Au temps de l'adolescence de Candide Rossier (21/09/2012)

Par Alain Bagnoud

 

Candide Rossier, né en 1930, n'est pas un inconnu pour moi. Dans la fin des années 70, au collège de Sion, il était un de mes enseignants. Mais il était difficile de se douter, à l'époque, que, sous la cuirasse professorale, il dissimulait une sensibilité proustienne.

Celle-ci le fait se retourner aujourd'hui sur les années de son adolescence, qui s'est déroulée à la fin des années quarante, en Valais. Dans une langue maîtrisée, il relate cette période où son amour de la lecture et de l'écriture s'est développé.

Le livre raconte en effet une trajectoire personnelle liée aux livres. Il est donc d'abord un chant d'amour à la langue française, qui passe par Ramuz principalement et conduit l'adolescent à l'écriture.

Fils de paysan qui a créé son domaine et compte sur ses rejetons pour lui servir de bras, Candide Rossier n'était pas destiné à une autre carrière que celle de la terre. Ce sont les textes approchés et lus à l'école primaire qui lui ont fait aspirer à des études, ce qui n'allait pas de soi.

Finalement, son père lui a permis l'Ecole normale, qui le formerait comme instituteur. Question de classe sociale.

On voit dans son livre les fils méritants du peuple, destinés à devenir régents, qui arrivent à Martigny par le train. Quand ils descendent, leurs places dans les wagons sont reprises par les fils de bourgeois de la ville, qui partent eux jusqu'à Saint-Maurice pour étudier au Collège de l'Abbaye, devenir avocats ou médecins et occuper ensuite les positions qui leur reviennent de droit.

Cet exemple des mœurs de l'époque n'est pas le seul à nous faire revivre l'esprit d'une période révolue. Car Au temps de l'adolescence est également un document, un témoignage fourmillant de petits faits significatifs, qui illustrent une société disparue.

Ce qui frappe en effet dans le livre, c'est le contexte de l'époque et ses valeurs, habilement suggérées au travers des épisodes qui construisent le récit. On y sent une rigidité sociale, donc, mais également un enracinement des gens dans leur culture et leur terroir, des relations familiales serrées, une manière de vivre axée sur les valeurs du travail et de la religion. Une forte méfiance de la culture aussi, et principalement des livres, livres libérateurs, livres proposant une ouverture, qui sont, pour cela, interdits aux écoliers ou aux étudiants, sauf à passer par le contrôle d'un professeur censeur qui vérifie leur forme, leur contenu, et confisque sans état d'âmes tout ce qui ne correspond pas aux critères de la morale bien-pensante qui règne sur le canton.

A noter que ce livre a été précédé par un premier volet autobiographique, également paru aux Editions de L'Aire, et qui racontait les années précédentes de Candide Rossier. Son titre: Au pays de l'enfance.



Candide Rossier, Au pays de l'enfance, Editions de L'Aire

Candide Rossier, Au temps de l'adolescence, Editions de L'Aire


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