TOUS LES COQS DU MATIN CHANTAIENT (30/04/2014)

 

Par Anne Bottani-Zuber

images?q=tbn:ANd9GcRCHhjfGFvkEa16mvNwtd3IYUc6dUKhUUuXaZkyaFC8T8jqtarLbwLes rues sont vides. La ville est immense et silencieuse. Seul le bruit d’une cloche qu’un coup de vent fait vibrer trouble le silence. Il les a pourtant attachées, ces maudites cloches, mais la pluie a rongé les cordes. Quelqu’un – mais qui donc ? - remonte les horloges. Et il y a la course des rongeurs au cœur des maisons désertes, et le cheval, qui lui aussi, voulait partir mais qu’il a enfermé dans l’écurie.

Car ils sont tous partis, même si au delà des murailles, il n’y a rien qu’une plaine nue et crayeuse. Oui, ils sont tous partis car un jour, un groupe de paysans, fiers et désinvoltes en dépit de leur fatigue, vêtus de rouge et coiffés de toques opulentes, splendides malgré leur dénuement, ont traversé la ville. Tous les ont suivis, tentés par la découverte, l’aventure, même s’il y a la mort tout au bout.

Lui, le gouverneur inutile d’une ville où il n’y a plus rien à administrer, lui, le seul qui soit resté, partira-t-il un jour ? Qui sait ? Il suffirait d’un « tourbillon qui croise (sa) route immobile, assez fort pour (l’) arracher à cette terrasse » où il se tient si souvent.

La ville comme métaphore de l’enfermement … Le voyage appel à la découverte mais aussi point de non-retour … Le voyage antidote à l’absence et à la solitude  … La mort qu’on choisit ou qu’on nous vole … Il y a, dans ce petit texte de Bouvier, un des premiers qu’il ait écrit et qui a été publié en compagnie de deux autres textes et de douze gravures de Thierry Vernet, un peu de tout cela.

Il y a aussi, et surtout, des fulgurances qui annoncent l’auteur de « l’Usage du Monde ». Et une musique sombre et envoûtante qui longtemps accompagne le lecteur.

 

Nicolas Bouvier, Thierry Vernet – Tous les coqs du matin chantaient – Editions Zoé

 

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