La Beauté du geste, de Catherine Fuchs (21/05/2010)
Par Alain Bagnoud
« Qu’a-t-elle réussi à dire? Tout? Certainement pas, mais le plus important n’est pas là, elle a chanté comme elle devait. »
On ne peut pas évoquer ce roman sans parler immédiatement de La messe en si, puisqu’elle lui est (au roman, donc), un si formidable moteur, et aussi un cadre structurel et temporel, qui rythme tout le récit et lui donne une dimension importante.
A la première page, Marianne, un des personnages principaux du livre (le personnage principal, en fait), se prépare à chanter cette messe de Jean-Sébastien Bach dans la cathédrale de Genève. A la fin, 300 pages plus loin, le concert est terminé, le public s’en va. Dans l’intervalle, quelque chose d’important s’est dénoué au fil des morceaux dans les vies des cinq personnages féminins du livre.
Elles se connaissent, sont de milieu bourgeois. Une journaliste, deux musiciennes, une prof, un médecin. Catherine Fuchs les prend à ce moment de la quarantaine où on se pose quelques questions essentielles sur sa trajectoire, sur la justification de celle-ci et les possibilités de sortir des rails sur lesquels on se croit. La diversité des caractères et des réactions lui permet de dresser un bilan conséquent de cet âge. Il y a celle qui reste fermement dans la tradition, celle qui se laisse tenter par une aventure homosexuelle, celle qui habitée d’un espoir fou ose la rupture complète et finalement désastreuse...
La composition minutieuse du livre fait alterner leurs histoires qui se croisent. Les passages s’enchainent naturellement, avec beaucoup d’art, et mettent petit à petit en place les morceaux d’un vaste puzzle. Il n’est pas seulement question de crise existentielle, mais aussi de relations, de l’amitié, de l’amour, des attentes, de Genève aussi, beaucoup, ville qui devient comme un personnage supplémentaire de la fresque.
Et pour rythmer l’intrigue, il y a un mystère. Gianni, chef d’orchestre qui dirige cette messe en si (à laquelle participent ou assistent toutes ces femmes), Gianni, donc, a séduit une d’entre elles, lui a proposé d’abandonner sa famille, de partir avec lui, mais a finalement disparu seul, abandonnant tout pendant trois longues semaines, laissant derrière lui des drames et des interrogations. Trouvant aussi, au passage, on le découvre à la fin, une vérité.
Ce n’est pas le seul à établir un bilan dans ce livre réussi, à l’écriture juste et sensible. Tout compte fait, grâce à la remémoration et à la musique, les personnages parviennent à établir un accord avec eux-mêmes et avec leur passé, acceptent leurs plénitudes et leurs manques, s’avancent vers l’apaisement, assument la responsabilité de simplement être.
Catherine Fuchs, La Beauté du geste, Bernard Campiche Editeur
Publié aussi dans Le blog d'Alain Bagnoud
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Commentaires
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Écrit par : adjustable bed | 15/04/2011