Eugène, Le livre des débuts
Par Alain Bagnoud
Eugène se tient au courant des mythologies urbaines. Son dernier livre convoque les images du monde, celles que nous apportent le cinéma, la littérature et les journaux. C'est une plongée roborative dans les imaginaires de notre époque.
Le livre des débuts convoque aussi nos fantasmatiques personnelles puisqu'il s'agit de rien moins que de finir virtuellement des romans dont le début nous est livré. Ils convoquent des lieux différents, des personnages qui semblent sortis des films de Kusturika ou des frères Coen, des constructions de suspense dont on ne peut s'empêcher d'imaginer la suite
Quelques exemples. Un coursier à vélo de New York transporte un cœur à transplanter. Soudain, des doutes l'assaillent. Ne s'agirait-il pas de celui de son père pompier ? Autre histoire : un mannequin ukrainien se fait recouvrir de chocolat suisse. Cette fille travaille pour financer ses études. On lui propose une somme faramineuse pour une nuit. Mais on précise : il ne s'agit pas de sexe. Cependant quand elle entre dans la pièce où elle gagnera cet argent, elle se dit que du sexe aurait été préférable. Préférable à quoi ? Chacun s'est déjà fait son cinéma dans sa tête.
C'est ainsi avec toutes ces nouvelles, ces débuts de roman. Chacun pourrait constituer un excellent départ de scénario. Les possibilités y sont indiquées, les lieux sont visuellement prenants, tout incite à l'imaginaire. Les indices qu'Eugène nous donne font de la fin de ces textes un moment où les possibilités explosent dans l'esprit du lecteur.
Ils constituent l'équivalent de ce qu'on appelle traditionnellement une chute, c'est-à-dire une surprise finale. C'est une chute plurielle, ici, un fourmillement soudain des possibles, amené avec virtuosité.
Eugène, Le livre des débuts, romans, l'Age d'Homme
Commentaires
Notre perspective d’analyse est axée sur le langage et l’écriture : quelle est l’incidence de l’inspiration spirite sur la constitution du texte ?