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La controverse des voyages de maturité

Par Pierre Béguin

Lundi soir, au journal de Léman bleu, deux collégiens du Collège Calvin – une fille et un garçon comme il se doit – sont venus se plaindre des obstacles administratifs qui frappent maintenant les voyages de maturité, désormais limités au seul territoire suisse.

D’aucuns pourraient rétorquer qu’il s’agit là d’enfants gâtés qui devraient largement se satisfaire d’un beau voyage dans notre beau pays. Ce serait oublier ce que toutes et tous nous fûmes : franchir des frontières, aller voir au-delà, est une envie légitime à cet âge, et spécialement pour un voyage qui est avant tout un rituel de passage. Oublier aussi qu’il est des choses qu’on ne peut pas voir ni faire en Suisse, et que, à tout bien considérer, Paris, Munich, Milan ou même Florence ne sont guère plus éloignés (voire moins) en distance et en temps que le fin fond des Grisons. Oublier également que, pendant deux ans, les jeunes furent privés de sorties scolaires comme de divertissements. Oublier encore que des projets de voyages de maturité ont été mis sur pied avec enthousiasme et conjointement par des enseignants et des élèves, des projets qui tous se faisaient principalement en train, l’avion étant (définitivement ?) proscrit. Oublier enfin que ces projets, qui avaient obtenu le feu vert de la direction, ont été présentés à toute une volée euphorique, et que les inscriptions se sont tenues par voie électronique le premier week-end de juin…

Juste avant que le directeur, suite à une réunion du D11 (les 11 directeurs de collèges), fasse parvenir l’information que les voyages de maturité ne seront possibles qu’en Suisse. Motif officiel: le nombre de cas de Covid est à nouveau en augmentation et les prévisions pour cet automne sont plutôt pessimistes (les voyages de maturité ont lieu en fin d’été, trois semaines après la rentrée et des vacances où chaque famille est libre d’aller où bon lui semble… mais n’ergotons pas !). Les restrictions de déplacement sont donc reconduites par le DIP, sans concertation, sans qu’aucune autorité agréée – gouvernement ou task force – n’ait donnée des directives en ce sens, et sans que l’information n’ait clairement été ventilée dans les établissements. C’est peut-être là le principal reproche qu’on peut lui faire. Cette décision a été prise, semble-t-il, le 30 mai, alors que les élèves avaient depuis longtemps imaginé et conçu leurs projets. D’où leur mécontentement légitime. Pour le reste, la menace Covid n’est ni à surestimer ni à sous-estimer, et il me semble cohérent de la part du DIP de s’en préoccuper en prenant par avance les mesures qu’il croit adéquates, ou en anticipant celles que pourraient adopter nos voisins.

Toutefois, à titre personnel – cette opinion n’engage que moi – je pense que le Covid a bon dos. Je soupçonne le DIP d’avoir également peur de prêter le flanc à la critique en encourageant – ou simplement en autorisant – des voyages hors frontières auxquels on pourrait reprocher leur empreinte carbone, fussent-ils effectués en train. Pour dérisoire, voire absurde, que paraît cette posture, sur ce point du moins, je respecte la position du DIP. Après tout, elle est largement partagée par la jeunesse estudiantine, et il est logique – pour ne pas dire pédagogique – que cette dernière soit confrontée aux conséquences de ses choix, à plus forte raison quand lesdites conséquences limitent ses libertés.

Je me contenterai de préciser que ma fille aînée, en section bilingue au collège Calvin mais, depuis septembre dernier et jusqu’à fin juillet, effectuant sa deuxième année dans un gymnase allemand près de Stuttgart, est partie, elle et toute sa volée, en voyage scolaire en Pologne, alors que l’Allemagne, sans même parler de mesures sanitaires extrêmement strictes, est autrement plus pointilleuse que la Suisse sur les principes écologiques et l’empreinte carbone. Le DIP ne serait-il pas plus royaliste que le Roi ? Ou plus craintif que le plus pleutre de ses courtisans?

