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Pierre-André Milhit, 1440 minutes

Par Alain Bagnoud

 

Pierre-André Milhit, 1440 minutes

Pierre-André Milhit, poète, s'est lancé dans un projet d'envergure un peu fou : écrire un poème pour chaque minute que compte une journée. 1440 minutes. C'est le titre du recueil, qui compte, donc, autant de poèmes, et donne un livre de 495 pages, épais et délicieux, paru aux éditions d'autre part.

 Milhit aime les contraintes et s'y est exercé dans ses deux derniers recueils, L'inventaire des lunes et La garde-barrière dit que l'amour arrive à l'heure. Dans 1440 minutes, il y frotte aussi sa fécondité.

 Chaque poème est constitué par six phrases, dont la dernière, et la dernière seule, commence par un je. Contrainte qui interroge l'inventivité du poète. Et de l'inventivité, Milhit n'en manque pas, joignant un don d'observation à des images savoureuses, sans clinquant, justes.

 On peut lire son recueil à la suite, pour apprécier justement cette créativité. On peut aussi se demander ce qui s'y passe à la minute que l'on vit. Tenez, il est maintenant 10 heures 06.

 

10 h 06 La colline est dans son bel hiver de vent et de grisaille. Un petit carré de vigne joue une saynète de printemps sous un maigre soleil. La mésange et le lézard font que c'est bien ça la vie. La chaille d'ardoise craquèle et suinte le réveil. Le tambour et le fifre s'exercent pour un prochain vignolage.

Je vais dire à Rilke que c'est l'heure de déguster la rèze.

  Pierre-André Milhit, 1440 minutesLe temps de recopier ça, et il est 10 h 11. On se retrouve une page plus loin (page 219).

  10 h 11 Il ressort de ce temps une fatigue extrême des animaux. On voudrait évacuer l'anxiété de la neige sale et du sérac effondré. La migration des rapaces a dû changer de trajectoire. Les jeunes filles de la ville renoncent aux fiançailles. Les jeunes hommes font la guerre aux infidèles et aux mendiants.

Je toise la fin du monde et lui dis de se taire.

  Pierre-André Milhit, 1440 minutes, éditions d'autre part

 

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