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  • Jean Chauma, Le banc

     

    Par Alain Bagnoud

     

    Jean Chauma, Le bancL'ancien voyou, habitué des prisons de haute sécurité pour braquage de banques et de bijouteries, continue son cheminement littéraire. Il écrit des livres singuliers, qui ne sont fondus dans aucun moule. Autobiographie, autofiction, roman policier, essai? Un mélange de tout ça. Ses livres à la composition singulière sont des ovnis lucides et âpres.

    Dans Le banc, un voyou est en train de mourir, touché par une balle. On n'apprendra qu'à la fin qui la lui a tirée. Entre temps, il y a des flash-backs, un retour sur son enfance, sa mère et la relation quasi incestueuse qu'elle entretient avec lui, sa fugue à quinze ans, les premiers vols, son premier braquage.

    Puis le livre change. Une femme le voit sur ce banc, elle comprend qu'il n'est pas bien, elle veut l'aider. Le voyou n'est pas un inconnu pour elle. Surnommé Le Mammouth, c'est une figure du quartier. La femme est d'ailleurs certaine qu'il a assassiné un homme politique, des années plus tôt.

    Suit un long dialogue, qui occupe une grande partie du livre, et qui pourrait faire une pièce de théâtre. Elle tente de comprendre son acte, de savoir qui il est, il se définit peu à peu. Puis elle part chercher du secours et il meurt, après que le lecteur a compris pourquoi il a reçu une balle et de quelle manière ça se rattache à son passé.

    Rien de canonique dans tout ça, mais une force et une efficacité. Au-delà de l'anecdote, ce qui intéresse surtout Jean Chauma, c'est de comprendre un cas particulier: le voyou des années 70. Il en a fait un type, et fore ce personnage avec intelligence afin de montrer quels sont ses ressorts, ses envies, ses projets, ses valeurs.

    Et il y réussit fort bien.

     

    Jean Chauma, Le banc, Bsn press

  • Le Misanthrope

    Par Alain Bagnoud

    Molière

    Quand Molière jouait Alceste, le public riait. Grâce peut-être aux mimiques irrésistibles du grand comédien, qui roulait des yeux, bougeait ses sourcils noirs, hoquetait, etc.

    Grâce aussi au ressort comique de la pièce qui est basé sur un oxymore. Le misanthrope amoureux. L'opposition violente entre cet homme que les simagrées mondaines révulsent, et cet amoureux qui est le jouet de Célimène, les deux dans un même personnage.

    Pour amuser, il faut accentuer la contradiction. C’est ce qu’on a fait longtemps.

    On riait encore en 1840, mais plus seulement. « Lorsqu'on vient d'en rire, on devrait en pleurer » écrit Musset après avoir assisté à une représentation.

    De nos jours, plus aucun metteur en scène ne rend Alceste risible. Ce serait difficile. Il faudrait le rendre ridicule par des procédés de cirque. Ce n'est plus possible à cause de plusieurs raisons:

    La vénération qu'on a pour Molière.

    La beauté du texte et le respect qu'il entraîne.

    L’évolution historique du personnage d'Alceste, plus particulièrement depuis que Jean-Jacques Rousseau en a parlé.

    Une autre sensibilité globale. Le conflit entre la comédie amoureuse, la grimace, le rôle qui est demandé par la séduction d’une part, et le besoin de sincérité, la volonté de se présenter en entier et d'agir avec franchise d’autre part est devenu tragique.

     

    Le Misanthrope sera joué du 30 septembre au 23 octobre à l'Espace Fusterie, mis en scène par Cyril Kaiser.