Mais jusqu'où s'arrêteront-ils? (17/06/2012)

Par Pierre Béguin

Tram.PNGOr donc, pendant qu’à Lausanne on se déplace en métro à la satisfaction de tous et qu’à Genève on fête les 150 ans du tram 12 (cherchez l’erreur!), les lecteurs de la Tribune (mardi 12 juin 2012) jugent sévèrement la mobilité au Royaume de Calvin. Ce n’est pas un scoop pour quiconque vit dans cette ville. Et encore, 4 sur 10 c’est une note plutôt clémente. L’un des problèmes – tout le monde l’admet, ce qui est plutôt rare au bout du lac – vient du libre choix du mode de transport inscrit dans la Constitution genevoise en 2002. Vouloir faire cohabiter tous les moyens de transport démocratiquement sur une même artère revient en fin de compte à péjorer toutes les options. Chacun roule ou marche sur l’espace trop exigu de l’autre. A deux pattes, à deux ou à quatre roues, avec ou sans moteur. C’est la chienlit. Il faudra choisir. D’autant plus que, même si les politiques n’ont pas le courage de l’imposer «officiellement», ce choix a été fait depuis plusieurs années: sus à la voiture, tout au tram!

La question n’est jamais posée. Elle mériterait de l’être pourtant: Était-ce le bon choix? Le tram oscille entre 12 et 15 kilomètres heure de moyenne. Et même si on lui donne priorité sur les autres moyens de transport (ce qui relève du bon sens), sa vitesse moyenne restera insatisfaisante. Ainsi, pour un trajet très fréquenté, il me faut, porte à porte, 30 minutes en tram de mon domicile à mon lieu de travail (3 minutes d’attente comprise, sans transbordement et avec priorité au feu) alors qu’il m’en faut 32 à pieds en profitant de la ligne droite (3 kilomètres au lieu de 5).

Ce constat me rappelle une remarque du feu pilote automobile tessinois Clay Regazzoni s’exprimant sur la F1 moderne: «Ils dépensent des milliards pour se dépasser dans les stands... » A Genève, on dépense donc des milliards pour aller aussi vite que les piétons... pour autant que rien ne vienne perturber le trafic (trois flocons peuvent suffire à redonner à la marche le monopole de l’efficacité, on en fait l’expérience chaque année en plein hiver). Et lorsqu’on voit passer un de ces vieux trams verts avec lequel quelques nostalgiques occupent leur temps libre, on constate avec amusement que les nouveaux trams rutilants de publicités ne vont guère plus vite. Au fond, le tram est aussi vieux que les premiers projets du tracé CEVA. C’est pourtant avec cette paire de vieilles godasses Air Cramer qu’on veut propulser Genève dans la mobilité du XXI siècle. Et de s’étonner ensuite qu’on n’avance pas...

Dire que certains illuminés attendent encore le CEVA comme le messie! La mobilité à Genève? Mais jusqu’où s’arrêteront-ils?

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