Mais il reste toutefois des décisions ou des prises de position que je ne lui pardonne pas. À commencer par son matraquage idéologique, au nom du Bien, en l’absence de tout recul critique et au mépris des conséquences sur le psychisme d’une jeunesse que le DIP devrait ouvrir à la complexité du monde, et qu’il ne fait que formater à sa vision la plus élémentaire. Permettre officiellement à des élèves, au mépris de règles sanitaires pourtant strictement imposées à l’intérieur des établissements, de sauter les cours afin d’aller manifester pour «sauver le climat et la planète», tout en s’enorgueillissant d’un tel engagement de notre jeunesse, fut un épisode lamentable – parmi d’autres – qui en dit long sur la gestion de ce département, et qui aurait logiquement dû entraîner quelques démissions, à commencer par celle de sa cheffe. Pour citer Thierry Godefridi*, père de Drieu: «Faut-il s’enorgueillir de ce que l’on fasse défiler des enfants ? Quand des enfants sont instrumentalisés en faveur de l’une ou l’autre cause, c’est généralement un signe de déliquescence pour l’Humanité. Que l’on se souvienne de ces défilés d’enfants dans les dictatures communistes et national-socialistes du siècle dernier (…) Il est facile de mobiliser des enfants quand on leur dit que la vie sur Terre est en voie d’irrémédiable extinction et qu’ils mourront dans les 10 à 20 prochaines années, à moins que l’on ne fasse quelque choses maintenant tout de suite avant qu’il ne soit trop tard». Et c’est exactement dans cet état d’anxiété avancé, finalement dénoncé par des psychologues britanniques, que ma fille cadette est sortie, à 13 ans à peine, d’un cours de géographie en 9e du CO où une enseignante très engagée, sur la base d’un article de La Tribune de Genève, lui avait prédit, pour ses 30 ans, au minimum huit degrés de réchauffement et l’Apocalypse. Qu’un département de l’instruction publique encourage ce genre de discours, condamne férocement toute opposition (certains enseignants ont payé très cher leur désaccord, et même leurs doutes) sans prendre en considération les dommages colatéraux d’un tel alarmisme sur le psychisme d’une jeunesse dont il a la charge, relève de la plus criminelle incompétence (les mêmes critiques pourraient d’ailleurs être formulées contre les médias dites «mainstream», à commencer par La Tribune).

L’année prochaine, Mme Emery-Torracinta aura terminé un mandat pour lequel elle fut accueillie comme le Messie et qu’elle quittera par la toute petite porte, au grand soulagement de tous. Pour le bien, et peut-être le salut de ce département – n’en déplaise à beaucoup d’enseignants – il est à souhaiter qu’un élu de droite en ait la charge, en vertu d’un tournus devenu désormais indispensable. Les électeurs, les partis et nos futurs élus auront-ils cette sagesse ?

 

* Ecologie et idéologie du climat, Palingénésie, décembre 2019

 

 

Commentaires

  • Les pauvres choupinets.... Cette génération qui voyage depuis touts petits en low cost connait mieux Paris, Barcelone ou Londres que Fribourg, Zurich ou Bâle.

  • Si votre fille désire devenir médecin - ou embrasser toute autre carrière demandant un début d'études médicales - qu'elle ne revienne pas à Genève, où un échec en première année peut lui coûter la possibilité, non seulement de se racheter en redoublant l'année, mais de se présenter à toute nouvelle tentative dans toute la Suisse et dans toute les autres branches médicales (recherche, dentisterie, etc.).
    J'écris Genève, car il est possible que la compétition (500 années cette année) y est peut-être plus féroce qu'ailleurs. Quoiqu'il en soit, je ne crois pas qu'il existe une autre formation où un premier échec vous oblige déjà à vie à renoncer à une future carrière.
    Il reste évidemment la possibilité, surtout pour ceux qui en "ont les moyens" de l'inscrire à l'étranger, de préférence dans une université privée qui ne vous oblige pas nécessairement à changer de langue.

  • Attendez que M. Dal Busco s'en mêle: ce sera en Suisse et à vélo.

  • Merci M. Béguin pour ce texte d'une lucidité parfaite. Deux de mes petits-enfants sont actuellement au collège et, heureusement clairvoyants, résistent au conditionnement écolo dont ils sont victimes depuis l'école primaire.

  • Merci M. Béguin pour ce texte d'une lucidité parfaite. Deux de mes petits-enfants sont actuellement au collège et, heureusement clairvoyants, résistent au conditionnement écolo dont ils sont victimes depuis l'école primaire.

  • Merci M. Béguin pour ce texte d'une lucidité parfaite. Deux de mes petits-enfants sont actuellement au collège et, heureusement clairvoyants, résistent au conditionnement écolo dont ils sont victimes depuis l'école primaire.

  • Merci M. Béguin pour ce texte d'une lucidité parfaite. Deux de mes petits-enfants sont actuellement au collège et, heureusement clairvoyants, résistent au conditionnement écolo dont ils sont victimes depuis l'école primaire.

