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Jean Chauma, Échappement libre

 

Jean Chauma, Echappement libreJ'éprouve une véritable fascination pour les livres de Jean Chauma, qui tient autant à l'univers qu'ils décrivent qu'à sa manière de l'explorer.

Il s'agit du monde des voyous, situé plus précisément dans les années 70, avec ses codes, ses personnages qui semblent sortis tous droits des films noirs d'Alain Delon. Ce qui n'est pas étonnant, si on en croit Chauma : l'acteur, qui s'inspirait du Milieu pour certains rôles, lui fournissait en retour certains comportements et certaines attitudes.

On a déjà beaucoup écrit sur ce thème des voyous, mais Jean Chauma a une façon unique de le traiter, qui tient sans doute au fait qu'il le connaît de l'intérieur. Chauma est un pseudonyme. Derrière ce nom d'écrivain, il y a un ancien braqueur de banque, qui a vécu la plupart de sa vie adulte dans des prisons et des quartiers de haute sécurité, avant d'abandonner le monde de la pègre.

Entre tous les textes de Chauma, son dernier roman, Échappement libre, paru chez BSN Press, est celui que j'ai préféré de lui. Sans doute parce qu'il me paraît le plus proche d'une vérité intime que l'auteur s'acharne à déchiffrer.

Dans ce livre, on suit la trajectoire de Dominique. C'est un roman de formation, qui explique pourquoi et comment ce jeune homme se retrouve un jour au poste de police avec ses complices, accusé d'avoir attaqué banques, postes et épiceries.

Cette carrière de voyou, Dominique la vit comme un destin et une vocation. Le livre s'ouvre sur une scène inaugurale, où on le voit, jeune fugueur de 15 ans, au sommet d'une passerelle, en train d'observer trois hommes qu'il imagine être des truands et qu'il aimerait rejoindre. Puis de courtes scènes déroulent sa vie, alternant trois époques.

Dans celle qui est la plus ancienne, il vit dans une loge de concierge avec son père et sa mère, dont il apprend un jour qu'ils sont en fait son grand-père et sa grand-mère. Et la dame parfumée, maquillée, aux longs talons aiguilles, qu'il appelait sa tante, c'est elle qui est en réalité sa mère, avec qui il entretiendra plus tard une relation ambiguë.

La seconde période raconte sa fugue à 15 ans et son insertion dans un monde louche par l'intermédiaire d'un restaurant fréquenté par la pègre et les putains. Il y devient plongeur, serveur, amant de la patronne et de ses amies qui entreprennent son éducation et en font un amant très satisfaisant.

Dans la troisième, on le retrouve braqueur, formant une équipe avec deux complices qu'il a rencontrés chez les parachutistes, où il s'était engagé volontairement, avide de se battre et de servir. Mais les investigations de la police se resserrent sur le trio, de l'indice balancé par un maquereau, à la surveillance d'un garage, jusqu'à ce que Dominique se fasse arrêter, mettre en garde à vue et interroger.

Le titre du roman fait allusion au besoin constant qu'a Dominique de s'échapper. Pour fuir la médiocrité du quotidien, le milieu des voyous est le seul qui s'offre à lui comme altérité. Celui-ci lui propose une manière de jouer son existence, lui offre une maison des miroirs où, finalement, les autres n'existent pas plus que dans la vie réelle, semble-t-il à Dominique, mais où il est possible, au moins, de vivre selon une esthétique.

 

Jean Chauma, Échappement libre, BSN Press

Commentaires

  • Merci, grand merci !

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