladimir Illitch –«Lénine, vous voulez dire?»- avait passé là «une soirée mémorable».

     

    Jeanne? «Une fée», «une amie». Pour d'autres, enfin pour ceux que ça arrange: «une folle». Comme pour ces épiciers qui la rabrouent, l’humilient en public tandis qu’elle cherche dans son porte-monnaie les pièces pour payer ses courses. Scène, prenante, à laquelle assiste, pétrifié, l’auteur-narrateur: «Pas un mot, pas un geste pour vous, Jeanne, qui m’avez tout donné. J’écoute et je reste impuissant, prisonnier de mon lamentable silence. Je disparais dans ce désert d’hommes et de femmes confondus dans une même lâcheté. La lâcheté des groupes et des troupeaux, des meutes de chiens.»       

    Et le narrateur d’entrer alors dans une culpabilité insurmontable, qui l’exilera de lui-même. Serait-il désormais de ces hommes, ces femmes, qui lui soulèvent le cœur? Non, car il a une conscience. Une conscience qui le ronge, à présent, au point de l’acculer au suicide. Tentative avortée par une femme qui le tirera des eaux du fleuve dans lequel il s’était jeté et se fera, après une aveugle nuit d’amour avec le narrateur, une sorte de vertigineuse métaphore de l’acte d’écrire. Un corps-à-corps où l’écrivain se perd, guidé comme malgré lui par une «vérité » qui le consume, dans laquelle il s’annihile comme pour mieux renaître à lui-même. Et ce livre qui vous invite, dès la page de couverture, à vous saisir de la main en heurtoir plantée dans la page bleutée pour frapper, de la pointe des doigts fondus à d’autres doigts, à la porte fermée sur d’édifiants émois.

     

    L’Amour nègre

    Quittons la Suisse. Pour mieux, finalement, y revenir. Jean-Michel Olivier s’en va, dans ce roman prenant, suivre les périples de Moussa, né «dans un village coincé entre la mer et un volcan éteint», en Afrique; né d’un père qui «avait dix épouses et une kyrielle d’enfants. C’était le seul et meilleur moyen qu’il avait trouvé pour ne pas travailler. Il passait ses journées sous l’aloès. Avec une calebasse remplie de vin de palme. (…) Le soir, il titubait d’une case à l’autre et distribuait des volées de Bambou».  Dès les premières lignes, c’est un couperet qui s‘abat sur le lecteur. Le décor est planté, saisissant de violence.

    images-9.jpegBientôt, Moussa, vendu par son père contre un téléviseur à écran plat, sera rebaptisé Adam par sa famille d’adoption. Nouvel homme promis au Paradis? Pas vraiment. Objet pour son père, Adam poursuit son destin de «nègre». Et nous ne sommes pas là dans la «négritude», digne et rebelle, d’un Aimé Césaire. Mais dans les acceptions les plus viles de ce mot «nègre». «Une insulte», dira Jean-Michel Olivier. Bien plus que cela, une violence, une absence dans le déni, un déni originel condamnés à des murs, ou barreaux, assassins, contre lesquels il s'en va se fracasser irrémédiablement se fracasser, aussi "blin-bling" soient-ils.

    L’Amour nègre?  L’amour de consommation, de substitution, l’amour-objet avilissant. Le nouvel Adam chutera dans les paradis artificiels d’Hollywood, ceux de Brad Pitt et Angelina Jolie auxquels l'auteur fait allusion. Et Moussa n’y trouvera pas sa place et passera de main en main, de pays en pays, dans un livre subdivisé en chapitres comme autant d’expériences cumulées du démembrement, de la dissolution de soi qui n’aura finalement d’autre alternative que de se faire siens les préjugés qui l’accablent et qu’il trimballe dans sa peau.

    Une vertigineuse dénonciation de cette nouvelle ère de la mondialisation négatrice et de la consommation à outrance qui ne fait qu'exacerber, de façon d'autant plus outrancière qu'elle revêt, sournoise, l'habit de l'hôte philanthrope. 

    Photo © Copyright : Brahim Taougar-Le360