  • "Attendez que M. Dal Busco s'en mêle: ce sera en Suisse et à vélo."
    Et pas de cervelas ou de jambon pour les pique-niques!

  • La FAPES2 (faîtière des associations de parents d’élèves de l’enseignement secondaire II) et des élèves de 3ème année ont lancé une pétition intitulée “Contre l'interdiction des voyages de maturité à l'étranger. Signez-là vous aussi (déjà 892 signatures):
    https://www.change.org/p/pétition-interdiction-voyages-matu-à-l-étranger?signed=true

  • Ce que vous nuos dites là rejoint exactement cette citation de John Lydon, ex Sex Pistols qui nous explique que des nos jours c'est la droite qui est cool et que les gauchistes actuels sont les vrais fascistes:

    "I never thought I'd live to see the day when the right wing would become the cool ones giving the middle finger to the establishment, and the left wing become the sniveling self-righteous twatty ones going around shaming everyone."

    John Lydon aka. "Johnny Rotten" The Sex Pistols

  • Le truc avec les idéologies plus ou moins totalitaires et méthodologiques telles que le marxisme et autres subdivisions, sont qu'elles veulent administrer leurs préceptes en ce basant sur une application d'une théorie.

    Mettre en application une théorie, si séduisante soit t'elle.

    Cela ne peut se faire que par le biais d'une soumission totale, d'un contrôle sans limite.

    La gôche est bizarre, mais ce n'est pas la seule idéologie à tendance politique qui a foiré, nombre d'ex-civilisations étaient là pour l'attester. A chaque fois ces "empires" préconisaient des solutions imparables et d'apparences incontournables et à chaque fois ça a foiré !

    Ces mouvements d'exacerbations aigües s'aggravaient au fur et à mesure de leurs déchéances "programmées", plus l'idéologie fondatrice d'une civilisation s'émoustillait et plus ses adeptes forçaient et mettaient en application les concepts ayant causés leurs pertes.

    Une différence cependant, toutes ces ex-civilisations étaient des monocraties basées sur un pouvoir unique, ce qui sans doute évitait bien des querelles superflues, mais, solidement basées sur des préceptes bancals finissaient inexorablement par s'effondrer quoi qu'il en soit.

    Nous sommes en plein "polythéisme" politique, cela ne semble rien apporter de concret dans les égarements que nos sociétés traversent, deux sortes d'extrêmes s'affrontent dans le même vide que celui présent dans les anciennes civilisations, cette sorte de schizoïdie cosmétique ne semble rien changer au niveau des fondamentaux, que faire ?

    Que faire, difficile d'en rajouter, mais que ne pas faire ?

    Il est urgent de ne rien faire !

    Laisser les plus fanatiques se fatiguer, les observer sans jugement, le regard extérieur suffit !

    Ils vont vite se fatiguer et il serait épuisant que mobiliser des forces pour vouloir les empêcher , ils ont déjà atteints leurs limites et vont soudain tomber dans leurs propres travaux de terrassements. Ils creusent encore, ils vont encore nous pondre quelques éoliennes et quelques vélos électriques, peuchère !

    En fait, ils rêvent inconsciemment d'une guerre, ils sont programmés pour ça, ça fait des millénaires qu'ils fonctionnent à coups de guerres et de destructions, là, sans doute, ils ont trop construit et la rentabilité se tourne du coté de la destruction, mais ça ne va pas se passer où leurs instincts les promettent. Il n'y aura pas de guerre, c'est exactement à ce quoi ils ne s'attendaient pas !

    A suivre

  • Pour contribuer à lutter contre cette idéologie en général, j'en profite pour rappeler à tous les lecteurs de télécharger, faire connaître et signer la pétition suivante pour s'opposer à la fin du cash en Suisse.

    C'est capital si on ne veut pas à l'avenir être suivi à la trace jusque dans la moindre de nos transactions et le moindre de nos achats.

    Je crois qu'il manque encore 60.000 signatures à réunir avant début 2023, donc le temps presse.

    Ayez toujours une ou deux feuilles de signature sur vous et parlez-en autour de vous, même et surtout à des inconnus, à des personnes âgées que cela concerne davantage, et, s'ils sont intéressés, laissez leur la feuille pour qu'ils la fasse signer d'autres. Voici le site:

    https://fbschweiz.ch/index.php/fr/bargeld-fr

    MERCI!

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