Mais jusqu'où s'arrêteront-iels? (24/01/2022)

Par Pierre Béguin

Moi, j’en étais resté naïvement à la querelle sur le sexe des anges, une question qui n’est, par ailleurs, toujours pas résolue et dont tout le monde se fout royalement.

Décidément, je ne suis pas un bon progressiste. A l’inverse de cette cinquantaine de femmes, diacres ou pasteures, soucieuses de mener une réflexion rejoignant des préoccupations sociétales actuelles, qui, lors de la grève des femmes de 2019, ont dressé une liste de revendications envoyée à l’Église protestante genevoise (EPG). Des revendications comprenant une application stricte, dans tous les supports de communication, de l’écriture épicène, un engagement concret sur toutes les questions LGBTQIA+ et environnementales, à commencer par le réchauffement climatique (j’ai entendu personnellement un pasteur inclure cette problématique dans la prière dominicale), et, last but not least, comme on devait s’y attendre, une réflexion théologique sur la représentation de Dieu au-delà du genre.

Eh oui! Car Dieu, figurez-vous, est perçu comme un homme, sage, bienveillant, avec une grande barbe blanche, sereinement assis comme un bonze sur un nuage. Et cette image genrée est absolument intolérable. Il faut que cela change, et vite, des fois qu’on pourrait le confondre avec un homme hétéro, blanc, de plus de cinquante ans!

«Démasculiniser» Dieu de manière à ce que le Tout-Puissant ne véhicule aucun imaginaire genré relève donc de l’urgence ecclésiastique. C’est dorénavant le grand chantier lancé par la Compagnie des pasteurs et des diacres de l’EPG, qui entend plaider pour la possibilité de désigner Dieu par d’autres pronoms que «Il», soit par «Elle» (qui ne ferait alors que renverser la représentation sexuée), soit par «Iel».

Chouette! Je me réjouis: «Notre Mère qui êtes aux cieux...» ou, mieux encore: «Iel qui êtes au cieux...»

Voilà donc que le wokisme contamine même le spirituel, que la démarche de déconstruction des stéréotypes s’attaque aussi, de l’intérieur, aux églises, et qu’avec cet air du temps bientôt irrespirable se répand partout comme un gaz pesant le ridicule, la niaiserie, la crétinerie, le grotesque!

Mais jusqu’où s’arrêteront-iels?

Comment des théologiens, en l’occurrence des théologiennes, peuvent-iels confisquer la réflexion du Consistoire sur de telles inepties? Comment, par définition, le Tout-Puissant, qui fait du néant une cohérence, pourrait-Il être genré?

Comment l’Église protestante peut-elle se perdre ainsi à se mêler de politique (elle avait déjà fait campagne pour l’initiative sur les multinationales)? Comment peut-elle s’inscrire dans la mouvance wokiste et introduire en son sein des idées qui, comme un cheval de Troie, a précisément pour objectif d'anéantir ce qu'elle représente? N’aurait-elle plus rien à proposer que de se raccrocher aux idées à la mode, même les plus sottes, quitte à en périr?

La réponse est simple: comme beaucoup d’autres, ces femmes pasteures et diacres, sous couvert de progressisme, sont les dupes, les idiotes utiles d’une mouvance aux enjeux de laquelle elles n’ont tout simplement rien compris. En attendant, voudraient-elles vider les âmes et leur église qu’elles ne s’y prendraient pas autrement.

«En tout cas, je peux vous dire avec une certitude quasi mathématique que le premier à s’en foutre, c’est Dieu» (Vincent Schmid, philosophe et pasteur à la retraite).

 

 

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